Par Rafik EL Herguem Le «Tunisie digital summit» a insisté sur l'urgence de numériser l'administration tunisienne en faveur des entreprises et aussi des particuliers. La simplification des procédures administratives, allant jusqu'à tout finaliser virtuellement et sans passer par le papier, est-elle quelque chose de simple à appliquer dans la conjoncture actuelle du pays et surtout dans le cafouillage économique que nous vivons ? Pour les particuliers aussi et hormis ces jeunes et un peu moins jeunes cadres qui font tout ou presque sur Internet, le Tunisien «ordinaire», qui n'a pas encore accès à Internet, qui n'aime pas («complexe numérique» oblige) l'ordinateur, va-t-il en profiter du jour au lendemain ? Ce ne sera pas quelque chose de facile ce changement brusque. Car la transition numérique n'a pas été bien préparée. Et même pour ces entreprises, surtout les «start-up», qui ont un avantage considérable à gagner en passant au numérique, cette aubaine ne va pas se concrétiser demain. Il y a un terrain à préparer et loin de ces procédures administratives (création d'entreprises, conclusion et paiement des transactions), ces entreprises, même innovantes, ont besoin aussi (et surtout) d'un coup de pouce réel de la part du gouvernement. Elles ont besoin surtout de deux choses : l'accès au financement sous toutes ses formes et surtout un accompagnement logistique et financier pour éviter les délais longs et la tendance de récession qui marque le marché international. L'enjeu est dangereux : il s'agit de laisser de côté la configuration classique de l'entreprise (procédures longues, support papier, contact direct avec l'administration, les clients et les banques...) pour migrer vers une configuration souple, numérique où les transactions se font virtuellement. C'est un premier pas significatif mais encore insuffisant. Il faut surtout investir dans la préparation du terrain, dans la diffusion de la culture numérique, dans la protection des données personnelles sur le web pour éviter la «cybercriminalité» qui cause des pertes énormes pour les petites entreprises. Moins de procédures papier, oui, mais l'électronique seule, sans une transformation des habitudes, n'aura pas de conséquences palpables à court terme sur l'économie tunisienne. L'appui logistique et financier aux entrepreneurs, dans une approche globale, pourra donner plus de chances à cette numérisation de l'administration tunisienne.