C'est la première fois qu'un plan d'aménagement d'une municipalité est proposé par des ingénieurs paysagistes C'est un projet qui vise à déclencher un changement au niveau des communautés locales et des autorités de l'aménagement des localités rurales et ce par la mise en valeur et la protection du patrimoine et des ressources naturelles à travers un aménagement spatial adapté. Financé par South Med Culture Value, cofinacé par l'Union européenne dans le cadre du programme régional Med Culture, le projet «Plan d'aménagement local durable — localité de Thibar» se veut un exemple de ce processus de changement. Thibar a été promulguée municipalité en 2015 et avait ce statut à l'époque romaine, avant qu'elle ne soit établie Domaine de St-Joseph de Thibar par les Pères Blancs au 19e siècle, conservant ainsi et depuis sa vocation agricole et son cachet architectural typique. Aujourd'hui Thibar est menacée, selon l'Association tunisienne des ingénieurs et architectes paysagistes, Talae, par deux grands projets, à savoir l'installation d'une zone industrielle à son entrée et le projet de construction de logements sociaux. D'où est venue l'idée de lui adapter un plan d'aménagement local intégrant les principes du développement durable à travers une approche paysagère ? « Le projet est une première en Tunisie, dans la mesure où c'est la première fois qu'un plan d'aménagement d'une municipalité est proposé par des ingénieurs paysagistes. Par ailleurs, le projet plaidant la durabilité s'appuie sur une démarche participative impliquant les citoyens à l'amont et tout au long du processus. Notre projet a aussi bénéficié de la participation volontaire et bénévole de trois experts québécois de l'Association des architectes paysagistes du Québec (Aapq)», assure Yasmine Tebassi, responsable communication pour l'Association tunisienne des ingénieurs et architectes paysagistes, Talae. Ledit projet a été entamé en février dernier et sera fin prêt vers la fin du mois en cours. Préserver les spécificités Dans sa présentation du projet, l'association Talae précise que la problématique principale est de réconcilier le territoire de Thibar avec le développement durable, et de contribuer à la protection et la conservation des acquis matériels et immatériels de la localité. Sachant que les atouts de cette localité sont, entre autres, la Noire de Thibar, une race ovine, la Thibarine, une liqueur, et les figues de Djebba. Partant de ce principe, l'association préconise une organisation rationnelle de l'espace rural et culturel pour améliorer les conditions de vie de la communauté et créer un environnement propice au développement économique. Pour ce faire, Talae adopte une approche participative impliquant les autorités, notamment régionales et locales, ainsi que la communauté locale, outre la réalisation d'une enquête socioéconomique pour cerner la vision que la communauté locale a sur Thibar et ses attentes. Cette méthode participative comprend aussi des concertations avec les divers professionnels, dont les ingénieurs, les architectes paysagistes, les urbanistes, les architectes, les économistes et les experts en patrimoine, ainsi que les artistes et ce pour établir les lignes directrices du plan d'aménagement. De même, on reviendra aux groupes cibles de ce projet d'aménagement local pour recueillir leurs recommandations. Un guide des bonnes pratiques en matière d'aménagement rural sera édité pour encourager d'autres municipalités rurales nouvellement créées à adopter une stratégie différente dans l'aménagement territorial. Etablir un plan d'aménagement rural durable, conserver et promouvoir les patrimoines naturel et culturel, prendre conscience des différences entre la gestion des cités urbaines et celle des localités rurales, et mettre en évidence l'importance de l'architecture de paysage dans l'aménagement du territoire sont les principaux objectifs de ce projet qui serait repris dans d'autres localités rurales. Par ailleurs, cette nouvelle approche de l'aménagement du territoire pourrait faire face à certains défis, dont notamment les changements potentiels au sein des autorités, la bureaucratie, la non-familiarité à la décentralisation et la sensibilité des autorités au niveau national aux spécificités des localités rurales.