Les plaignants auront jusqu'au 15 juin 2016 pour déposer leurs dossiers au siège de l'instance ou dans ses bureaux régionaux Une année après le début de ses travaux, l'Instance vérité et dignité a organisé hier, dans son siège à Tunis, une conférence de presse afin d'établir un bilan de ses activités et informer l'opinion publique sur les prochaines étapes du chantier de la justice transitionnelle. En référence à la loi organique relative à l'instauration et à l'organisation de la justice transitionnelle, l'IVD dispose d'un délai d'une année pour réceptionner les dossiers des victimes. A ce jour, 22.600 dossiers ont été déposés et qui représentent, selon la présidente de l'instance Sihem Ben Sedrine, l'essentiel des violations des droits de l'Homme subies par la population tunisienne depuis 1956. L'instance a néanmoins décidé de prolonger (conformément à la loi qui le permet) de six mois le délai de réception des dossiers afin d'atteindre le nombre de 30.000 dossiers. Les plaignants auront, en effet, jusqu'au 15 juin 2016 pour constituer et déposer leurs dossiers au siège ou bien dans les bureaux régionaux créés. «Nous avons reçu des dossiers de yousséfistes, de victimes du soulèvement du pain, des islamistes, de militants de gauche et de victimes de la révolution», a indiqué Sihem Ben Sedrine, même si elle admet que le nombre de dossiers déposés par les militants de gauche et les dossiers déposés par les femmes (17% seulement) restent en deça des objectifs, et ce, malgré une nette amélioration des chiffres. Lors de cette conférence de presse, Oula Ben Nejma, membre de l'instance, a dénoncé «la diabolisation des victimes» qui, selon elle, a été à l'origine de la réticence des femmes surtout à déposer des dossiers. L'Etat victime de corruption Tout en continuant à accepter les dossiers des victimes, l'IVD a entamé le tri des documents réceptionnés. Parmi les 22.600 dossiers, 400 environ n'étaient pas du ressort de l'instance. Les audiences des victimes ont également commencé depuis septembre avec 1.800 personnes entendues jusqu'à présent. Oula Ben Nejma a rappelé que la mission principale de l'instance est de comprendre ce qui s'est réellement passé. «Les témoignages des victimes peuvent bien évidemment être subjectifs, mais l'instance ne s'arrête pas là, nous faisons des recoupements et de l'investigation», a-t-elle déclaré. Une investigation qui se fera à partir des déclarations des victimes, qui n'épargnera aucun détail et qui ira chercher l'information là où elle se trouve. 30 juges et experts juridiques ont été mobilisés pour cette mission, mais l'instance souhaite porter ce nombre à 100 pour pouvoir faire face au travail titanesque qu'implique la justice transitionnelle. De son côté, Khaled Krichi, responsable de la commission d'arbitrage et de réconciliation au sein de l'IVD, a appelé l'Etat à déposer un dossier à l'instance en tant que «victime de corruption». «Nous avons reçu jusqu'à présent 3.000 dossiers en relation avec l'arbitrage et la réconciliation, dans lesquels l'Etat est accusé, a-t-il précisé. Nous avons étudié pour le moment 167 dossiers et nous avons trouvé un responsable du contentieux de l'Etat très coopératif».