Selon les dernières informations, l'opposition aurait réussi à réunir les 30 signatures pour un recours contre le projet de loi de finances Jamais depuis la révolution un texte de loi de finances n'aura provoqué autant de protestations : une levée de boucliers parlementaire. Depuis lundi, le bal des retraits des blocs parlementaires et des partis de l'opposition n'en finit pas. Après le Front populaire et le Courant démocratique, c'était hier au tour des députés du Congrès pour la République et ceux du Mouvement du peuple de bouder les séances plénières. Dans l'hémicycle, il n'y avait plus en début d'après-midi que les députés du parti Ennahdha et ceux de Nida Tounès ainsi qu'une partie du groupe socialiste. D'ailleurs, cela ne semble pas déranger outre mesure le président de l'Assemblée Mohamed Ennaceur qui somme les protestataires de s'asseoir ou de quitter la salle s'ils veulent faire du bruit. Un bruit d'opposition à peine audible puisque les articles sont votés sans encombre avec un quorum raisonnable et une large majorité de oui (grâce aux élus d'Ennahdha et de Nida). C'est ainsi que l'article 61 a été voté par 110 voix pour et seulement 3 contre. L'article 61, c'est celui qui cristallise la colère d'une large majorité de l'opposition qui en arrive à bouder la séance plénière et la commission des consensus. Article 61 : cheval de Troie Les opposants considèrent en effet que cet article n'est autre qu'un cheval de Troie dans lequel se cache le projet de loi sur la réconciliation proposé par la présidence de la République. L'article en question prévoit une amnistie pour les hommes d'affaires coupables de «crimes de change». C'en est trop pour l'opposition qui dénonce «une loi de finances élaborée par les lobbies des milieux financiers». Selon le règlement intérieur, si 30 des députés de l'Assemblée ne sont pas convaincus par la «constitutionnalité» de la loi de finances, ils peuvent déposer un recours auprès de l'instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des lois. Parallèlement à la poursuite de la séance plénière, la commission des consensus s'est réunie avec le ministre des Finances, Slim Chaker. «Ce qui se passe n'est pas normal, c'est une insulte au peuple tunisien, c'est antidémocratique et anticonstitutionnel», s'insurge Mabrouk Lahrizi (CPR), à la sortie de l'hémicycle. En début de soirée hier, l'opposition a organisé un point de presse dans lequel elle a décidé de suspendre sa participation à la plénière et de ne voter «ni pour, ni contre» le projet de loi. Cela ne semble pas perturber la majorité qui continue à faire voter les articles de la loi de finances, tout en préparant une réception en vue de son adoption. «C'est une première très grave, explique Ghazi Chaouachi du Courant démocratique. C'est un signal très négatif pour les investisseurs étrangers et les institutions internationales que de faire voter la loi de finances en l'absence de toute l'opposition». Selon lui, ces propos ont même été tenus par le ministre des Finances lui-même à l'intérieur de la commission des consensus. L'opposition ne compte cependant pas se contenter de bouder l'hémicycle. Selon les dernières informations, elle aurait réussi à réunir 30 signatures. Il s'agirait des deux députés du courant El Mahaba, de Faycel Tebbini, de Iyed Dahmani, de Adnène Hajji, du bloc du Front populaire, des élus du courant démocratique, des députés du CPR et de ceux du mouvement du peuple.