« Nous focalisons aujourd'hui surtout sur le suivi de l'application des rapports de contrôle. Il y a beaucoup de rapports qui sont réalisés, mais la problématique réside dans leur suivi et la performance de ces rapports pour les transformer en des réformes et pallier les défaillances», souligne Slim Azzabi, ministre-chef de cabinet du président de la République Une vingtaine d'établissements publics seront soumis à une nouvelle approche de suivi des missions de contrôle financier, selon Kamel Ayadi, président du Haut comité du contrôle administratif et financier (Hccaf), lors du séminaire international sur «le meilleur suivi des rapports d'audit », qui a démarré hier et se poursuit aujourd'hui. Cette nouvelle approche, appelée «Suvi de proximité», touchera également une quinzaine de rapports de contrôle et vise à assurer une meilleure application des recommandations élaborées suite aux missions des différentes institutions chargées du contrôle. En fait, plusieurs critiques ont été formulées quant à l'efficience des missions de contrôle et leur impact réel sur l'amélioration de la performance des établissements et entreprises publics. Il est à rappeler que les rapports de contrôle et d'audit sont élaborés par la Cour des compte et les différents corps de contrôle général qui sont le Contrôle général du service public (Cgsp), le Contrôle général des finances (CGF) et le Contrôle général des domaines de l'Etat et des affaires foncières (Cgdeaf) ainsi que les inspections ministérielles. Le Hccaf assure quant à lui le suivi des rapports de contrôle et d'audit. Jusqu'ici, ce suivi s'effectue sur pièce et non sur le terrain, se limitant à l'examen des répliques écrites et des documents officiels fournis par les structures auditées, selon le Haut Comité. «Cette méthode ne nous procure pas un bon suivi de l'application des réformes. Pour cela, nous avons lancé une première expérience pilote pour le suivi de proximité. Il s'agit d'une nouvelle approche de suivi, se basant sur la participation de tous les acteurs, à savoir le gestionnaire public, les établissements publics soumis au contrôle, au nombre de 20, et les différentes institutions de contrôle», précise M. Ayadi. Calendrier précis Pour Mohamed Slim Azzabi, ministre-chef de cabinet du président de la République, cette expérience pilote marque une nouvelle étape pour la réactivation du suivi des rapports de contrôle et d'audit. Il estime qu'il y a un grand travail qui est en train d'être effectué pour la coordination entre les différentes institutions de contrôle, qui sont toutes représentées dans le Hccaf. L'application de la nouvelle approche s'effectuera selon un calendrier pour la réalisation des réformes et des visites sur terrain. «Nous espérons que cette expérience pilote remplacera à l'avenir l'ancienne méthode de suivi. Pour cela, elle implique l'engagement actif du gestionnaire public», souligne M. Ayadi. Ce calendrier se déroulera sur deux mois pour les réformes directes, selon lui, indiquant que d'autres réformes nécessiteront plus de temps puisqu'elles impliqueraient un changement de législation ou d'autres transformations plus importantes. M. Ayadi affirme que l'expérience pilote du suivi de proximité concernera trois domaines qui sont les biens confisqués, le secteur de l'énergie et le secteur de la santé. Ces domaines sont assez stratégiques en termes de lutte contre la corruption et de renforcement de la transparence. 15 rapports de contrôle réalisés par la Cour des compte et les institutions de contrôle relevant de la présidence du gouvernement, du ministère des Finances et du ministère des Affaires foncières, seront ainsi soumis à cette expérience. Il indique que le rapport annuel du haut comité, qui sera publié en début 2018, consacrera une partie pour ces rapports de contrôle et au suivi de proximité. Rétablir la confiance De son côté, Miriam Allam, représentant l'Organisation de coopération et de développement économique (Ocde), a affirmé qu'il y a un besoin d'avoir un système de gouvernance qui s'appuie sur les principes de la transparence, la responsabilité et la participation citoyenne afin de rétablir la confiance des citoyens dans les entreprises publiques. Elle signale que le projet du Haut comité, mis en place en collaboration avec l'Ocde et le Royaume-Uni, permettra de consolider ses principes et mettra en place les mécanismes nécessaires pour améliorer la gouvernance publique, en s'inspirant des expériences des autres pays. Prenant l'exemple de l'Australie et du Canada, elle indique que chaque recommandation découlant d'un audit financier fait l'objet d'un audit dans la même année. Depuis 2014 au Royaume-Uni, 94% des recommandations ont été adoptées et mises en place. En France, la Cour des comptes a formulé plus de 1.600 recommandations durant la période allant de mars 2013 à février 2016. 72% ont été partiellement ou totalement mises en œuvre. Pour le cas de la Tunisie, Mme Allam précise que 77 missions de suivi ont été effectuées en 2015, d'après le Hccaf, détectant plus de 600 anomalies à suivre dont 60% ont été corrigés. "Le défi est d'assurer que les missions de suivi permettent de vérifier que les recommandations des rapports ont été bel et bien respectées. Ceci est l'objectif ultime du contrôle", lance-t-elle. Un défi de taille pour la réalisation effective de la bonne gouvernance qui demeure un axe principale pour l'engagement des réformes. La lutte contre la corruption et l'amélioration des services publics sont ainsi des objectifs majeurs pour rétablir la confiance des Tunisiens et permettre également une meilleure performance de l'administration tunisienne et un meilleur concours à la croissance dont a tant besoin le pays.