Six ans après la chute du régime de Ben Ali, le film, réalisé par Olfa Lamloum et Michel Tabet, parcourt le gouvernorat de Kasserine, l'un des fiefs de la Révolution de janvier 2011, ayant payé le plus lourd tribut de ces événements, pour recueillir la parole des habitants de cette zone frontalière de l'Algérie. Voices From Kasserine est un documentaire produit en 2017 par Alert International, une organisation qui travaille sur la consolidation de la paix et le soutien des transitions démocratiques. Le film, qui a été projeté à la maison de la culture Ibn-Rachiq vendredi dernier, poursuit en fait un travail d'enquête et de recherche sur Kasserine entamé en 2012 par Alert International. Deux études ont déjà été publiées sur cette région. La première s'intitule : «Jeunesse et contrebande à Kasserine», et la seconde : «Situation sécuritaire et gestion des frontières du point de vue de la population de Kasserine». Six ans après la chute du régime de Ben Ali, le film, réalisé par Olfa Lamloum et Michel Tabet, parcourt le gouvernorat de Kasserine, l'un des fiefs de la Révolution de janvier 2011, ayant payé le plus lourd tribut de ces événements, pour recueillir la parole des habitants de cette zone frontalière de l'Algérie. Paysans et paysannes, jeunes diplômés chômeurs, enfants, jeunes vivant de la contrebande, artistes et militant(e)s de la société civile racontent leur quotidien, les jours glorieux de la Révolution et l'histoire confisquée de l'un de leurs héros, Ali Ben Ghedahem. Ils évoquent leurs conditions de vie, leur sentiment de dépossession, leurs attentes, leurs rêves et leurs résistances. Mais également leur désenchantement par rapport aux gouvernements successifs post 14-Janvier. Des voix qui diagnostiquent avec une pointe de colère les problèmes non résolus de Kasserine : l'analphabétisme en héritage de la population, la persistance du travail précaire malgré les ressources naturelles disponibles, la gouvernance inéquitable de l'eau et la mémoire perdue de Ben Ghedahem. Construit autour de portraits d'individus et de paysages, le film fonctionne comme une plateforme d'échange et de discussion autour des questions de marginalisation et de relégation. «Comment traduire une réalité sociopolitique en images ? Telle a été la difficulté principale du film», témoigne Michel Tabet. Une difficulté qui a été dépassée grâce à une «relation de confiance avec les gens que nous avons réussi à établir pendant ces dernières années», ajoute Olfa Lamloum. Le film semble suggérer, lui, que la plus grande richesse de Kasserine réside dans toutes ces voix, qui malgré un contexte difficile continuent à espérer, à créer, à chanter et à transmettre d'une génération à l'autre des traditions de courage et de dignité face à l'injustice et à l'exclusion.