Avec la fameuse initiative législative présentée par le député Mehdi Ben Gharbia sur l'égalité successorale et la polémique qu'elle a suscitée auprès des conservateurs et des militants féministes, la question de la place de la femme tunisienne au sein de la société, le rôle qu'elle est censée jouer dans l'édification de la Tunisie de demain sont revenus avec force au-devant de la scène politique nationale. Et il ne se passe plus désormais une semaine sans que l'une des anciennes pionnières du militantisme féminin sous les ères Bourguiba et Ben Ali ne sorte de son silence pour nous rappeler que le combat continue et que les acquis réalisés au profit de la femme et de la famille sont en danger, qu'on essaye de les récupérer à des desseins politiques déclarés et que, comble du malheur, il existe des femmes haut placées dans la sphère politique et civile qui acceptent qu'on révise à la baisse ces mêmes acquis, tout simplement parce que certains de ces mêmes acquis sont en contradiction avec ce qu'elles appellent «les fondements de notre identité arabo-islamique» et sont aussi contraires à certains articles de la Constitution tunisienne. Et comme la mode d'aujourd'hui est de savoir ce qui va avec la législation islamique et est susceptible d'être préservé et renforcé et ce qui est en contradiction avec cette même législation et devrait par conséquent être rejeté ou au moins expliqué à ceux et à celles qui ne le savent pas, voilà que les nouvelles associations féminines nées après la révolution se sont lancées dans une course effrénée d'organisation de «colloques scientifiques, journées d'études et ateliers de travail» pour nous dire comment légiférer en tenant compte de l'esprit de la Constitution. C'est le cas de l'association Tounissiet et de la Ligue tunisienne pour la culture et la pluralité qui organisent, samedi 28 mai, une conférence scientifique sur le thème : «L'avant-gardisme de la femme à la lumière de la législation islamique et des changements culturels et sociaux». Dans le document introductif de la conférence, on lit notamment : «Il est temps de poser la question de l'avant-gardisme de la femme dans les différents domaines de la vie, l'objectif étant de parvenir à une réconciliation intellectuelle fondée sur notre dimension islamique et civilisationnelle en allant de pair avec les lois qui garantissent à la femme ses droits humains, la libèrent des injustices sous lesquelles elle croule, l'écartent des tiraillements politiques et lui permettent d'occuper la place qu'elle mérite au sein de la société». Et pour comprendre sur quelle base ces nouvelles lois devraient se fonder, les deux associations organisatrices de la conférence ont sollicité le concours d'un certain nombre de professeurs universitaires qui parleront de trois grands thèmes : «La femme entre le texte et la pluralité des lectures», «L'avant-gardisme féminin : le débat sur la conception et le contexte» et enfin «La femme dans les législations juridiques : réalité et perspectives». Ainsi, les participants écouteront le Dr Afif Sbabti, vice-président de l'université zeïtounienne, traiter de «la place de la femme à la lumière de la sunna», Mohamed Goumani, l'ancien président du parti Al Islah et le développement aujourd'hui autodissous, parler de «l'égalité entre les hommes et les femmes : la légitimité de la revendication et l'erreur du traitement». Aïda Ben Kraïem, économiste et sociologue, focalisera sur «l'égalité et l'interprétation significative de certaines dispositions contenues dans le Coran», alors que l'avocat Mohamed Ridha Al Ajhouri, qu'on a perdu de vue ces dernières années, parlera «du droit à l'égalité successorale et le droit à la liberté de croyance: une approche démocratique de la problématique».