«El Bayata» (Le dortoir), un spectacle de danse-théâtre du danseur et chorégraphe Marwen Errouine présenté dans le cadre de la 16e édition du festival Tunis Capitale de la danse à la salle Le Quatrième Art à Tunis. Comme chaque année, le festival Tunis Capitale de la danse était l'occasion de découvrir les toutes nouvelles créations de nos artistes tunisiens et d'admirer leur créativité et leur sensibilité en matière de danse contemporaine. Parmi les spectacles hors compétition et qui figuraient au programme de la 16e édition du festival, nous avons pu voir la dernière création de Marwen Errouine, jeune chorégraphe et interprète. Il fait partie des interprètes de «Fausse couche» de Nejib Khalfallah qui a reçu le premier prix de la chorégraphie lors de cette édition de Tunis Capitale de la danse. Il a fait ses débuts avec la compagnie Sybel Ballet Théâtre de Syhem Belkhodja. Il continuait sa formation avec Imed Jemaa qui le prenait sous son aile et avec qui il travaillait au Mad'Art Carthage, au Théâtre national, au Mondial et à El Teatro. Au théâtre, il a collaboré avec la regrettée Raja Ben Ammar en 2012. Puis et depuis 2015, c'est avec Taoufik Jebali que Marwen travaillait. C'est lui qui a imaginé la chorégraphie de la pièce «Le Fou» de Khalil Gibran, mise en scène par Taoufik Jebali, et présentée dans le cadre des Journées Théâtrales de Carthage 2016. Dans sa dernière création de danse-théâtre «El bayata» (Le dortoir), le corps est le pivot d'une thématique qui reste omniprésente dans chacune de ses créations, à savoir : le féminisme. Le spectacle pousse également plus loin les problématiques de l'indifférence, des inégalités et de la stigmatisation. Marwen Errouine a choisi de rassembler ses personnages au sein d'un immense dortoir défraîchi, unique lieu d'existence où solitudes, quêtes d'amour, de désir, d'identité, de bonheur se croisent, s'entremêlent, se confondent. Mariem Bouajaja, Kais Boulares, Synda Jebali, Amel Laaouini et Malek Zouaidi interprètent respectivement une droguée, un gardien, une maniaque, une célibataire et une femme de couleur vivent une sorte de rêve éveillé collégial dans ce dortoir où l'on subit la réclusion et le déchirement. Cependant, ils sont abrités par ce lieu, cette figure complexe du foyer, cet espace communautaire et qui est, par la force des choses, rassurant. Les corps entretiennent des rapports variés au temps, à l'espace et aux événements. La musique enveloppe le spectacle lui conférant une touche tantôt dramatique, tantôt poétique. Les danseurs sont proches ou éloignés, les regards sont distants ou enveloppés, la gestuelle froide ou plus chaude et caressante. On s'ignore ou on se palpe. On se touche ou on se déchire. À travers leurs peurs et leurs différences, le metteur en scène essaye de briser le silence et de donner la parole à ces êtres fragiles et ces marginaux, rejetés par la société. Les aliénations, dépendances ou libertés s'expriment au travers de mouvements tour à tour légers et lourds, solitaires et solidaires, gracieux et convulsifs. Un travail abouti accueillant tout à la fois, la belle performance et la profondeur des danseurs et l'engagement et la subtilité du chorégraphe !