Par Amel Zaïbi Il ne partira pas. Pour le moment. Il n'a pas l'intention de démissionner. Il n'a aucun agenda pour 2019. Il continuera à travailler avec tous ceux qui placeront l'intérêt de la nation au-dessus de toute autre considération. Il appelle les forces progressistes à s'unir pour sortir le pays de l'impasse et sauver la jeune démocratie tunisienne. C'est ce que l'on a pu comprendre en substance de l'intervention du chef du gouvernement diffusée par la télévision nationale mardi au soir. Une mise au point longtemps attendue et souhaitée par nombre de femmes et d'hommes politiques, d'observateurs, d'analystes et de chroniqueurs qui s'étonnaient du long silence de Youssef Chahed face à la vague sans précédent de critiques, d'accusations, voire d'humiliations, de la part de ceux qui l'accusent de symboliser l'échec économique de tout le pays. Chahed a donc finalement parlé. Il a usé de son droit d'expression pour répondre, expliquer et justifier. Libre à chacun de juger ce qu'il a dit, il n'en demeure pas moins qu'il est dans son droit d'autant qu'il est à la tête du gouvernement et que sa parole doit être entendue en tout temps et en tout lieu, sans intermédiaires et en toute transparence. Sauf que ceux qui lui reprochaient, hier, de garder le silence et d'appliquer la politique de l'autruche face à une grave crise politique qui menace la stabilité du pays lui ont reproché, le lendemain, d'avoir parlé et de s'être adressé aux Tunisiens pour leur expliquer, de son point de vue, ce qui se passe et ce qu'il compte faire. En d'autres termes, les éternels mécontents schizophrènes veulent que Chahed se taise en parlant. Ce qui est étonnant et regrettable, c'est que cette schizophrénie aiguë frappe tout un pan de la scène politique et médiatique, n'épargnant personne, y compris le président de la République Béji Caïd Essebsi qui est, tout le temps, sollicité quand une crise, politique ou sociale s'enlise et que ses protagonistes ne lui trouvent pas d'issue. Après quoi, des voix soi-disant indignées s'élèvent pour « rectifier le tir » stipulant que les prérogatives du président de la République sont limitées par la Constitution. Le chef du gouvernement devait se prononcer sur ce qui est devenu une foire d'empoigne dans la sphère du pouvoir, à savoir la crise qui secoue Nida Tounès et qui a gravement débordé. Elle affecte aujourd'hui le gouvernement, le Parlement et même la présidence de la République. Elle est devenue une affaire nationale, une affaire d'Etat. Dans ce contexte de tensions et d'instabilité, personne ne peut rester indifférent, il y va des affaires du pays, de ses intérêts, de ses engagements nationaux et internationaux et de son avenir. Même les députés de l'opposition ont fini par réagir. Après la suspension sine die du Document de Carthage 2 par le président de la République, outré par l'entêtement et la rigidité des protagonistes des discussions autour du 64e et dernier point de cette nouvelle feuille de route, relatif au départ ou non de Youssef Chahed, des députés de l'opposition (Front populaire, groupe démocrate...) ont appelé à une séance plénière qui sera consacrée à l'examen de cette dangereuse crise du et au pouvoir. Dans une déclaration mardi dernier à la TAP, le député Ahmed Seddik (FP) expliquait que « les groupes de l'opposition n'avaient pas l'intention d'intervenir dans les affaires des partis au pouvoir, mais l'amplification de la crise politique et ses graves incidences sur le gouvernement et l'administration ont poussé les députés à agir ».