Christian Hongrois est de ces pépites que l'on découvre au creux d'une recherche, d'une rencontre, d'une référence. Et dont on se demande comment on avait pu ne pas le connaître avant. Né en Algérie, issu d'une famille dont quatre générations vécurent en Tunisie, il se passionne très vite pour l'art de la poterie. Tant et si bien qu'à l'école, on lui confie les clés de l'atelier de céramique qu'il avait du mal à quitter. Plus tard en France, il découvre, ébloui, la richesse d'un patrimoine séculaire, et sitôt qu'il en a l'occasion, il ouvre… un musée des Arts et traditions populaires en Vendée où il s'est installé. Enseignant, il soutient une thèse d'ethnologie et d'anthropologie sociale, travaille sur le monde rural. Puis vint le temps où Christian Hongrois décide de repartir sur les routes de son passé tunisien, de retrouver les traces de sa famille tunisienne, de découvrir ses traditions, son artisanat et son savoir-faire. Pour cet amoureux de la céramique, Nabeul et ses potiers constituaient la destination naturelle et privilégiée. Dès lors, vingt années durant, il étudia et collectionna les poteries de cette région si féconde et si créative. Faisant de Nabeul sa deuxième patrie, lui, qui appartient à une famille de Béja, sur laquelle il avait, d'ailleurs, publié un ouvrage, il vécut au milieu des potiers qui l'accueillirent à bras ouverts. Immergé dans ce milieu, il réussit à raviver le fil de leur mémoire, et à recueillir l'histoire de cette tradition de maîtres d'œuvres. Après des années de recherche, d'enquêtes, de collecte, après avoir impliqué toute sa famille dans cette démarche passionnée, et avoir appris à ses enfants à écumer les brocantes, les vide-greniers, les arrière-boutiques d'antiquaires, Christian Hongrois jugea qu'il était temps de partager cette passion. Il dédia un livre à ses amis les potiers, «Les maîtres potiers de Nabeul : Historique de la poterie artistique de Nabeul», édité avec le concours du Centre national du livre et de la Ceramica-Stifftung de Bâle. Cet ouvrage est aujourd'hui une référence incontournable pour tout chercheur, collectionneur ou céramiste. L'auteur, quant à lui, a réuni une magnifique collection de quelque 3.000 pièces de la céramique décorative de Nabeul, digne des plus grands musées. Frédéric Mitterrand, qui signait la préface du livre, écrivait : «Ce travail de recherche minutieux de plus de quinze années nous permet de plonger au cœur de l'univers exceptionnel de ces maîtres de talent.... Eveillant l'imagination et la créativité, ce livre permet à tous les lecteurs, à travers les couleurs, les formes, les histoires de vivre pleinement un voyage aussi riche que fascinant». Aurons-nous la chance-si l'auteur acceptait de venir un jour à Tunis ou à Nabeul, présenter son livre, et le fruit de ses recherches—, d'avoir un aperçu de cette collection ? L'ONA, la Cité de la culture, un musée, ou l'Institut Français pourraient en prendre l'initiative, elle serait la bienvenue.