«Il faut que les politiques comprennent aussi que l'enjeu économique est étroitement lié à l'enjeu environnemental. On peut combattre le chômage à travers le combat environnemental», soutient la députée Ibtissem Jebabli L'expérience suédoise en matière de gouvernance locale et de protection de l'environnement constitue un exemple réel de l'engagement des différents acteurs sociaux et économiques La question de la propreté du pays est devenue une réelle problématique pour les autorités publiques tunisiennes. Depuis 2011, la détérioration des services municipaux et le retard dans la tenue des élections municipales ont fait que la question de la protection de l'environnement est restée à la traîne. Ajoutons à cela un manque de conscience et de civisme flagrant de la part de plusieurs citoyens tunisiens quant à la gravité de la situation et son impact sur la qualité de leur vie et leur bien-être au quotidien. D'où l'importance de la sensibilisation à cette responsabilité commune dans la protection de l'environnement. Etat, citoyens, société civile, entreprises, sont tous des parties prenantes de cet effort. Le rôle de ces différents acteurs a été pleinement discuté, hier, au cours du séminaire organisé par l'organisation suédoise "SKL International" en partenariat avec l'ambassade du Suède en Tunisie. Anis Oueslati, secrétaire général auprès du ministère des Affaires locales, a indiqué que la Tunisie est engagée dans un processus de transformation qui concerne la gouvernance locale et participative, accordant au citoyen un rôle important dans la propreté de la ville et dans l'engagement dans un environnement sain et dans le développement durable. «Les efforts entrepris par le ministère concernant la protection de l'environnement ne sont pas nouveaux, mais nous avons adopté une nouvelle approche de communication, en sensibilisant à la citoyenneté environnementale et à adopter une culture basée sur la participation citoyenne», affirme-t-il. Il ajoute que ce plan de communication s'est basé sur trois axes: la sensibilisation quant à l'usage des sachets en plastique, la propreté des plages et la propreté des villes, insistant sur la responsabilité partagée entre l'Etat, les citoyens, les professionnels, les acteurs économiques et les autorités locales et centrales. Engagement de l'Utica Pour Ibtissem Jebabli, députée, les actions entreprises par le ministère des Affaires locales restent insuffisantes, estimant qu'il n'existe pas de programme clair concernant l'implication du citoyen dans cet effort. "Malheureusement, la notion de citoyenneté écologique n'est pas assez développée. D'ailleurs, c'est une notion qui doit être inculquée dès l'enfance et à travers les programmes éducatifs. Il faut que les politiques comprennent aussi que l'enjeu économique est étroitement lié à l'enjeu environnemental. On peut combattre le chômage à travers le combat environnemental", souligne-t-elle. Une réflexion que partage Wided Bouchamaoui, présidente de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (Utica), indiquant que la mobilisation pour la protection de l'environnement a le mérite de permettre la création de nouveaux emplois, essentiellement dans la filière de recyclage des déchets. Elle ajoute que l'Utica est prête à s'engager étroitement, à travers sa fondation, pour des campagnes de sensibilisation dans les établissements éducatifs, appelant les autorités publiques à exercer un tapage médiatique plus poussé pour que les citoyens prennent conscience de la gravité de la situation. De son côté, Tarak Ben Habib, représentant de la Coalition tunisienne pour la justice sociale, écologique et climatique, la situation environnementale en Tunisie est préoccupante voire dramatique. Mais elle n'est pas seulement la responsabilité du citoyen. "Nous avons actuellement une chance extraordinaire. Nous allons avoir des municipalités autonomes. C'est un changement radical, parce que la question de l'environnement est une question de proximité. Nous serons en mesure de juger les actions des municipalités. Mais il faut dire que la protection de l'environnement est un effort collectif afin d'établir une vision partagée par tous", estime-t-il. Gouvernance locale Il est à noter que l'expérience suédoise en matière de gouvernance locale et de protection de l'environnement constitue un exemple réel de l'engagement des différents acteurs sociaux et économiques. Un exemple duquel les acteurs tunisiens ont pu s'inspirer à travers un projet de gouvernance locale, mis en œuvre depuis octobre 2015 par "SKL international", filiale de l'Association suédoise des autorités locales et des régions (Salar), en coopération avec la Fédération nationale des villes tunisiennes et la Direction générale des collectivités locales, relevant du ministère des Affaires locales. Ce projet qui prend fin en octobre 2017 vise à renforcer le pouvoir local tunisien et appuyer l'effort à la décentralisation. Selon Gunnar Lofgren, chef de projet dans l'organisation suédoise, le projet travaille sur trois axes, à savoir la législation locale, l'appui au ministère des Affaires locales dans le monitoring du processus de décentralisation et l'appui aux municipalités en termes de renforcement des capacités locales et de l'accès au financement. Pour Frederik Florén, ambassadeur de la Suède en Tunisie, la Suède reste engagée pour le renforcement des relations tuniso-suédoises dans tous les domaines. Il ajoute que la question environnementale est une question à laquelle le Suède accorde une grande importance et qui constitue un défi important pour la Tunisie.