Pour le dirigeant «sang et or», tant que les statuts des clubs et les mentalités sont au stade amateur, les spécialistes du sport, dans les différents domaines, ne peuvent pas en faire leur métier. «Les métiers du sport : voilà un sujet vaste, mais intéressant. Concernant ma spécialité et mon domaine d'action dans le secteur sportif, je peux vous dire d'emblée qu'il n'y pas de juristes spécialisés dans le sport en Tunisie. Pour qu'il n'y ait pas confusion, la notion de lois des sports, cela n'existe pas. Car intervenir auprès de la TAS, du Cnas où même de la Fifa à titre d'exemple, ce ne sont que des procédures purement techniques que tout avocat et juriste est censé faire sans aucune ambiguïté. En fait, il n'y a pas de droit du sport. Je parlerais plutôt du droit dans le sport qui brasse toutes les autres spécialités, telles que le droit du travail et le droit pénal. C'est un domaine d'intervention vaste. Sauf qu'en Tunisie, ils ne sont que deux avocats qui ont fait des litiges sportifs leur gagne-pain. A l'étranger, ce sont des cabinets spécialisés, et en tant que président de la commission juridique de l'Espérance de Tunis, j'ai eu l'occasion d'avoir affaire à eux. Ce sont des cabinets redoutables, composés en moyenne de 5 à 6 avocats au moins et qui ne font que cela : régler les litiges sportifs. Chez nous, on est encore au stade du bénévolat. Ce qui empêche les métiers du sport de fleurir. Je pense que nous vivons la fin de l'époque du bénévolat. Je l'avance avec réserve, car les mentalités peinent à changer. Toutefois, les clubs ne peuvent plus et ne doivent plus être gérés d'une manière amateur, bien qu'à l'Espérance, nous faisons un peu l'exception avec une administration dotée entre autres d'un secrétaire général permanent. Malgré tout cela, je pense qu'il est venu le temps de passer professionnel à 100 %. Le problème, c'est que nous continuons à gérer le football avec l'esprit de supporter. Du coup, on fait appel au juriste et au financier qui portent les mêmes couleurs du club. On ne pense pas aller consulter un juriste ou un cabinet d'avocats spécialisés dans un type d'affaires quand on a un litige délicat à régler. Quand on a un litige financier avec un joueur, au lieu d'aller voir un cabinet spécialisé dans le droit financier, on préfère consulter le juriste qui supporte les mêmes couleurs du club. J'estime qu'il est temps de se mettre au diapason du football professionnel et apprendre à le gérer avec une mentalité de professionnel. Je le dis alors que je suis à la tête d'une commission juridique d'un grand club, l'Espérance de Tunis, composée de 4 avocats, 3 enseignants universitaires et un juriste entreprise. Lorsque nous avons créé cette commission en 2008, nous avons pensé à avoir un groupe hétérogène avec des gens chevronnés, d'autres ayant une expérience moyenne et des jeunes pour prendre la relève. Malgré la bonne organisation de notre club qui fait pratiquement exception, je pense qu'en général, le bénévolat est un obstacle pour que les métiers du sport prennent l'envergure qu'ils méritent, à l'instar de ce qui se passe dans le monde du football professionnel».