Certaines localités enclavées ou situées en altitude sont inaccessibles pour le transport rural scolaire et même pour le transport privé. Se rendre à l'école ou au lycée, voire à un établissement d'enseignement supérieur, n'est pas une sinécure pour les habitants des zones rurales, tant cela représente un acte laborieux et nécessitant bien des sacrifices. C'est, qu'en fait, par-delà le manque de moyens de transport, les trajets sont parfois longs et requièrent souvent une double desserte, avec des correspondances encore plus éprouvantes, les unes aussi bien que les autres. Et en dépit de certains efforts fournis pour faciliter aux élèves et aux étudiants l'accès à leurs études, l'on constate qu'un travail laborieux est encore nécessaire, pour évoluer ce mode de déplacement, souvent irrégulier et au gré des caprices de Dame Nature, d'autant plus que certaines localités enclavées ou situées en altitude sont inaccessibles pour le transport en commun et même pour le transport privé. La Société régionale du Kef a beau mobiliser son parc de bus pour assurer le transport des élèves et des étudiants, cela est insuffisant pour satisfaire toutes les demandes. Les élèves sont parfois contraints de parcourir quelques kilomètres pour arriver au lieu de rassemblement des bus qui les emmèneront au lycée ou à l'école où ils passeront la journée à puiser dans le savoir autant que faire se peut. Ils devront se contenter d'une petite collation, quand ils ne sont pas admis en régime de demi-internat, ou le plus souvent d'un maigre sandwich ramené de la maison qu'ils partagent avec un camarade quand les moyens financiers sont à même de leur permettre de se rendre chez un gargotier. Quand le bus est en panne, c'est une journée perdue pour ces damnés de la terre. En cas de retard, ils sont tout bonnement interdits de rejoindre leurs classes. Ces derniers jours, plusieurs familles ont même appelé les services de la Société régionale de transport à faire un effort, en tenant notamment en compte les aléas du trafic routier, surtout pour les étudiants, contraints de faire, chaque jour, plusieurs dizaines de kilomètres pour rejoindre leurs établissements universitaires, d'autant plus qu'ils sont privés d'hébergement universitaire. Absence de transport rural, l'un des principaux facteurs responsables de l'abandon scolaire C'est là que le bât blesse, avec le regain de l'abandon scolaire pour les filles issues du milieu rural, un phénomène qui inquiète aussi bien les pouvoirs publics que les parents, surtout que le phénomène du terrorisme, ces dernières années, suscite de plus en plus l'inquiétude des parents qui obligent leurs enfants à interrompre leurs études. Certains établissements scolaires ont même tout fait pour arranger un tant soit peu les emplois du temps et les adapter aux exigences de la menace, en faisant avancer l'heure de sortie des élèves, mais cela n'a pas suffi pour calmer la peur des parents qui se rendent tous les jours, au cours de l'année scolaire, aux points de rassemblement pour récupérer leurs filles, notamment pour les habitants des zones montagneuses à haut risque, car même si la situation sécuritaire s'est nettement améliorée dans la région, la peur hante toujours les esprits dans les contrées montagneuses du Kef. Pour certains élèves, un passage par le transport privé est parfois nécessaire, notamment quand ils ratent le bus ou que ce dernier tombe en panne. «La note devient alors salée pour les parents», nous confie un père originaire de la localité de Jradou, située à quelques encablures de Sakiet Sidi Youssef, une zone à forte densité urbaine où le transport rural privé est très actif. Pour les élèves du primaire,surtout ceux qui résident à deux ou trois kilomètres de l'école, ils n'ont pas d'autre choix que de faire le trajet à pied, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige. Certains seront cependant accompagnés par leurs parents ou demeureront carrément à la maison car l'école ferme ses portes, pratiquement dans ce genre de situation, ce qui se répercute inévitablement sur les résultats des écoliers. Et rares seront ceux qui franchiront le Rubicon au concours d'entrée au collège pilote. Le gouvernement aura tout fait pour améliorer les services de transport rural, mais cela demeure toujours insuffisant et c'est encore le même spectacle de désolation que l'on rencontre parfois dans les régions de l'intérieur où le carcan de la pauvreté et de la misère pèse lourdement sur les résultats des élèves et les pousse à l'abandon scolaire parfois précoce, en particulier pour les filles appelées, hélas, à subir souvent les lois de la traite.