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Le système fiscal en point de mire
Opinion
Publié dans La Presse de Tunisie le 02 - 01 - 2018


Par Skander SALLEMI*
Nous vous proposons cette présentation qui tient compte, bien entendu, des avis et attentes notamment des professionnels, quant aux points de la LF 2018 à réformer. L'objet de cette présentation reste de sensibiliser, si besoin était, le ministère des Finances au sujet des points repris ci-dessous. Cette contribution vise en profondeur le niveau du système fiscal tunisien en allant directement aux propositions formulées par les investisseurs.
En premier lieu on commence par un principe qui est lié essentiellement à la perception de l'impôt qui est le fait générateur de l'impôt. Ce principe consiste à ce que l'impôt soit supposé être dû au titre des revenus réellement réalisés. En matière d'impôts directs, on peut observer que le système s'est éloigné de ce principe. On peut le constater au niveau du fondement non conforme à la loi, c'est-à-dire de la détermination du revenu. A titre d'exemple, le comportement de l'Administration ou la doctrine administrative en matière de détermination des revenus liés à la participation ou à la mise à disposition de fonds par les associés en compte courant associés. On remarque que le fondement doctrinal qui illustre l'application de la législation fiscale s'est éloigné carrément du texte. On a une situation où l'Art 35 Cirpp et IS prévoit l'imposition des intérêts réellement perçus alors que sur la base de la Note commune n°18/2004 l'Administration se permet de calculer les intérêts et de les imposer indépendamment de leur perception et imposition. Ce cas illustre l'éloignement de l'application de la loi par rapport au fondement doctrinal qui devient conflictuel par rapport à la législation elle-même.
Pour ce qui est du fait générateur de l'impôt en matière d'Impôts indirects, comme la TVA, il est lié essentiellement à des événements tels que la facturation, la livraison et l'accomplissement du service, donc réellement indépendant de la collecte de l'impôt. *L'obligation de payer est indépendante de la collecte réelle de l'impôt alors que la TVA est fondée sur un principe qui prévoit que la TVA a un aspect pécuniaire qui est lié à la collecte effective, ce qui veut dire que normalement on ne paye que ce qu'on a perçu. Cette approche augmente le risque fiscal des entreprises par exemple en cas de non recouvrement du CA ou de difficultés financières. L'entreprise est considérée redevable indépendamment de la collecte et doit s'acquitter de la TVA et du DC.
Pire encore, en cas de non-paiement dans un délai de 6 mois, l'article 92 CDPF prévoit une sanction qui peut aller de l'amende jusqu'à l'emprisonnement du chef d'entreprise.
Instabilité du système fiscal
Tout le monde s'accorde sur l'instabilité du système fiscal. Cette instabilité peut être remarquée en matière de l'assiette de l'impôt. Il y a modification de l'assiette de l'impôt par des dispositions réglementaires alors que l'Art 65 de la Constitution prévoit que l'assiette et le taux doivent être réglementés dans le cadre d'une loi.
On a l'exemple du décret n°418-2017 qui a modifié la liste des activités de soutien.
Les activités de soutien sont des activités qui bénéficient d'une déduction de 2/3 des bénéfices de l'assiette de l'impôt avec le payement d'un minimum de 10%.
Cette instabilité est aussi constatée dans certaines autres activités comme la formation continue où le décret n°418-2017 a retiré cet avantage d'une manière imprévisible et sans aucune concertation avec les représentants du secteur des entreprises, etc.
Cela a engendré une augmentation imprévue de l'impôt direct de plus de 50%. Ce que contestent les acteurs du secteur et les entreprises.
C'est que cela s'est passé sans aucune étude d'impact socio-économique et en l'absence d'évaluation de l'impact des nouvelles dispositions sur les secteurs concernés.
Cette instabilité est aussi conjuguée par les impôts conjoncturels
On a à titre d'exemple instauré dans les lois de finances de 2014 et 2015 :
Une redevance de compensation de 1%.
En 2014, on a eu droit à la contribution conjoncturelle exceptionnelle.
En 2016, il y a eu la contribution conjoncturelle de 7.5% dont l'assiette est plus large que le bénéfice imposable.
Enfin, dans le cadre du projet de la loi de finances 2018 «on entend parler» d'une contribution sociale généralisée 1% ?
Le contrôle fiscal
Tout le monde conteste l'objectivité du contrôle fiscal. La décision de contrôle n'obéit pas à l'obligation de motivation. Chaque contribuable se demande pourquoi serait-il contrôlé alors que d'autres ne le sont pas. Les fondements de la vérification sont source de manque de transparence au niveau du contrôle. Il faut aussi signaler l'insuffisance de garanties en phase de contrôle fiscal, par exemple :
L'absence d'encadrement du recours aux présomptions : l'administration fiscale peut redresser une entreprise en recourant uniquement aux présomptions. Le recours à ces présomptions, légales ou de fait, n'est pas encadré. Il n'est pas prévu dans quelles conditions on peut recourir à ces présomptions.
L'absence d'encadrement du choix des méthodes de vérification : l'administration peut redresser en recourant à un cumul, à la fois les données comptables et en même temps sur la base de présomption.
Parmi les présomptions qu'on observe : il y a la marge du secteur ; or toutes les entreprises n'utilisent pas le même taux de marge. En outre le recours à cette méthode n'est pas réglementé.
Absence de recours en phase de vérification permettant d'éviter les traitements préjudiciables dus à des erreurs ou à des abus. Bien que la loi ait prévu l'institution du médiateur fiscal depuis deux ou trois ans : on constate qu'elle n'est pas encore opérationnelle.
Dans le cadre du Code du droit et des procédures, il y a un déséquilibre remarquable entre les prérogatives de l'administration et les garanties des contribuables. Pour illustrer cette situation, on peut citer le cas où le chef d'entreprise ou le contribuable en phase de vérification ressent qu'il y a un préjudice ou une pratique qui ne convient pas à sa situation : *La loi ne prévoit aucune procédure de recours et aucun délai durant cette phase.
Contentieux fiscal
La phase contentieuse commence à partir de la notification de l'arrêté de taxation d'office. Les garanties sont-elles suffisantes et quelles sont leurs limites ?
L'art 52 du CDPF prévoit la suspension de l'exécution de l'Arrêté de taxation ;
Mais c'est une garantie qui est très limitée parce qu'elle exclut les retenues à la source et les amendes liées qui restent recouvrables indépendamment des mesures suspensives.
Or les retenues à la source peuvent être constituées de non-reversement de l'impôt, comme elles peuvent être dues au titre d'un problème de qualification de certaines opérations économiques : a titre d'exemple, on peut qualifier une opération de trafic international ou de redevance qui engendre une situation pouvant se traduire par des retenues à la source, cependant que l'entreprise ne peut pas arrêter le recouvrement par la procédure prévue par l'article 52.
Pendant la réforme fiscale, il y a eu deux propositions pour améliorer cette garantie :
Une proposition de l'administration fiscale qui prévoit de réduire le taux de la caution bancaire de 20 à 15% du montant de l'impôt en principal.
Ce montant peut être abaissé à 10% du montant en principal de l'impôt dans le cas où il y a un paiement direct auprès du receveur.
Les organisations patronales et le ministère de la Justice avaient de leur côté fait une autre proposition qui était de créer un référé en matière fiscale pour examiner les demandes de suspension de l'exécution des arrêtés de taxation d'office pour qu'il n'y ait pas de payement si la taxation est estimée non fondée.
Le juge peut statuer pour la suspension s'il considère que la taxation n'est pas réelle ou si elle n'est pas proportionnelle à la situation ou aux moyens de l'entreprise : ce qui peut affecter son fonctionnement.
Malgré l'existence de ces deux propositions, la loi est allée dans le sens de l'administration.
En phase judiciaire, on a aussi l'examen des oppositions à la taxation d'office par des juges de fonds. Or les juges du tribunal de 1ère instance ou la Cour d'appel ne sont pas formés en matière fiscale ou en droit administratif alors que l'arrêté de taxation est un arrêté administratif règlementé par le droit administratif. Cette situation fait que les décisions de justice qui sont prononcées utilisent souvent une terminologie de droit Civil telle la nullité de la taxation d'office alors qu'en matière de droit civil, on doit plutôt parler d'annulation. La formation des juges est une limite à la garantie judiciaire.
Lutte contre l'évasion fiscale et l'économie informelle
En matière de lutte contre l'évasion fiscale et l'économie informelle, on remarque un recours excessif aux dispositions légales. On essaye de balayer certains phénomènes par des dispositions légales. La disposition légale est une disposition générale, elle ne permet pas de régir des cas particuliers très différents les uns des autres.
Par exemple, si on prend les régimes forfaitaires on ne peut pas considérer que toutes les entreprises sont des fraudeurs ou bien qu'elles ne peuvent pas réunir les conditions de ce régime.
Ces dispositions rencontrent aussi des difficultés d'application et créent des situations conflictuelles : ce qui conduit à ce qu'elles soient rejetées à plusieurs reprises tels que :
Chez les agriculteurs (affaires des taxes de circulation),
Les avocats, les médecins et les pharmaciens qui se sont sentis ciblés et discriminés.
Ces dispositions ont aussi augmenté l'instabilité de l'environnement des affaires ;
On observe en outre un manque de coordination entre les diverses administrations telles que la direction générale des impôts et la direction générale des douanes.
L'administration fiscale conduit des vérifications fiscales de la situation des entreprises; ce qui permet de réellement observer le manque à gagner en matière de douanes ; alors que les taxes douanières et tout ce qui est impôts et taxes dus à l'importation, ne sont pas vérifiés en phase de vérification fiscale.
Ceci occasionne un manque à gagner dû à la non-collaboration entre ces différentes administrations.
On remarque enfin un manque de travail de terrain tel que le contrôle sur place des obligations de facturation qui est préjudiciable pour les entreprises organisées.
Les avantages fiscaux
Il y a eu une réduction des avantages fiscaux à partir de la refonte de la législation liée aux avantages fiscaux.
Le code d'incitation aux investissements s'est traduit par une réduction massive de ces avantages.
A titre d'exemple, les entreprises ont été privées des incitations au financement dans le cadre de réinvestissement. Ceci a réduit l'attractivité du système fiscal tunisien.
Il faut signaler aussi l'absence de mesures d'accompagnement pour les entreprises qui ont subi un impact direct en matière de charge fiscale due à la modification du cadre lié aux avantages fiscaux et une absence d'études d'impact pour quantifier l'impact socioéconomique et l'impact sur l'investissement.
L'administration fiscale et les relations avec l'investisseur
En matière de service, les délais des formalités ne sont pas réglementés.
Par exemple lorsqu'on demande une attestation d'achat en suspension de TVA, l'administration prévoit un délai de 5 jours. Ce délai n'est prévu ni dans la loi, ni dans les textes réglementaires (arrêtés).
On ne trouve l'exigence de ce délai que dans le Sicad, ce qui pousse à se demander quid de l'efficacité du registre électronique des formalités ? S'il est contraignant, et s'il engage l'administration ?
Absence d'un système d'information adéquat.
Erreurs au niveau de la saisie des déclarations qui sont aggravées par le fait que le contribuable ne peut pas consulter ses déclarations.
Il y a beaucoup de contentieux qui sont du à de fausses informations qui existent sur le système : déclarations qui ne sont pas correctement saisies :
Par exemple, une société totalement exportatrice n'a pas de paiement de TVA en rapport avec son chiffre d'affaires mensuel ; Il arrive souvent que les agents de la recette des finances zappent les informations concernant les achats en suspension de TVA ou bien le chiffre d'affaires exportation. Ceci donne des informations non cohérentes entre le système informatique du ministère des Finances et des informations déposées dans le cadre de la déclaration des impôts sur les sociétés et celui des états financiers.
Difficultés dans les régions
Le cumul du contrôle et du service dans les centres régionaux induit des délais de traitement des requêtes très longs dus à la centralisation du traitement : ce qui affecte négativement la disponibilité des agents pour l'accomplissement du service. Parfois les bureaux, submergés par des dossiers de vérifications, sont appuyés par les agents en charge des avantages fiscaux ou des formalités administratives : ce qui crée un problème de disponibilité ! Il y a aussi l'inégalité du traitement : la direction générale des grandes entreprises, qui est chargée de la simplification des procédures et du rapprochement de certains services, repose sur le critère d'emplacement : puisque ne peuvent bénéficier de ce traitement que les grandes entreprises situées dans le Grand Tunis.
Problème de manque de communication : plusieurs personnes concernées par les nouvelles mesures des régimes forfaitaires et des délais de changement de régime ne sont pas au courant de ces mesures parce qu'il n'y a pas de campagne de communication ciblée.
Le système douanier
Le système douanier n'a pas été inclus dans la réforme fiscale.
Ce système est caractérisé par l'instabilité et le manque de transparence des procédures.
La réglementation des procédures se fait généralement par des notes internes non publiées par la DG des douanes.
Il y a aussi des disparités de traitement entre services et industrie.
A titre d'exemple, le régime d'exécution des travaux bénéficie selon les notes de la DGD aux sociétés industrielles alors que le Code des douanes ne prévoit aucune restriction.
Absence d'un système d'information adéquat : illustré par l'indisponibilité des informations relatives aux procédures et l'absence de statistiques.
Exemple : absence de statistiques sur le commerce extérieur, qui figurent dans le site de la direction générale des douanes au-delà de l'année 2011.
Il faut aussi signaler enfin le phénomène de la complexité des procédures.
Recouvrement des créances fiscales
Le système fiscal peine sur des créances très anciennes qui alourdissent la charge de la direction générale de la comptabilité publique. Le système de la comptabilité publique a aussi besoin de modernisation et souffre de l'absence de statistiques et d'informations qui aident à améliorer la politique de recouvrement.
(* Membre de la Chambre tuniso-néérlandaise du commerce et de l'industrie)


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