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La citoyenneté est une attache civique
Entretien avec Sana ben Achour
Publié dans La Presse de Tunisie le 27 - 06 - 2015

Elle est universitaire, militante, membre influent et actif de la société civile. Aux multiples questions suscitées invariablement à chaque Ramadan, la juriste donne des réponses édifiantes
Que dit la loi à l'endroit des non-jeûneurs et des établissements qui ont choisi d'ouvrir de jour le mois Ramadan? Sont-ils dans la légalité ?
Oui ils sont dans la légalité. Le peuple tunisien a tranché et a donné son dernier mot après trois ans de constituante, lorsqu'il est descendu dans la rue et refusé de manière claire la disposition selon laquelle l'Etat a une religion ou que l'Islam soit source de droit. Cela a été refusé radicalement par les Tunisiens.
De quelle manière ?
Lorsqu' à l'article 1, l'article 2 a été ajouté, celui qui décrit le caractère civique et civil de l'Etat, que l'Etat est fondé sur la loi ainsi que sur le lien de citoyenneté. La citoyenneté qui n'est pas un lien de fraternité religieuse mais une attache civique et définie de manière primordiale au territoire, à une patrie. La différence entre la constitution de 1959 et celle de 2014, avec l'article premier qui a été maintenue, l'article 2. De même, tous les éléments qui ont disparu portant sur le caractère non révisable de l'article premier ou encore que l'Islam est la religion d'Etat ont tous disparu en vue de la consolidation de l'aspect civique de l'Etat. Ainsi toute réglementation devra s'appliquer à des citoyens égaux devant la loi, indépendamment de la religion, la race. Autrement dit, l'égalité devant la loi signifie qu'il n'y a pas d'argument religieux à invoquer pour interpréter une loi. Il peut y a voir l'argument de l'intérêt général, de la paix civile et du vivre-ensemble, toutefois. Le troisième argument, c'est bien entendu la liberté de conscience consacrée par le texte fondamental. C'est une très grande avancée. Ce n'est pas rien la liberté de conscience, elle se situe au-delà de la liberté de culte. La liberté de conscience est la première fois intégrée dans un texte constitutionnel. C'est un acte révolutionnaire qui dispose que les jugements d'apostasie sont nuls et non avenus, puisque la conscience de tout un chacun est libre. On peut donc être musulman et bon musulman, musulman mais mauvais musulman ou ne pas être musulman, ne pas avoir de religion du tout.
Le contre-argument se rapporte à la circulaire de 1981, dite circulaire Mzali, qui n'a pas été abrogée depuis. La nouvelle constitution annule-t-elle directement les dispositions précédentes ?
La constitution n'abroge pas directement par elle-même, la constitution n'est pas auto-exécutive comme toutes les lois d'ailleurs et c'est pourquoi des circulaires sont encore en vigueur. Malheureusement pour nous, c'est la pyramide inversée (selon la hiérarchie des lois, la constitution est au sommet de la pyramide judiciaire, les règlements, décrets et arrêtés et actes administratifs, circulaires sont tout en bas, ndlr). Résultat, l'efficacité du droit dépend d'une circulaire, des règlements et des petits actes de l'Etat et de l'administration. Cette circulaire au regard de la constitution aujourd'hui est inadmissible, contraire à tout l'édifice construit avec beaucoup de patience et de passion par les Tunisiens. Un édifice qui nous a pris trois ans, nous avons pris notre temps. C'est donc une constitution largement mûrie. Il est impératif aujourd'hui que toutes les circulaires soient retirées et ce sont des actes simples.
Au temps où la Tunisie respirait à pleins poumons la liberté, il y avait une sorte de pratique tacite non écrite mais observée par tous, selon laquelle on ne servait pas sur les terrasses et ostensiblement les non-jeûneurs. Qu'en pensez-vous ?
Celui qui respecte cette règle-là signifie littéralement « celui qui commet des sacrilèges ne doit pas s'exhiber», cette règle est de l'ordre du religieux. C'est une occasion pour moi de faire remarquer que les religions sont parfois plus simples que les esprits aujourd'hui, puisque celles-ci admettent la transgression. Mais transgresser la loi religieuse pour celui qui y croit bien entendu. Pour celui-là, il n'est pas question d'afficher son non-jeûne. Mais pour ceux qui ne veulent pas par choix, ou qui n'y croient pas, et qui ne veulent pas observer Ramadan, en quoi c'est une agression pour le jeûneur ? Le vivre-ensemble stipule de trouver l'équation. Pour la paix sociale, on peut comprendre qu'il y ait dans un pays donné un certain nombre de contraintes sociales. Un consensus social qui maintient un équilibre, ceci étant tant que ce consensus n'est pas contraire à la liberté.
Dernièrement, des incidents violents ont été perpétrés paradoxalement par des agents gradés des forces de l'ordre, ceux supposés faire respecter la loi et l'ordre public, ils ont été sanctionnés. Qu'en pensez-vous ?
Il faut applaudir les décisions de révocation. L'autorité est allée dans le sens des libertés et du respect du droit et surtout de la crédibilité de l'administration, il faudra s'en féliciter. De toutes les manières, les personnes qui ont des convictions religieuses pensent que le sacré leur attribue une sorte de légitimité vis-à-vis d'autrui. Tous les orthodoxes juifs, chrétiens, musulmans. Cela relève de l'orthodoxie violente, ils se croient investis d'une mission sacrée.
Quelle est votre perception entre Ramadan de l'année dernière, celui de 2013 et celui de cette année 2015. Nous avons l'impression que la société n'a pas évolué, on remet sur le tapis les mêmes débats, on se perd dans les mêmes polémiques.
Oui, de toutes les manières, cela se fera sur le long terme. J'ai le pessimisme de la raison et l'optimisme de la volonté. Quand je réfléchis, je suis un peu triste pour le pays. Mais il y a des femmes et des hommes et de la société civile, et tout le monde souhaite avancer sur le chemin de la démocratie. Mais le changement social prend du temps. Moi j'ai visité certains pays arabes dernièrement, j'ai été en Jordanie, un pays attachant avec des gens admirables et très engagés, mais la Tunisie d'aujourd'hui, avec sa fragilité, a fait des avancées fondamentales et irréversibles que l'on perçoit a contrario lorsqu'on se rend dans un pays arabe et musulman. Nos comportements, nos débats n'existent pas ailleurs. On ne peut pas engager un débat public sur la religion, sur un café ouvert le jour pendant Ramadan. Il est difficile, voire impossible, qu'un responsable soit limogé pour avoir violenté une jeune fille, ça n'existe pas. Il y a des choses qui sont en marche, et des ruptures infiniment petites qui ne sont pas toujours manifestes mais qui traversent, à mon avis, toute la société tunisienne.


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