Par Samira DAMI Le fonds d'aide à la production cinématographique subira une coupe budgétaire de 500.000 dinars, dans le cadre de la loi de finances 2016. Ainsi, l'enveloppe consacrée à ce fonds d'aide passera de 4,2 à 3,7 millions de dinars. Selon quel mécanisme, cette coupe a été décidée et pourquoi touche-t-elle le fonds d'aide à la production cinématographique ? Mystère et boule de gomme. Pourtant, on nous a rebattu les oreilles avec cette idée que la culture et la création artistique et, particulièrement le cinéma, constituent un rempart contre la barbarie et le terrorisme. Voilà qui est paradoxal et incompréhensible. Au moment où notre gouvernement a décidé de pratiquer cette coupe budgétaire dans le fonds d'aide à la production cinématographique au Maroc, et dans la foulée du Festival international du film de Marrakech, l'Etat a décidé, rapporte le site électronique huffigton Post, d'octroyer une subvention de 20% aux films étrangers, en fonction de leur investissement, sur les dépenses fiscalisées et contrôlables comme les grosses factures d'hôtel, de transport de matériel de tournage, etc. C'est-à-dire tout ce que l'Etat peut récupérer ensuite en impôts. Toujours selon Huffigton Post, «ce nouveau système, de crédit d'impôt, a été approuvé le 15 décembre dans le cadre de l'adoption du projet de loi de finances 2016 par le parlement». Cette mesure déjà adoptée par plusieurs pays, 46 en tout, dont la France, l'Espagne, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, l'Afrique du Sud et autres, a pour but de booster le tournage de productions étrangères au Maroc. «Ces aides fiscales encourageront les investissements au Maroc et multiplieront les opportunités sur le marché mondial», a déclaré Sarim Fassi Fihri, directeur du CCM (Centre cinématographique marocain), au site électronique. On peut constater que, déjà en 2015, 21 longs métrages et 16 séries télévisées ont été tournés au Maroc. Désormais, dans quelques mois quand cette loi entrera en vigueur, «les producteurs étrangers se bousculeront au portillon», certifie le directeur du CCM. Dans ce but, une opération offensive de communication auprès des producteurs étrangers est prévue durant le festival de Berlin au mois de février 2016. Avec cette loi, le Maroc perfectionne et parfait son système de production cinématographique et sa politique pour l'émergence d'une véritable industrie cinématographique, en se positionnant ainsi davantage à l'échelle internationale. La production marocaine de courts-métrages a atteint, en 2010, un chiffre record de 80 films, tandis que la production de longs-métrages, actuellement de 15 films, atteindra, en 2017 selon le CCM, 28 films. Cela outre la nette et importante augmentation de tournage de productions étrangères sur son sol grâce à cette nouvelle loi. Ne pas léser le cinéma Tout ça est dû à l'existence d'une réelle volonté politique d'aider le cinéma, puisque le fonds d'aide à la Production cinématographique est devenu une avance sur recettes, depuis 2004. Au Maroc, l'enveloppe allouée à la production cinématographique est de 6 millions d'euros (13 millions de dinars) par an, on est loin des 3,7 millions de dinars alloués par notre ministère de la Culture. En comparaison avec ce qui se passe sous nos cieux, on ne peut que constater, à la lumière de cette nouvelle coupe budgétaire, qu'au lieu d'augmenter l'aide à la production on la réduit et que beaucoup reste donc à faire. Cela alors que notre pays a montré et ouvert la voie, dans les années 80, à une véritable stratégie de production cinématographique à l'échelle maghrébine. La Tunisie était donnée en exemple. Elle était, par ailleurs, une terre de tournage, 57 films internationaux, en tout, tels «Jésus de Nazareth», «La Saga Star Wars», «Le patient anglais», «Indiana Jones», «Madame Buterfly» et autres ont été tournés sur notre sol. Bref, quand, au sommet même de l'Etat, on annonce une véritable stratégie de lutte multidimentionnelle et multi-terrain qui tient compte de tous les domaines, sécuritaire, éducatif, social et économique, notamment le domaine culturel, il faut être conséquent, la loi de finances doit donc suivre et être en harmonie avec cette stratégie. Cela en faisant en sorte de ne pas léser la culture dont le budget ne dépasse pas encore, jusqu'à aujourd'hui, 1% du budget total de l'Etat, et la création et particulièrement le cinéma. Pour cela il faut toute une politique et toute une stratégie.