L'Espérance sait-elle gérer un match où elle peut se contenter d'un nul ? Les vertus collectives se conjuguent à une solidité mentale à toute épreuve. Dans un même élan, tout le monde à l'EST s'accorde à dire que le club de Bab Souika ne jouera pas pour le nul, que seule la victoire l'intéresse, que si vraiment on veut abandonner le sceptre du championnat à l'Etoile, eh bien on n'a qu'à jouer pour le partage des points. Ce genre de bêtises ne ressemble en tout cas pas à Faouzi Benzarti, le technicien le plus expérimenté du circuit. Pourtant, qu'on le veuille ou pas, cette équation pèsera dans la gestion de cette finale du championnat. Les copains de Khelil Chammam savent que, sur la fin du match, rien ne sert de prendre des risques inconsidérés si vraiment aucune des deux équipes n'a l'avantage. Le point d'avance qu'ils comptent au classement, ils ne peuvent pas ne pas y penser de temps en temps. Mais de là à croire qu'ils vont établir leur stratégie en fonction de cet avantage, c'est mal connaître le tempérament de Benzarti qui n'est certes pas homme à s'aventurer, mais il n'est pas non plus le technicien frileux qui optera pour des choix défensifs. Il connaît parfaitement l'Etoile pour l'avoir coachée la saison précédente, et mesure ses énormes ressources offensives. Sans se barricader ou jouer le béton, le staff technique «sang et or» ne va toutefois pas se priver des avantages que lui procure le classement actuel. La grande inconnue est de savoir qui de Coulibaly ou Beguir sera aligné d'entrée au milieu. Le pivot ivoirien dégage actuellement une telle impression de santé et de force qu'il peut constituer raisonnablement la réponse espérantiste au circuit d'où partent toutes les offensives étoilées, à savoir la plaque tournante composée du tandem international Ben Amor-Lahmar. Pour enrayer l'action de ces récupérateurs-relanceurs-constructeurs très forts aussi bien au registre défensif qu'offensif, Benzarti a besoin de tisser une toile d'araignée capable de les «couper» de leurs avants, Acosta (ou Bouazza), Bangoura et même Msakni. La présence de Coulibaly à côté de Sassi et Chaâlali donnera davantage de poids à un milieu qui a besoin de ratisser beaucoup de ballons, de gagner les duels et de laisser un impact physique. De la densité physique: justement, le classico se jouera dans une large part sur la dimension physique que l'ancien demi de l'US Monastir sait conforter par ses aptitudes à peser sur l'adversaire et à laisser traîner une semelle pour impressionner son vis-à-vis. Des coups, il sait en prendre et en donner dans la bataille de la zone médiane qui va faire rage. On voit bien donc Beguir partir du banc de touche et profiter d'un état de début de fatigue et de baisse de lucidité qui commencerait à s'emparer des joueurs adverses pour faire la différence. La menace Khenissi La victoire se construit à partir de l'arrière-garde. Et celle tunisoise est la meilleure de la saison. Deux buts seulement encaissés au play-off, qui dit mieux ! Benzarti va sans doute confirmer son quintette défensif qui a fait un bon bout de chemin au play-off lorsque ni Machani ni surtout Belkaroui ne purent être alignés pour blessure. Devant Ben Cherifia, les deux latéraux fort expérimentés Mbarki et Chammam auront fort à faire pour contenir un Bangoura ou un Brigui, voire un Abderrazak. Le duo axial Dhaouadi-Talbi sera confirmé malgré les craintes exprimées par certains quant à la capacité du jeune Talbi à gérer un tel événement et ses quelques fautes de jeunesse qui peuvent être payées cher. Car l'animation défensive et l'esprit de corps sont tels que d'éventuelles petites amnésies fruits de l'inexpérience du jeune Montasser peuvent être parfaitement surmontées. Khenissi a pris l'habitude de frapper à chaque nouvelle sortie contre l'ESS: en quart de finale de la Coupe de Tunisie 2016 disputé à Sousse (1-0), au match aller du play-off, encore une fois à Sousse (1-1)... Il suffit au goleador du championnat national d'une «semi-occasion» pour faire la différence. Avec Ben Youssef et Badri sur les côtés, c'est beaucoup trop de pression qui va peser sur l'arrière-garde d'Ammar Jemal. Ce sont autant de points de fixation capables à tout moment de se transformer en finisseurs. Bref, avec une telle armada, le club «sang et or» paraît parfaitement outillé pour détrôner le champion en titre et confirmer son superbe parcours cette saison qu'il a fait de bout en bout en tête. Seule équipe invaincue au PO, l'EST entend le rester jusqu'au bout devant les 24 mille supporters qui vont créer une ambiance du tonnerre au stade de Radès. Cet élément du public ne sera pas à coup sûr le moins important dans les équilibres de ce match. C'est le 12e homme qui sait parfois faire gagner des rencontres.