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Regard d'expert — pour échapper au scénario libanais et aux risques de défaut de paiement: Une feuille de route économique et financière pour la Tunisie
Par Hakim Ben Hammouda-Ancien ministre des Finances | Dans une contribution qu'il vient de publier, l'ancien ministre des Finances Hakim Ben Hammouda a essayé de formuler une série de propositions et de réflexions dans les domaines économique et financier pour échapper au scénario libanais et aux risques de défaut de paiement. Des réflexions formulées à trois niveaux, le court, le moyen et long termes. La Tunisie a vécu au rythme de plusieurs crises profondes et multiples depuis plusieurs mois. La crise sanitaire était d'une ampleur qu'elle n'a jamais connue dans son histoire moderne et qui a eu, pour conséquences terribles, un nombre de décès très élevé. La seconde grande crise qui a marqué les derniers mois est celle des finances publiques. Les difficultés se sont accentuées au cours des dernières semaines entraînant la dégradation de la note souveraine tunisienne. Priorités à court terme: sauvetage du tissu économique La question de la crise sanitaire est classée parmi les priorités économiques jusqu'à la fin de l'année 2022, du fait de ses conséquences non seulement sur la santé mais aussi pour ses implications économiques et financières. Plusieurs études ont montré que les pays arabes qui parviendront à maîtriser la pandémie sont ceux qui enregistreront un retour rapide à la croissance économique. La Tunisie se doit de définir une nouvelle stratégie de lutte contre le virus, car sa maîtrise permettra à certains secteurs et particulièrement le secteur touristique de connaître un retour rapide de ses activités. La seconde grande priorité de l'action gouvernementale concerne les finances publiques et le sauvetage de notre tissu économique et de nos entreprises. Le programme de sauvetage et de relance économique pourrait renfermer plusieurs axes fondamentaux pour l'étape à venir, à savoir : -définir un plan d'évolution des dépenses et des recettes jusqu'à la fin de l'année 2022 et envisager les solutions pour les moments difficiles des finances publiques -reporter toutes nouvelles dépenses de l'Etat jusqu'à 2022 -la lutte de manière déterminée contre l'évasion fiscale et le commerce parallèle et envisager très sérieusement de changer les billets de banque -la nécessité de prendre à bras-le-corps la question des subventions. En effet, la priorité ne doit se porter sur la compensation des produits de première nécessité mais plutôt vers les produits énergétiques tout en essayant de définir des solutions nouvelles et créatives -la mise en place de l'agence de gestion de la dette qui doit se fixer comme priorité de réduire le poids de la dette et d'éviter le recours au club de Paris -réviser les priorités de la politique budgétaire et orienter l'investissement public vers les secteurs sociaux notamment la santé et l'éducation -la révision des priorités de la politique monétaire et leur orientation vers l'investissement -l'accélération des négociations avec le FMI à travers un programme réaliste qui prend en considération le contexte social et les conséquences de la pandémie sur notre pays. Priorités à moyen terme : améliorer l'environnement des affaires A ce niveau, nous voulons mettre l'accent sur des questions essentielles, à savoir les réformes économiques et la nécessité de préparer un grand programme d'investissement dans les infrastructures pour les différents domaines que l'Etat doit exécuter en partenariat avec le secteur privé. Dans le même contexte, de grandes réformes devraient être effectuées pour améliorer l'efficacité des entreprises et l'environnement des affaires notamment en réduisant de manière substantielle les démarches bureaucratiques et les autorisations. Priorités à long terme : un nouveau modèle de développement La définition d'un nouveau modèle de développement constitue un objectif majeur des prochaines années. L'échec successif depuis le début des années 2000 dans la mise en place de ce modèle est au cœur des crises économiques et financières en Tunisie. Il est urgent d'entamer la conception de ce modèle et de mobiliser les experts et l'intelligence tunisienne pour l'élaborer. Ces propositions constituent des réflexions préliminaires pour l'établissement d'une feuille de route économique et financière qui permettra de sortir des crises actuelles et mettre la Tunisie sur la route d'une croissance durable et juste. Ces idées peuvent être renforcées dans le cadre d'un débat ouvert et pluriel pour la définition d'une nouvelle vision économique.