Un dauphin entraînant, un leader pétillant et un public stimulant. Le sommet CA-EST fut un régal sur tous les plans. Le Club Africain s'est donc imposé dans la douleur face au leader. Un succès arraché qui ne masque pas les lacunes affichées par le CA à Radès. C'est, cependant, la victoire du cœur et du panache. Un caractère bien trempé qui n'est pas sans rappeler celui qui avait accompagné les épopées clubistes du passé. Le CA a manifestement tiré les enseignements de ses échecs du début de saison. Personne, en effet, ne s'attendait à voir le CA tenir tête aux meilleurs (EST-ESS-CSS). Encore moins à les vaincre ! On se disait même que ce serait un moindre mal pour les Clubistes de finir la saison au pied du podium. Pourquoi ? Parce que le CA a, certes, du talent plein les pattes, mais toujours quelques failles plein la tête. Maintenant, après avoir subi l'affront de certaines défaites à répétition en début de saison, le CA sort la tête de l'eau et vole vers les hauteurs du classement. Les Clubistes méritaient clairement ces victoires pourtant inimaginables sur le papier après les soubresauts du début d'exercice. Ils sont allés au bout de leurs limites pour réduire, même anéantir, un écart de niveau supposé monumental avec l'autre club de la capitale, le leader «sang et or». Intrinsèquement, c'était le cas. Sauf que les Clubistes se sont donnés les moyens de prouver le contraire. Ils le doivent d'abord à eux-mêmes. Mais pas seulement. L'improbable scénario L'Espérance Sportive de Tunis a, à son tour, livré une belle copie face à son éternel rival. Peut-être que le tenant a oublié que le derby reste un match à part. Il fallait forcément que l'EST y mette du sien pour ne pas assister à cet improbable scénario, ce retournement de situation. En fait, l'EST a commencé par dérouler à Radès. Appliquée, studieuse et généreuse, l'Espérance a pris le match par le bon bout et s'est fait justice assez tôt. Les premières salves sont à l'actif des «Sang et Or», mais il leur manquait cette agressivité et cet esprit de conquête pour sceller définitivement le sort du match. Pour le CA, ce fut en partie le contraire. En dépit d'un début de match quelque peu brouillon et hésitant, le CA s'est montré solidaire et intense. Il s'est par la suite révolté, donnant l'impression de jouer sa vie sur chaque ballon ! Il leur fallait coûte que coûte faire corps et ne pas sombrer dans la nervosité, histoire de ne pas passer à côté de ce rendez-vous. Sur ce, il ne faut pas faire la fine bouche. L'égalisation de Wissem Ben Yahia ne masque rien du tout ! Le CA a poussé et a fini par forcer la décision. Pour revenir à l'EST, on a souvent souligné à longueur de temps le manque d'adversité pour le leader sur la scène nationale. A tort, manifestement. Quand l'adversaire existe, l'EST est forcément bousculée. Le CA poursuit donc sa belle série, après avoir épinglé le leader à son tableau de chasse. Au fil de la saison, cette équipe clubiste a tiré les enseignements de son début de saison catastrophique. Le CA a radicalement changé de visage d'amont en aval. Plus de place aux recrutements clinquants qui n'ont rien changé. A l'époque de l'ancien bureau directeur, comme un symbole, c'est son staff technique 100% occidental qui a symbolisé sa faillite mentale. En tête de gondole, le lombard Marco Simone, un technicien-apprenti qui a précipité la chute de l'ambition clubiste ! Des claques et des humiliations mêmes, le CA en avait pris chaque semaine, avalant plus d'une couleuvre. Rares sont les fois où le CA avait connu des contextes aussi tendus ! Sombrer sans réagir, sans se remettre en question, sans être piqué au vif ! Il fallait que ça cesse ! Les signes d'un manque de caractère. Les impressions de déjà-vu. Plutôt que de pointer leurs propres manques, les Clubistes s'étaient surtout cachés derrière la fatalité pour atténuer le contrecoups de certaines déroutes ! Ce fut le cas à maintes reprises par le passé. Quand il se fait agresser, le CA se plaint systématiquement de ne pas être protégé. Il fallait donc mieux qu'il apprenne à se défendre lui-même ! C'était son plus gros défaut. Et c'est un défaut rédhibitoire au plus haut niveau ! Oui, quitte à nous étaler plus qu'il n'en faut sur ce retour vers le passé, le CA était prévenu, mais il n'avait toujours pas corrigé cette lacune. Il restait invariablement suffisant, sûr de sa dimension, dégageant même une forme d'arrogance qu'il n'assumait toujours pas sur le terrain. Il imaginait certainement donner une leçon au Stade Tunisien et au CAB. Mais ce sont les Bardolais et les Requins du Nord qui l'ont renvoyé à ses études! Sur son parcours qu'il espérait sans embûches, ce CA-là devait fatalement sortir le bleu de chauffe pour aller au bout de ses ambitions, et trouver cette force de caractère, sans laquelle il allait au-devant d'autres désillusions ! Extrême limite ! L'Espérance de Tunis est donc tombée pour la première fois cette saison. Les puristes sont pourtant unanimes. L'empreinte de Khaled Ben Yahia est plus visible. Car l'EST a probablement livré une de ses plus belles copies de la saison avec ce jeu fait de passes courtes, de renversements, de variété et de fantaisies mêmes. Une EST qui a séduit et qui a convaincu. L'Espérance la tenait presque cette victoire. Auteurs d'une prestation collective remarquable, les «Sang et Or» méritaient mieux. Ce revers laissera un goût amer à une équipe rattrapée sur le fil. Sorte de revers de la médaille pour un onze qui n'a pas du tout démérité. Dimanche, alors qu'auparavant, elle écrasait tout sur son passage, l'EST est tombée sur un os dur, le Club Africain de Bertrand Marchand. Un CA qui a redonné du charme à un championnat qui s'apparentait jusque-là à un cavalier seul «sang et or». Poussés par une Curva Nord chauffée à blanc, les Clubistes ont fini par s'imposer. Ce fut en somme un beau derby, riche en rebondissements entre deux équipes animées de bonnes intentions et qui ont livré de gros duels, mais dans un très bon état d'esprit, si l'on excepte les mauvaises réactions par-ci par-là ! Le public clubiste était aussi à la hauteur de l'événement avec une énorme ambiance. Un après-midi qui restera dans les mémoires et qui tranche avec les événements houleux de ces derniers temps.