Radhouane Ben Salah, président de la Fédération tunisienne de l'hôtellerie, exhorte les hôteliers à réserver un traitement particulier aux touristes tunisiens qu'on attend pour remplir les unités touristiques en août prochain Quand on parle du tourisme en cette période où la guerre totale est déclarée contre le terrorisme, à la suite de l'attentat meurtrier perpétré à Sousse, on évoque surtout les pertes en devises, les emplois menacés de disparition, les mesures prises pour inciter les Tunisiens à sauver la saison touristique en investissant les hôtels au mois d'août prochain et enfin des incitations qui seront offertes à nos voisins algériens qui ont décidé de pallier l'absence des touristes européens et de remplir nos unités touristiques en cette période de disette. Hier, Radhouane Ben Salah, président de la Fédération tunisienne de l'hôtellerie, a ouvert son cœur à La Presse et a dit les choses crûment : «Oui, la saison touristique risque d'être définitivement perdue au cas où les chiffres enregistrés au cours des 10 premiers jours de juillet continuerait, que les Tunisiens n'adhéreraient pas à la campagne de promotion du tourisme intérieur lancée pour que nos hôtels ne soient pas totalement vides en août prochain et que nos hôteliers ne comprendraient pas qu'ils ont désormais affaire à une autre catégorie de clients (les touristes tunisiens) dont les désirs et les attentes diffèrent de ceux des touristes traditionnels (les Européens). Et notre interlocuteur de clarifier son analyse : «Au cours des 10 premiers jours de juillet, on a enregistré la fermeture de 10 hôtels dans les régions de Djerba, Monastir et Hammamet. C'est la première fois dans l'histoire du tourisme tunisien qu'une unité touristique ferme en juillet, considéré comme le mois du tourisme par excellence. Plus encore, le nombre de touristes a chuté de l'ordre de 73,5% en comparaison de la même période de 2014. A la suite de l'attentat terroriste du musée du Bardo en mars dernier, on a enregistré une régression de 28% du nombre de touristes qui visitaient notre pays en cette période. Ce qui est inquiétant cette fois, c'est que les gouvernement britannique, danois et belge ont, non seulement appelé leurs concitoyens à éviter la destination Tunisie, mais ont défrété des avions pour rapatrier ceux qui étaient sur place et qui ont refusé de quitter la Tunisie. Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée des représentants du peuple, et Selma Elloumi, ministre du Tourisme, actuellement en visite de travail au Royaume-Uni, essayent de faire raisonner les gouvernements concernés et nous attendons pour voir à quoi aboutiront leurs tentatives». A la question de savoir si le secteur touristique risque de s'effondrer totalement, le président de la FTH souligne: «C'est plutôt la saison touristique 2015 qui est perdue. Notre manque à gagner se chiffre jusqu'ici à près de 2 milliards de dinars. Quant aux emplois perdus, on n'est pas encore aux comptes. Pour le moment, notre objectif principal est de préserver la main-d'œuvre exerçant dans les unités touristiques à l'heure actuelle. D'ailleurs, une réunion de concertation se tiendra, demain, avec l'Ugtt pour voir ce que nous pouvons faire pour échapper à la mise au chômage de nos ouvriers». Nous sommes allés jusqu'à 50% de moins Reste maintenant à savoir comment les hôteliers vont faire pour satisfaire les clients tunisiens qui trouvent que les prix qui leur sont offerts ne sont pas très attractifs et ne les encouragent pas à courir pour remplir les hôtels boudés par les touristes européens. «Il faut que les gens sachent que les prix pratiqués au mois d'août sont les plus chers sur l'ensemble de la saison touristique. En plus clair, dans un hôtel cinq étoiles et avec une réduction de 50%, un client tunisien ne peut pas payer une nuitée à 105 dinars. Actuellement, tous les hôtels ont concédé des réductions allant de 40 à 50%. Il y a des hôtels où on peut passer une nuit à raison de 65 dinars. Si on tombe à moins de ce prix, les hôtels tourneront à perte», précise Radouane Ben Salah. Il ajoute : «Je suis convaincu que la situation exceptionnelle par laquelle passe le secteur touristique exige des mesures exceptionnelles. C'est la raison pour laquelle nous allons traiter directement avec les touristes tunisiens sans passer par les agences de voyages, ce qui fera économiser à nos clients les commissions qu'ils payaient à ces agences. D'autre part, nous sommes déterminés à offrir les meilleurs services possibles à nos clients tunisiens. Et ayons le courage de le dire et l'audace d'agir en conséquence : aujourd'hui, nous avons une nouvelle catégorie de touristes, les touristes tunisiens, qui ont leurs habitudes et leurs besoins spécifiques. Donc, il est indispensable que nos hôteliers s'adaptent à leurs nouveaux clients et évitent, surtout, de les considérer comme des solutions de rechange temporaires. Quant aux clients algériens qui se mobilisent déjà pour sauver ce qui reste de la saison touristique dans notre pays, nous leur sommes très reconnaissants et nous ferons tout afin qu'ils passent le meilleur séjour possible parmi nous. Ils bénéficient déjà de plusieurs faveurs au niveau des prix auprès des agences de voyages».