Des spécialistes en psychologie ont souligné ce matin, vendredi, que la souffrance psychologique des jeunes découle des systèmes familial, économique et politique fragiles dans lesquels ils vivent. Ces déclarations ont été faites lors d'un colloque scientifique international qui s'est tenu à la Bibliothèque Nationale à Tunis, sous le thème : « La vulnérabilité de la catégorie des jeunes ». Durant ce colloque de deux jours, organisé à l'initiative du département et laboratoire de psychologie de la Faculté des Sciences Humaines et Sociales du 9 avril, en partenariat avec l'Association Tunisienne de Psychologie, les spécialistes ont considéré que la faiblesse du système éducatif (qui a aggravé l'échec scolaire, l'abandon et la baisse des résultats) ; la fragilité des systèmes économiques (qui engendrent le chômage et un faible pouvoir d'achat) et l'affaiblissement du système familial (causé par un manque de communication et d'encadrement) sont autant de facteurs destructeurs pour la jeunesse. Samia Ben Youssef, professeure assistante en psychologie du travail et de l'orientation professionnelle, a expliqué dans ce contexte que les systèmes familiaux en Tunisie et dans d'autres sociétés souffrent désormais de vulnérabilité due à l'utilisation excessive des nouvelles technologies. Celles-ci ont imposé à leurs membres de vivre dans l'isolement, avec un recul marqué de la communication, de l'expression et du partage des préoccupations mutuelles. Elle a souligné que cette situation rend le jeune dépourvu d'encadrement psychologique et social et le pousse à considérer que la réussite se limite aux aspects matériels et aux apparences spectaculaires, tels que promus par les réseaux sociaux. Elle a ajouté que l'incapacité à imiter ces modèles provoque chez le jeune une frustration qui installe une vulnérabilité psychologique, le menant vers des comportements à risque. De son côté, Ahmed Khouajine, professeur d'enseignement supérieur en sociologie, a précisé que le mot « vulnérabilité » (ou « fragilité ») est d'origine latine et signifie en médecine « une blessure dans le corps et une blessure dans l'âme ». Selon son approche, cela traduit parfaitement ce que vit la jeunesse actuelle. Cette situation pousse les jeunes à développer des stratégies d'adaptation pour faire face à cette vulnérabilité, à l'incertitude et à la marginalisation. Ces solutions peuvent être parfois destructrices (toxicomanie, suicide, migration irrégulière, ou criminalité), ou parfois positives (persévérance dans les études, engagement dans des initiatives économiques privées, etc.). Quant à Salah Eddine Ben Fadhel, professeur de psychologie, il a insisté sur le fait que la réforme de la situation de la jeunesse commence par l'élaboration de politiques nationales qui tiennent compte de leur vision de l'avenir et de leur état psychologique. Il est également essentiel de les impliquer avant d'élaborer ces politiques et de prendre en considération leurs propositions concernant la réforme des systèmes économique, politique et éducatif. Il a enfin souligné la nécessité de réaliser un diagnostic précis de la situation actuelle de la jeunesse, basé sur des études et des recherches scientifiques rigoureuses. Ce n'est qu'à partir de là que pourront être élaborées des politiques et des stratégies nationales efficaces qui répondent aux besoins fondamentaux et réels de cette catégorie de la population.