De notre envoyée spéciale Neïla GHARBI Le cinéma iranien a pesé de tout son poids sur la 13e édition du Festival international du film oriental de Genève, organisé du 21 au 29 avril 2018 grâce à l'initiative de la mairie de Genève, de partenaires suisses et d'autres pays. Dédiée spécialement à la femme, cette édition a vu un grand nombre de films réalisés par des femmes, qui faisaient dans un autre temps figure d'appoint. La Tunisie, qui participait avec 11 films, dont quatre longs métrages, n'a pu décrocher qu'un seul petit prix décerné au court métrage « Aya » de Moufida Fedhila. Le film, qui avait obtenu le Tanit d'or des JCC 2017, concourait dans la section compétition pénitentiaire. Mais c'est l'Iran qui a raflé le Fifog d'Or de la meilleure œuvre avec le film « N°17 Soheila » de Mahmoud Ghaffari. L'histoire de Soheila, femme célibataire de 40 ans à la recherche d'un mari. Il s'agit du parcours d'une combattante dans un pays conservateur où la femme trouve des difficultés à prendre des initiatives. Parmi les sept films de la compétition internationale, ce film a ému le jury présidé par la psychiatre et anthropologue marocaine Rita El Khayat. Cette récompense confirme une fois encore que le cinéma iranien continue à être l'un des meilleurs de la région. Tandis que dans la catégorie des courts métrages, le Fifog d'or a été accordé à Onur Yagiz (Turquie) pour son film «Toprak» et celui des documentaires est revenu à Mehrdad Oskouei (Iran) pour son film «Des Rêves sans étoiles». Le Prix de la critique a été attribué à Karim Moussaoui (Algérie) pour son film «En attendant les Hirondelles». Dans la compétition scolaire, les réalisateurs Basma Farhat (Liban), Sadam Wahidi (Afghanistan) et Baqeral-Rubaie (Iraq) ont été gratifié(e)s par des Fifog d'or, respectivement, pour leurs films «The shield that I carry», «You are not American» et «The violet». Dans cette même catégorie, les films suivants ont reçu une mention spéciale : «Tata Milouda» de Nadja Harek (France), «Le Convive» de Hakim Mastour (Suisse, Tunisie) et «Take my hand» de Serge Majdalany (Liban). Présence tunisienne distinguée Bien que n'ayant pas eu de prix officiels, la Tunisie s'est distinguée d'abord à l'ouverture avec la projection d' « El Jaida » de Selma Baccar. Pour des problèmes de santé, la réalisatrice n'a pas pu faire le déplacement pour présenter son film. L'actrice Najoua Zouheir l'a dignement représentée pour effectuer cette tâche. « Benzine » en présence de la réalisatrice Sarra Abidi a été projeté dans le cadre de la compétition internationale mais sans obtenir de récompenses. Dans le cadre de l'action diplomatique culturelle tunisienne en Suisse, le Fifog a célébré « La journée de la Tunisie». Cette Journée a été marquée par une projection-débat du film en lice pour la compétition du prix de la critique « Tunis by night » d'Elyes Baccar en présence du producteur du film, Mohamed Ali Ben Hamra, qui a indiqué au cours du débat ayant suivi la projection que le cinéma tunisien souffre de la défaillance du système de distribution qui fait que la production reste toujours tributaire des subventions de l'Etat. Il espère qu'avec la création du Cnci (Centre national du cinéma et de l'image) les choses changeront d'autant plus que les films tunisiens donnent satisfaction notamment dans les festivals internationaux, citant au passage le film « Nhebk Hédi » (Prix de la meilleure œuvre et Ours d'argent du meilleur acteur au festival de Berlin 2016). Le film « Zizou » de Férid Boughedir, qui a fait l'ouverture de la 34e session du festival Vues d'Afrique à Montréal (13-22 avril), a bénéficié d'une double projection en présence du réalisateur et ce dans le cadre de la même section. Le Fifog commence à se positionner sur la scène culturelle genevoise et à s'affirmer grâce à l'intérêt porté par un public curieux de découvrir un cinéma d'auteur aux valeurs thématiques et esthétiques différentes des siennes. Une sélection de films du Maghreb au Machreq est programmée dans deux salles de contenance moyenne dans l'espace Grütli. Le nombre de spectateurs est variable selon les films et surtout les horaires de projection. C'est à partir de 17h00 que les Genevois se rendent au cinéma. En début d'après-midi, les salles sont moins fréquentées. La raison invoquée selon Tahar Houchi, directeur général et artistique du Fifog, est « le beau temps ». « Les gens préfèrent les sorties dans les espaces extérieurs tels que les parcs et jardins publics plutôt que de s'enfermer dans une salle. Outre le climat exceptionnel en cette période de l'année, les Genevois travaillent les après-midi et ne sortent que le soir. Ce qui devrait nous pousser à revoir les horaires de projections pour permettre à un plus grand nombre de spectateurs de profiter des films et des débats du festival ». Les spectateurs genevois sont disciplinés. Ils se présentent à l'heure aux projections, ne quittent jamais la salle avant la fin du spectacle et réagissent timidement au débat qui suit. C'est surtout les Maghrébins vivant en Suisse qui interviennent pour poser des questions aux réalisateurs ou aux producteurs de films. Toujours est-il, il est important qu'une telle manifestation puisse exister dans un pays européen dans la mesure où elle contribue à juguler les idées reçues sur les sociétés arabes et islamiques et à donner à voir d'autres cultures dans le but de rapprocher les peuples entre eux et d'absorber les tensions et les violences qui peuvent exister de part et d'autre. Le Fifog pourrait évoluer positivement dans les prochaines sessions à condition que l'équipe organisatrice lui donne une nouvelle impulsion et davantage de dynamique.