Il a fallu ce 25 juillet pour que justice soit rendue. L'ONG Asswat Nissa, qui a apporté un grand soutien à la victime, a qualifié cette condamnation «d'historique» après deux années de lutte et de militantisme. Il a fallu ce 25 juillet pour que la justice soit garante de la démocratie en Tunisie. Il a fallu prendre le taureau par les cornes et décréter des mesures d'exception qui se sont traduites par le gel des activités de l'ARP et la levée d'immunité des parlementaires pour que certains députés impliqués dans diverses affaires puissent rendre des comptes devant la justice, dont Zouheïr Makhlouf qui vient d'écoper d'un an de prison ferme pour harcèlement et atteinte à la pudeur par le Tribunal de première instance de Nabeul. L'affaire remonte à 2019. Une lycéenne dépose une plainte contre le député suspendu Zouheïr Makhlouf mais cette action bute contre un obstacle incontournable, celui de l'immunité parlementaire dont jouissait le député qui a pourtant été pris en flagrant délit d'acte de harcèlement aux abords de l'établissement scolaire. Les photos prises par la victime en guise de preuve n'ont servi à rien. L'immunité parlementaire a eu raison des accusations de la jeune victime. Le mouvement Ena zada dénonçant le silence dans lequel s'emmurent les femmes victimes de harcèlement a été lancé en 2019 suite à cette affaire. Mais le silence complice de l'ARP autour de cette affaire avait constitué un soutien au bourreau qui, comble de l'ironie, n'a pas hésité à envoyer une mise en garde par le biais d'un huissier-notaire à l'association Asswat Nissa pour l'empêcher de tenir une conférence de presse autour de cette affaire sous prétexte d'interférence dans la justice. Il a fallu donc ce 25 juillet pour que justice soit rendue. L'ONG Asswat Nissa, qui a apporté un grand soutien à la victime, a qualifié cette condamnation d'historique après deux années de lutte et de militantisme. Cette condamnation constitue un triomphe pour le mouvement féministe en Tunisie et pour toutes les femmes victimes de violence basée sur le genre. Elle met ainsi un terme à la culture d'impunité, souligne Asswat Nissa. Tout en exprimant sa satisfaction de cette décision judiciaire, l'ONG en question a renouvelé son soutien absolu et inconditionnel à toutes les femmes victimes de violence et demande l'accélération du règlement d'autres affaires liées aux différentes formes de violence basées sur le genre par l'application effective de la loi n°58. L'immunité parlementaire a longtemps constitué une échappatoire pour certains députés véreux. Les mesures d'exception prises le 25 juillet par le locataire de Carthage ont sifflé la fin de la récréation. L'avocat et député suspendu Saifeddine Makhlouf, qui se croyait intouchable en raison du soutien indéfectible du président de l'ARP, comme en témoigne l'impunité dont il avait bénéficié après l'affaire de l'aéroport de Tunis-Carthage survenue le 15 mars dernier, a été épinglé à son tour par la justice militaire. Idem pour le député suspendu Mohamed Salah Ltifi qui vient d'être mis en détention pour suspicion de contrebande de déchets de cuivre. Faycel Tebbini a été lui aussi condamné à huit mois de prison avec sursis suite à une plainte déposée par un magistrat pour diffusion de fausses nouvelles, attaques diffamatoires sur les réseaux sociaux et appel à la désobéissance civile. D'autres députés ne bénéficiant plus d'immunité sont dans le collimateur de la Justice dont Abdellatif Aloui et Rached Khiari qui fait l'objet d'un mandat d'amener. Désormais, nul n'est au-dessus de la loi.