Par Amel Zaïbi La réaction libyenne, plutôt d'une partie libyenne, le gouvernement non reconnu de Fajr Libya en l'occurrence, n'a pas tardé à se manifester après l'annonce et le démarrage des travaux d'aménagement du mur de séparation, une digue de sable doublée de tranchées, à la frontière tuniso-libyenne. Bien que les objectifs de cette séparation soient connus et avérés, à savoir mettre un terme ou du moins réduire les infiltrations de terroristes et le trafic d'armes et la contrebande, les voisins de l'Ouest libyen ne l'ont pas entendu de cette oreille. Un communiqué publié samedi dernier signé par leurs soins dénonce l'initiative tunisienne « unilatérale » et la critique sévèrement prétextant que cet ouvrage est — pas moins que cela — une forme de colonisation de la Libye et une atteinte à sa souveraineté. Nos voisins libyens nous ont souvent rappelé que les terroristes de Libye sont tunisiens et qu'ils viennent en Libye pour semer la pagaille et l'insécurité. Et nous avons toujours répliqué que ces jeunes tunisiens devenus terroristes sont entraînés et armés dans des camps libyens et que même leurs coups sont fomentés en Libye. Cela dit et redit, pourquoi Fajr Libya s'indigne quand la Tunisie décide enfin, après plusieurs attentats et des dizaines de victimes tunisiennes et européennes, à prendre des mesures pour renforcer la sécurité de ses frontières, comme l'ont déjà fait d'autres pays, l'Algérie et l'Egypte ? Pourquoi nos voisins s'opposent-ils à une telle mesure souveraine alors que les deux principaux passages frontaliers, Dhehiba et Ras Jédir, restent ouverts aux flux de passagers et de marchandises, dans les deux sens ? Qu'est-ce qui inquiète nos voisins libyens alors qu'ils vont pouvoir continuer à se déplacer librement en Tunisie, à se soigner dans ses cliniques, à s'approvisionner dans ses supermarchés et à habiter des maisons et des quartiers aux côtés des familles tunisiennes? Contrairement à ce que l'on veut faire croire, cette mesure est prise trop tard par les autorités tunisiennes. C'est ce que pense un bon nombre de Tunisiens. A maintes reprises, des voix se sont élevées pour réclamer carrément la fermeture de la frontière sud avec la Libye. En optant pour le mur de séparation, les autorités tunisiennes ont choisi la solution médiane, celle qui limitera, espérons-le, le danger qui menace le pays et qui, à la fois, laisse la porte ouverte aux voisins. Le gouvernement non reconnu de Tripoli n'a pas manqué, dans une perspective de surenchères, de mettre en garde la Tunisie contre une éventuelle réponse que l'on devine musclée et regrettable n'importe où et n ‘importe quand sous prétexte que les limites frontalières doivent être tracées en coordination avec les « autorités libyennes ». On se demande lesquelles ? La réaction de nos plus proches voisins libyens est, pour le moins qu'on puisse dire, inattendue et incompréhensible. Encore une fois, nous restons perplexes face à autant d'ingratitudes. Finalement, la Tunisie qui a toujours été une terre d'accueil, et le restera, fait face à la période la plus critique de son histoire en termes d'insécurité. La situation de chaos qui prévaut dans la Libye voisine peut expliquer, en partie, ce genre de réaction irréfléchie et irresponsable. Et il faut croire que ce ne sera pas aisé d'y remédier.