Les femmes en situation de handicap sont confrontées à plusieurs obstacles qui réduisent leur participation au dépistage précoce du cancer du sein, en dépit des vastes campagnes de sensibilisation ciblées, organisées dans le cadre de la manifestation « Octobre Rose », et des efforts déployés en Tunisie pour la lutte contre le cancer. Ces difficultés sont dues essentiellement à l'absence de moyens de communication adaptées avec les personnes handicapées et aux difficultés logistiques liées à l'infrastructure des établissements hospitaliers. Des spécialistes et membres de la société civile dans le domaine du handicap ont souligné que les femmes en situation de handicap peuvent avoir une connaissance limitée de la culture sanitaire, en raison de la stigmatisation sociale et d'un accès restreint aux services de santé. « Ces femmes n'ont pas accès à l'information en matière de soins et les campagnes de sensibilisation sont occasionnelles ou liées à des évènements spécifiques », ont-ils relevé. « La Tunisie a ratifié plusieurs conventions internationales sur les droits des personnes handicapées, qui garantissent aux personnes en situation de handicap l'accès aux soins de santé sans aucune discrimination, néanmoins la participation des femmes aux programmes de dépistage précoce du cancer reste encore faible, ont-ils ajouté. Dans le même ordre d'idées, le président de l'association tunisienne de défense des droits des handicapées Yousri Mazzati a souligné dans une déclaration à la TAP que les femmes porteuses de handicap n'ont pas toujours accès à l'information sanitaire, notamment en matière de dépistage précoce des cancers féminins. Il a indiqué que la plupart des femmes atteintes de handicaps visuels, auditifs ou moteurs sont confrontées à plusieurs obstacles pour le dépistage précoce des maladies cancéreuses, tels que l'insuffisance des supports d'information, le manque de sensibilisation familiale, mise à part les facteurs socio-économiques. Mezzati a appelé à la nécessité de sensibiliser à l'importance du dépistage précoce des maladies cancéreuses chez les personnes handicapées et leurs familles à travers les supports médiatiques, relevant l'importance d'allouer une plus grande part du budget de la santé aux handicapés et d'organiser des campagnes de sensibilisation de manière permanente et non circonstancielle. Absence de moyens de communication entre les professionnels de santé et les personnes handicapées De son côté, Le président de l'association tunisienne « Ibssar pour la culture et les loisirs des personnes malvoyantes », Mohamed Mansouri, a souligné à l'agence TAP l'absence de communication efficace entre les professionnels de la santé et les personnes handicapées en raison du manque de moyens de communication adaptés. Mansouri a expliqué qu'il est nécessaire de former les professionnels de santé aux méthodes de communication avec les personnes handicapées, en leur enseignant la langue des signes et en adoptant le braille pour rédiger les ordonnances médicales, afin que chacun puisse comprendre les informations sanitaires de manière autonome et dans le respect de sa dignité. Il a ajouté qu'un simple effort de la part du personnel médical et paramédical contribuerait à faciliter la communication avec les personnes handicapées, leur éviterait la confusion et l'ambiguïté concernant les prescriptions thérapeutiques et les instructions médicales, et leur permettrait de communiquer directement avec le médecin sans avoir besoin d'un accompagnateur pour interpréter l'information. Permettre aux personnes handicapées d'acquérir les compétences d'auto-dépistage : un pilier de la prévention La professeure en gynécologie et obstétrique et chef de service au Centre d'obstétrique et de néonatologie de Tunis, Dalenda Chelli, a souligné que le mois rose d'octobre est un événement qui concerne toutes les femmes, quelles que soient leurs particularités, affirmant qu'il n'est pas possible d'exclure les femmes handicapées des campagnes de dépistage précoce du cancer du sein. Chelli a expliqué que l'autopalpation des seins est un moyen efficace qui peut être inculquée aux femmes souffrant d'un handicap auditif, visuel ou moteur, même si sa mise en pratique peut s'avérer difficile dans certains cas. Elle a ajouté qu'il est important de sensibiliser les femmes handicapées aux premiers signes pouvant indiquer la présence d'une tumeur maligne, tels qu'un changement de taille des seins, un écoulement du mamelon ou l'apparition d'une masse dans le sein, les appelant à se rendre immédiatement à l'hôpital le plus proche ou chez un gynécologue-obstétricien dès l'apparition de l'un de ces signes. Elle a indiqué avoir constaté une prise de conscience croissante chez les femmes handicapées en matière d'autopalpation, à la suite d'une manifestation organisée l'année dernière au centre et consacrée au dépistage précoce du cancer du sein à l'intention des femmes handicapées et de leurs familles. La gynécologue a souligné que les femmes handicapées motrices rencontrent de grandes difficultés pour accéder aux hôpitaux publics, en raison de l'absence d'infrastructures adaptées et du manque d'équipements leur assurant un meilleur confort, ce qui pousse nombre d'entre elles à renoncer à se faire dépister malgré les campagnes de sensibilisation menées pendant le mois d'octobre rose.