Dans la Tunisie de l'après indépendance, le peuple n'a jamais eu, sauf à des exceptions près, l'opportunité de s'exprimer et de dire ce qu'il pensait. Mais après la révolution du 14 Janvier 2011, les choses ont changé du tout au tout et les composantes de la société sont devenues libres de s'exprimer. Mais cette liberté d'expression commence à dépasser le seuil de l'entendement et le peuple exprime,en fait, de cette nouvelle liberté née, son refus de voir le système de Ben Ali se réitérer et de continuer à pulluler, ce qui est, à juste titre, compréhensible et légitime. Une bonne partie des jeunes rassemblés à la place de la Kasbah ont été interrogés par des journalistes sur leurs revendications et sur le système parlementaire qu'ils revendiquent tant ; mais aucun d'eux n'a réussi, malheureusement, à expliquer ce qu'ils souhaitaient. Plus grave, ils ont été incapables d'expliciter le système politique qu'ils revendiquent, ce qui est de nature à mettre sur la table plusieurs interrogations de taille ! A coup sur, ces jeunes sont guidés par des forces politiques qui leurs soufflent quoi faire et quoi dire sinon comment peuvent-ils revendiquer, à un tel point d'assurance, un système politique qu'ils ne maîtrisent pas et dont ils ne comprennent pas les rouages ? Après avoir demandé et obtenu le départ de Mohamed Ghannouchi, qui n'a pas été, par ailleurs brillant, dans la gestion des acquis de la révolution, les voilà qui reviennent à la charge pour contrecarrer voire anéantir la nomination de Caied essebsi au poste de premier ministre. Pourtant, l'accession de Béji caied essebsi à ce poste est la meilleure qui pouvait arriver à la Tunisie en cette période délicate. Un homme expérimenté et rigoureux doté d'une honnêteté intellectuelle et d'un courage politique hors pair. Cette contestation du tout et de rien relayé par l'outil « dégage » commence pourtant à tourner au vinaigre et à dépasser les limites. On commence, en effet, à ne plus comprendre ces jeunes et ce qu'ils veulent. Peut-être qu'ils ne se comprennent pas eux-mêmes ? La nomination de Béji Caied Essebsi et son action de constituer un nouveau gouvernement ne peut être que bénéfique. Rappelons dans ce contexte que Caied Essebsi n'est pas un homme de clan et qu'il est un des rares à avoir dit non à Bourguiba en présentant sa démission. Il a été, en outre, un des premiers et des rares à avoir exigé de Bourguiba la séparation du parti et de l'Etat à un tel point que Bourguiba s'en est offusqué et lui a répondu : « et moi, tu veux peut être aussi me couper en deux ». A l'ère Ben Ali, Caied Essebsi a été évincé de la présidence du parlement parce qu'il ne partageait pas les orientations de Ben Ali et de ses faucons. La réaction de Abdessalem Jrad, est, quant à elle bizarre. Non seulement il a désapprouvé la nomination de Caied Essebsi mais a été étonné voire vexé de ne pas été consulté préalablement pour la nomination de celui-ci. Pourtant, le protocole, ne prévoit pas et n'a jamais prévu la consultation des organisations professionnelles pour la nomination du premier ministre. C'est le Président de la République qui le décide après consultations des présidents des deux chambres parlementaires. Abdessalem Jrad va cette fois trop loin et dépasse tous les entendements historiques et protocolaires et quand bien même à cette époque très délicate, cela reste injustifié et incongru. D'un autre coté, la nomination d'un poids lourd comme Caied Essebsi est une décision stratégique et très adroite. La majorité écrasante du peuple, qu'on a aussi nommé majorité silencieuse n'y voit, en effet, aucune aberration. Si ce troisième gouvernement de Béji Caied Essebsi est contesté lui aussi, la Tunisie ne pourra probablement plus s'en sortir. On ne parlera alors plus ni d'une assemblée constituante ni d'aucun régime puisque dans ce cas, notre pays sombrera dans le chaos et se dirigera, fatalement, vers l'abîme. Ceci doit être assimilé et compris par la jeunesse de ce pays. Il faut le comprendre aujourd'hui et pas demain. Demain, il sera trop tard et ce sera aussi trop peu. La majorité silencieuse est-elle appelée maintenant à bouger et dire ce qu'elle pense ? Il va sans dire qu'ils veulent protéger les acquis de la révolution, qu'ils veulent de la maturité politique et sociale au peuple, qu'ils revendiquent le droit à la dignité et au travail et qu'ils cherchent à instaurer l'équité sociale et le partage des richesses et c'est justement à ce titre qu'ils doivent laisser ce troisième gouvernement travailler et réussir sa mission. Mettre les bâtons dans les roues de ce gouvernement ne permettra point d'améliorer la situation des jeunes et de drainer les investissements étrangers.