Par Abdelhamid Gmati Six jeunes femmes (de 21 à 23 ans), formant une cellule takfiriste, ont été arrêtées, mardi dernier. Elles étaient actives à la Cité Ettadhamen et sont accusées de « présomption d'appartenance à un groupe terroriste ». Si l'information n'a pas eu d'écho particulier, c'est parce que le démantèlement de cellules de terroristes ou présumés comme tels, dans toutes les régions du pays, est devenu pratiquement quotidien. Le ministre de l'Intérieur a indiqué, dernièrement, que « les forces de lutte contre le terrorisme ont réussi à démanteler 33 cellules terroristes, déféré devant la justice 1.400 suspects et réussi à empêcher 1.800 citoyens de partir à l'étranger, pour avoir suspecté leur intention de rejoindre les groupes terroristes ». Et, jeudi dernier, les autorités libyennes ont remis à leurs homologues tunisiennes deux dangereux terroristes. Ils ont été arrêtés alors qu'ils essayaient de passer illégalement les frontières tunisiennes pour rejoindre les groupes armés retranchés dans les montagnes, notamment celui de Jond al Khilafa à Mdhilla (Gafsa). Au vu de l'absence de réaction particulière, tant du côté de la classe politique que de l'opinion publique, on a l'impression que ce phénomène est « banalisé », comme s'il ne s'agissait que de « faits divers ». Et pourtant, ce qui se passe est grave. On en a encore subi les conséquences meurtrières, dernièrement, à Kebili et on recense, régulièrement, les victimes de mines disséminées dans les montagnes. Plus on découvre et démantèle des cellules terroristes, plus on en découvre de nouvelles. Et une question s'impose : qui est derrière « la constitution de ces cellules » ? On sait bien qu'il y a des organisations, des personnes, qui embrigadent, forment, recrutent, et organisent ces formations. Il y en a qui envoient ces recrues au jihad à l'étranger. Le ministre de l'Intérieur a parlé de l'arrestation récente de 140 personnes qui organisent ces départs. Et d'où vient l'argent qui est et reste « le nerf de la guerre » ? Il est plus que temps de s'attaquer à ce problème et d'en tarir les sources. On a annoncé, le 28 février dernier, la composition de la commission d'enquête parlementaire sur les réseaux d'enrôlement vers les zones de combats. Cela répond à cette urgence. Mais les observateurs restent sceptiques. D'abord, parce qu'on craint que cette commission ne ressemble à plusieurs autres et ne livre pas ses conclusions. Pour eux, ce n'est que de la poudre aux yeux. Ils auraient préféré que cette commission incombe à la justice, aux magistrats. Ensuite, la composition de cette commission qui compte, en majorité, des députés d'Ennahdha et de Nida Tounès, n'est pas une garantie de neutralité ni d'efficacité. La députée Leïla Chattaoui, présidente de ladite commission d'enquête, a affirmé que «tous ceux dont la compromission sera établie paieront devant la justice quels que soient leur poids et leur positionnement sur la scène politique». Soit. Mais, jeudi dernier, alors que ses activités au sein de son parti, Nida Tounès, et de son bloc parlementaire, venaient d'être gelées, elle révélait avoir reçu des menaces de la part de certains membres de son parti l'appelant à quitter la commission d'enquête parlementaire. «Certains à Nida Tounès ne veulent pas que des informations détenues par la commission soient divulguées car le sujet est très sensible et en lien avec des pays étrangers». Et, il y a quelques jours, un dirigeant du Mouvement Ennahdha s'est offusqué et veut laver son mouvement de tout soupçon. Pour lui, les accusations portées contre le Mouvement Ennahdha de faciliter le voyage vers les zones de tension sont « honteuses ». Officiellement, aucune accusation n'a été portée contre quiconque dans cette affaire. Certes, certains ont rappelé des faits, comme les appels au jihad en Syrie, prononcés par des dirigeants nahdhaouis (Chourou, Khadmi ou Ellouze), ou la réception de cheikhs salafistes à Carthage, mais aucune dénonciation ni accusation. Et alors que cette commission d'enquête n'a pas encore commencé son travail, on se demande pourquoi certaines langues poussent, déjà, des cris d'orfraie et semblent aux abois. Cherche-t-on à se disculper avant d'être inculpé ?