Soleil, ciel, mer, sol, cœur. L'incommensurable ellipse des éléments plante le décor de la demeure intime. Ne nous y trompons pas. Quelles que soient les sinuosités de l'aventure, tous les chemins des mots mènent au cœur du poète. Et ce poète, c'est Walid Amri. Autant vous prévenir d'emblée, c'est un récidiviste. Après Poèmes en liberté (éd. L'Harmattan, Paris 1982) et Subalterne (L'Harmattan, Paris 2006), le voilà qui rapplique avec Sol (chez le même éditeur). Un écorché vif, comme le sont tous les vrais poètes. Bien évidemment, dirait-on. C'est compter sans l'impénitence latente de ce braqueur des sens. Il n'a de cesse de fourbir ses mots, aiguiser ses états d'âme, surprendre par les chemins de traverse spirituels. A 32 ans, Walid Amri semble avoir la manie des carrefours. Il vit à Dubaï, sans pour autant échapper aux emprises de Tunis et Beyrouth. Lorsqu'on a goûté aux saveurs de ces sols-là, on n'en revient guère indemne. L'amour des racines frise l'obsession, le souvenir devient hantise. Et c'est par la porte de la hantise que s'insinue la muse. Les Arabes ont cadré juste en la qualifiant de Satan des poètes (chaytan échouaraa). Et Satan-la-muse ne tarit précisément pas d'astuces. En vérité, Walid Amri est un virtuose des mots. Il investit les espaces polysémiques de ces carrefours de sens. Ses poèmes valent le détour. Et pour cause. Un petit extrait: Palestine De mer et d'amertume, L'oiseau est cardé, Son vol dessine L'air Et son approche innombrable Quand tapisse la nuit Et son cheptel D'astres étrangers L'oiseau, Etonnamment intégral, Terre et mer Sont pour lui de même interrogation…