«Echanges», une exposition de clôture de la saison regroupant les dernières œuvres des peintres Ali Zneïdi, Zine Harbaoui et du sculpteur Mohamed Bouaziz actuellement à la galerie Alexandre Roubtzoff à La Marsa. Durant le mois ramadanesque, la galerie Alexandre Roubtzoff nous a proposé l'exposition de clôture de la saison, une saison qui s'achève en beauté avec cette exposition collective où des artistes tunisiens se rencontrent dans la passion et la différence. Il s'agit des artistes plasticiens : Ali Zneïdi, Zine Harbaoui et Mohamed Bouaziz. Une belle exposition où chaque œuvre est un hymne à la vie, dans la délicatesse du geste, le rompu d'un ton ou dans l'ardeur chromatique. Des artistes, toutes obédiences picturales confondues, nous offrent, à travers leurs œuvres, une balade évanescente et une aventure humaine puissante et subtile. Ali Zneidi, un grand nom de la peinture en Tunisie. Il a été diplômé de l'Institut supérieur des Beaux-arts de Tunis et expose en Tunisie et à l'étranger depuis l'année 1975. Le musée Palais Kheireddine de la ville de Tunis lui a organisé une rétrospective en avril 2015 intitulée «Mémoire réinventée» avec l'édition d'un livre de 127 pages, retraçant son itinéraire artistique de 1975 à 2015. Le livre comprenait des reproductions de ses œuvres : collages, dessins, lavis, techniques mixtes et peintures, accompagnées de textes. Le geste est présent au premier regard, il exprime l'architecture ainsi que les personnages liés aux lieux. Très Influencé par son enfance à Bab Djazira, il nous présente des scènes de la Médina de Tunis.On est tout de suite embarqué dans un voyage dans le temps, où l'artiste nous fait partager ses souvenirs des lieux et son vécu heureux et chaleureux à «El Hajjamine», «Quartier Sidi Mansour», «El Marr», «Hammam Khachachine», ainsi que les portraits au féminin, et les scènes familiales à la plage, etc. En ayant comme supports la peinture avec des techniques mixtes, essentiellement le collage, il nous peint un univers artistique coloré, ludique, et urbain. Il peint des fragments de son passé et du nôtre. Ces scènes de vie nous racontent des histoires, des émotions ou des instants fugaces. Ainsi, l'artiste cherche à nous faire percevoir son monde au travers de ces tableaux qui sont comme autant de prismes d'une humanité riche en sens ! Les personnages sont le plus souvent emblématiques d'une idée, d'une impression. Ils sont représentés simplement, dans des poses de tous les jours, de simples personnages avec lesquels le temps semble s'être arrêté. Les couleurs sont vives et la lumière, par ses jeux de miroitement, donne du relief. S'attachant tout autant aux décors qu'aux personnages et en regardant ses toiles, on se surprend à s'interroger sur ces personnages, sur ce qui peut être ou aurait pu être leur vie, leurs espoirs, leurs pensées. Parmi les exposants, on retrouve, également, le peintre autodidacte Zine Harbaoui. Il expose depuis 1979, il est surnommé «Le voleur de lumière». Il nous présente des huiles sur toile impressionnistes présentant des scènes de vie. Il cherche à travers des jeux de lumière, des associations de couleurs, des compositions de formes, à représenter et à susciter des aspirations à l'ailleurs et à l'horizon. Ses toiles nous font voyager dans des lieux connus dont on se souvient ou dans des contrées inconnues dont on rêve. Dans ses paysages colorés, jaillit la lumière, et on distingue le contour vaporeux de maisons lumineuses, des passants dans la rue, ou autres représentations à la limite du figuratif et de l'abstrait. Sa peinture se regarde comme un film. Un film à plusieurs entrées et différents parcours. Au départ, on voit l'ensemble. Cela paraît de la peinture abstraite, masses, couleurs, traits. Puis il suffit que l'on reste quelques secondes à regarder, pour que l'œil soit attiré par un élément plus important que l'on peut reconnaître, comme une maison, une mosquée dans un quartier de la Médina, un café, un souk, etc. Ce n'est plus abstrait. Partant de cet élément, on va instinctivement construire un parcours ; induit par la peinture, fabriqué par son propre imaginaire. Mais les «entrées», éléments qui attirent l'œil, étant multiples, les parcours le sont également. Alors c'est votre regard, qui, au gré des lumières et de vos humeurs, va raconter le film de l'instant. Côté sculpture, Mohamed Bouaziz (né en 1981 à Sfax), artiste diplômé de l'Institut supérieur des Beaux-arts de Tunis, en spécialité sculpture sur marbre et qui expose depuis 2009, nous présente dans cette exposition des sculptures en marbre de couleurs différentes inspirées de la calligraphie. Il a déjà organisé plusieurs expositions, citons : une exposition personnelle de sculpture sur marbre à l'Espace El Teatro en 2013, une exposition de groupe à l'occasion du troisième anniversaire de la révolution (Salle du Journal) en janvier 2014, une exposition de groupe au palais Kheireddine et Palais El Ebdelya, le Symposium international sur pierre, Marbrière, Chypre (AYA Napa) en 2015. Il a également participé, sur invitation de l'Egypte en 2014, à la restauration de grandes sculptures atteignant les 6 mètres. Une multitude de formes solides, donc, puissantes malgré la délicatesse des sujets auxquels elles se réfèrent puisées dans une roche solide et dure, sont posées, en équilibre, entre force et grâce. Mohamed Bouaziz taille le marbre coloré, le cisèle, le forme, le dessine dans l'espace comme on trace les lignes d'une lettre alphabétique, résultat : des formes improbables laissant le spectateur perplexe. Quant à l'espacement entre les contours d'un objet, tel que «Danse», «Joie», «Femme», «Les amoureux» et «Calligraphie», il procède d'une alternance étudiée entre les vides et les pleins qui en font la lisibilité de l'œuvre dans l'espace en tant que matière véhiculant un message riche en sens. Une lumière semblant émaner de chacune des œuvres exposées, elle communique au visiteur une chaleur vivifiante venant des sujets travaillés avec beaucoup de tendresse et de talent. En contemplant les œuvres de cette exposition dans cet éloge de l'amitié qui a réuni ces artistes-plasticiens de talent, notre cœur palpite face à ce pluriel d'émotions qu'on nous propose de partager.