Avec plus de 16 millions de visiteurs cumulés entre le Maroc et la Tunisie durant les sept premiers mois de 2025, le tourisme semble retrouver son souffle au Maghreb. Pourtant, derrière ces chiffres se cache un malaise structurel : un modèle basé sur le volume, devenu inefficace pour assurer une croissance durable, équilibrée et bénéfique aux populations locales. Les signes de saturation, les plaintes des professionnels et la montée d'une concurrence régionale imposent une remise en question urgente. Les chiffres sont flatteurs, les bilans provisoires optimistes. Avec plus de 11,6 millions de visiteurs au Maroc et 5 millions en Tunisie entre janvier et juillet 2025, le tourisme maghrébin affiche un dynamisme apparent. Mais derrière ces hausses, une réalité plus nuancée s'impose : celle d'un modèle touristique à bout de souffle, où la quantité ne garantit plus ni qualité ni retombées locales significatives. Une belle façade qui cache un malaise profond Selon le média français Be Magazine, au Maroc, le début d'année a été marqué par un véritable engouement, avec une progression de 27 % des arrivées entre janvier et avril. Pourtant, la dynamique s'est brusquement ralentie dès l'entrée dans la haute saison estivale. En juillet, la croissance est tombée à +6 %, et Marrakech, pourtant l'un des piliers du tourisme marocain, a vu ses arrivées chuter de 3 %. Dans les hôtels 3 et 4 étoiles, les baisses de fréquentation atteignent jusqu'à 30 % en juin. En cause ? Des prix jugés excessifs, notamment par les Marocains résidant à l'étranger (MRE), traditionnellement fidèles à leur pays d'origine durant l'été. Ces derniers dénoncent une flambée des tarifs d'hébergement, en décalage avec leur pouvoir d'achat. Les promotions lancées en urgence par les professionnels n'ont pas suffi à inverser la tendance. La Tunisie affiche, elle aussi, des résultats encourageants à première vue : 5 millions de visiteurs et près de 900 millions d'euros de recettes touristiques au 31 juillet. Mais là encore, les indicateurs économiques peinent à convaincre. Les commerçants des médinas et des plages constatent une clientèle plus volatile, souvent issue de croisières ou d'excursions ponctuelles, qui consomme peu et ne reste pas. Les régions de l'intérieur, éloignées du littoral, sont quasiment exclues des bénéfices touristiques. Pendant ce temps, les transferts de la diaspora tunisienne atteignent 1,3 milliard d'euros, soit bien plus que les recettes issues des touristes internationaux, soulignant une dépendance croissante à cette manne extérieure. Un modèle à repenser pour l'ensemble du Maghreb Au-delà des cas marocain et tunisien, c'est tout le Maghreb qui est confronté à une impasse touristique. Le tourisme de masse, centré sur le littoral, montre ses limites : hausse des prix, pression sur les infrastructures, expérience client décevante, et faibles retombées locales. À cela s'ajoute une concurrence régionale de plus en plus féroce, notamment de la part de la Turquie ou de l'Egypte, qui ajustent plus rapidement leur offre à la demande. Pour beaucoup de professionnels, l'avenir du tourisme maghrébin ne peut plus reposer sur des chiffres d'arrivées. Il s'agit désormais de miser sur la qualité de l'expérience, la diversification des territoires, le tourisme durable et l'intégration économique des populations locales. Ceci pour dire qu'aujourd'hui, le Maghreb n'est plus à une époque où "plus" signifie "mieux". Il est temps de repenser une offre où chaque visiteur compte, non pour sa simple présence, mais pour son impact réel et positif sur les économies et les sociétés du Maroc, de la Tunisie et de la région tout entière.