Par Raouf SEDDIK Mais qui donc se cache derrière la décision d'expulser le prince Moulay Hicham, venu parler chez nous de transition démocratique dans un cadre académique ? Qui donc a pris sur lui d'imputer au pays un pareil geste qui bafoue les règles de l'hospitalité, qui insulte l'esprit de liberté dont se réclame aujourd'hui la Tunisie et qui, au mépris du peuple tunisien et de ses acquis, tente insidieusement de nous ramener l'ancien ordre de l'arbitraire ? A vrai dire, peu de gens parmi nous connaissaient ce cousin du roi du Maroc. Ils l'ont découvert à la faveur de cette malheureuse affaire. Et, paradoxalement, on devrait presque s'en montrer reconnaissant. Car le bonhomme laisse apparaître dans ses déclarations beaucoup de retenue et de discernement dans l'appréciation des événements. Pas la moindre aigreur, là où pourtant on aurait pu s'attendre à la violence d'un amour-propre blessé. Mais en revanche de la fermeté dans la dénonciation d'un acte qui ne fait pas honneur à celui qui l'a commis, cela oui ! On ignore les raisons des démêlés qui l'opposent au roi Mohamed VI et dont on a pu penser qu'ils ont joué le rôle de motif de l'expulsion dans ce triste scénario : ce n'est pas ici le propos de s'y attarder. Et on se doute que le traitement qu'il a subi ici ne l'aidera pas à se faire une haute opinion de la transition démocratique tunisienne, dont le thème figurait au menu de sa conférence programmée. Mais on retient une chose... Indépendamment même de notre souveraineté qui a été violée par une telle décision, de façon ouverte ou en s'abritant derrière le sophisme de certains usages, le personnage... comment le dire ? le personnage a une classe incontestable ! Et cela suffit pour se dire que c'est le diable si pareilles gens n'étaient plus les bienvenues chez nous. Cela voudrait bientôt dire que n'entrent dans ce pays que les rustres et les goujats. Ceux qui n'ont absolument rien à dire qui risque de déplaire à qui que ce soit, même quand cela est dit dans les règles de la plus parfaite courtoisie. Est-ce cela notre pays, après tous les sacrifices consentis ? Eh bien, c'est sans doute ce que pensent les personnes qui se sont autorisé de certains pouvoirs pour nous infliger la décision en question : pour eux, notre pays ne vaut pas davantage. Et nous aimerions savoir qui ils sont pour trancher de la sorte, sur notre compte et à notre détriment. Dans une publication parue sur sa page facebook, Saïda Garrach, porte-parole de la présidence de la République, affirme que l'expulsion du prince Moulay Hicham s'est déroulée conformément à une procédure administrative «automatique» sans que le président de la République n'en soit tenu informé. Cette déclaration, qui nous rassure dans un sens, nous inquiète dans un autre, car cela signifie que des décisions graves comme celles qui ont été prises, qui engagent l'image du pays sur la scène internationale, sont le fait d'hommes de l'ombre dont on ne connaît pas l'identité et qui tiennent pourtant les manettes de «procédures administratives automatiques»... Demain, d'autres gestes diplomatiques fâcheux sont à craindre, dont les représentants officiels de l'Etat découvriront peut-être la teneur après que le mal aura été fait. Rappelons pour finir que l'incident de cette expulsion a été relayé par de grands médias internationaux. Bref, nous ne sommes pas rassurés !