Il n'est jamais facile de gagner la bataille de l'amour face à une ville de l'Orient. Il n'est jamais évident de remporter n'importe quelle victoire quand on vit dans une ville défigurée et défigurante, quand on n'a que l'amour, un amour contraint à vivre en cachette. Tant de choses qu' « Insihab » ou « Repli » de Moez Gdiri met en scène en toute sobriété: deux chaises, une bouteille d'eau, de la lumière et puis deux comédiens, Nour (Nadia Wally) et Lui (Skander Zehani). La pièce vient d'être présentée, les 11, 12 et 13 novembre à El Teatro. Durant les 55 minutes que dure « Insihab », c'est un condensé de leurs vies et de leurs rêves, jusqu'aux plus secrètes intimités, que ces deux personnages livrent aux spectateurs. Entre les rires, les querelles et les moments de vérité, ils déchargent leurs consciences de ce que la ville y déverse. Leurs âmes sont porteuses des séquelles du passé proche et lointain. Mais, au fait, comment leur histoire a-t-elle commencé ? Ils se connaissent depuis quatre ans, depuis la faculté, et sont ensemble depuis deux mois. Nour travaille dans l'évènementiel, le domaine des mondanités par excellence, celui que méprise Lui, qui est écrivain ou qui essaye de l'être. Leur amour est au début plus fort que tout et ils louent un studio pour s'y rencontrer. Leur amour est plus fort que les codes de la société, que le voisin curieux et le propriétaire imposant. Quand ils sont dans le studio, ils essayent de se créer un monde étanche et de ne rien apporter de l'extérieur. Mais les tentacules de la ville regagnent leur fragile nid d'amour. Le maillon faible de leur relation est du côté de Lui qui n'arrive pas à se débarrasser de ses faiblesses, de ses doutes et hésitations... «Insihab» aborde d'une manière simple mais pas simpliste le mal d'amour dans les sentiers battus. C'est une histoire très contemporaine, qui part de l'amour- rêve pour arriver à l'amour-réalité, au point de prendre les allures d'une vérité générale, valable quelle que soit la cité où l'histoire a lieu. D'ailleurs, le texte d'«Insihab» est né d'une adaptation faite par le metteur en scène, à partir de celui de Mohamed Attar, écrit en dialecte syrien.