WASHINGTON (Reuters) — Le conflit est entré le 7 octobre dans sa dixième année, mais l'Afghanistan est pratiquement absent du débat électoral aux Etats-Unis. Si quelques candidats, comme l'ancien béret vert Tommy Sowers, qui porte les couleurs démocrates dans le Missouri, et le républicain Adam Kinzinger, ex-pilote de chasse, dans l'Illinois, en ont fait leur cheval de bataille pour les élections de mi-mandat, le 2 novembre, le sujet ne passionne pas les Américains. La guerre d'Afghanistan pointe ainsi en septième et dernière position dans le classement des dossiers que le Congrès devrait selon eux traiter en priorité en 2011, selon un sondage Ipsos-Reuters publié la semaine dernière. «Il devrait au moins y avoir un débat. Le moment est venu de quitter ces pays», affirme pourtant David Kramer, ouvrier métallurgiste interrogé dans un centre commercial de Lorain, dans l'Ohio. «On enterre chaque semaine un nouveau soldat. On ne peut pas être le policier du monde», ajoute-t-il. Barack Obama, qui a fait campagne en 2008 pour un désengagement des Etats-Unis en Irak, a en revanche opté pour l'envoi de renforts en Afghanistan, où les effectifs américains sont désormais de 95.000 hommes. Paradoxalement, ses choix sont aujourd'hui mieux acceptés dans le camp républicain que par l'aile gauche du Parti démocrate. «On comprend bien pourquoi aucune formation n'en parle beaucoup. Pour le président, c'est négatif dans son propre parti, c'est pourquoi on ne l'entend pas beaucoup sur le sujet», observe Karlyn Bowman, membre de l'American Enterprise Institute, un cercle de réflexion. Les républicains, poursuit-elle, ne sont, eux, «pas mécontents d'Obama» en ce qui concerne l'Afghanistan. Abstraction Si cette guerre ne mobilise pas l'électorat, celle d'Irak a en revanche valu à George Bush de perdre sa majorité au Congrès, il y a quatre ans. Le basculement — loin d'être exclu — de l'une des deux chambres où les démocrates sont majoritaires, serait cette année à mettre sur le compte de la situation économique, du chômage ou du plan de sauvetage du système financier. Les forces américaines déployées en Afghanistan n'ont enregistré jusqu'ici que de maigres résultats. Chassés du pouvoir fin 2001, les talibans se sont réorganisés alors que George Bush privilégiait le front irakien. L'envoi de renforts que Barack Obama a ordonné au début de l'année a, certes, enrayé leur retour en force, mais Washington reconnaît que la guerre ne peut être gagnée militairement et juge que les négociations, à peine ébauchées, sont le seul moyen d'y mettre fin. Cette guerre, qui est donc entrée dans sa dixième année, est devenue pour certains la plus longue de l'histoire des Etats-Unis. Celle du Vietnam a officiellement duré huit ans et demi, mais les historiens jugent que l'implication américaine a été beaucoup longue et certaines guerres indiennes ont duré plus de dix ans. Pour Robert Gates, secrétaire à la Défense, l'absence de débat électoral sur l'engagement américain en Afghanistan s'explique simplement: «Aucun conflit majeur de notre histoire n'a été livré avec un pourcentage aussi réduit de nos citoyens sous les drapeaux à temps plein». «Pour la plupart des Américains, la guerre reste une abstraction, une série d'informations lointaines et déplaisantes qui ne les affectent pas personnellement», ajoutait-il dans un discours prononcé à l'université de Caroline du Nord.