Tout droit venus de Grèce, les «En Chordais» conçoivent leur musique comme un visa qui fait fondre les frontières entre les pays de la Méditerranée, en particulier de sa partie Est. Quoi de mieux pour illustrer l'esprit de la première édition des Journées musicales de Carthage. Leur spectacle dans le cadre de ces journées a eu lieu mardi dernier au Théâtre municipal. Et quelle fut notre surprise en découvrant cette formation de cinq musiciens (violon, luth, qanun, chant et percussion) conjuguer des paroles en grec à une musique tout ce qu'il y a de plus orientale, dans ce qui pourrait être parfaitement assimilé à un takht, s'il y avait un nay en plus des autres instruments. Mais rien de bien étonnant en même temps, quand on sait que «En Chordais» est un projet né en 1999, justement dans le but de mettre en exergue les similitudes entre les musiques traditionnelles de pays comme la Grèce, la Turquie, l'Iran et l'Egypte, au croisement de l'histoire et de la géographie. Ce projet tend autant à faire revivre une tradition commune à ces pays qu'à créer un nouveau répertoire qui s'inscrit dans sa continuité. Les recherches effectuées par l'ensemble musical lui ont permis de déterrer et de dénicher des morceaux très anciens, dont un provenant d'un manuscrit byzantin datant du XVIe siècle, intitulé «Les oiseaux de l'Est», et un autre écrit, venu trois siècles plus tard. En 2008, «En Chordais» remportent le prix France Musique des Musiques du monde, qui leur permettra d'enregistrer un CD avec Radio France. Bon nombre des titres de ce disque ont figuré dans le programme de la soirée de mardi, entre chants et passages instrumentaux marqués par des solos exquis. L'un d'eux n'est autre que la version grecque de «Kadouka al mayass», un des airs phares des Qoudoud halabiya. La dernière partie de la soirée a fait découvrir au public un autre talent des musiciens du groupe, celui de la composition. Certains cachaient de belles surprises comme le luthiste Kyriakos Kalaitzides, auteur du morceau «Exil», un véritable trésor de l'Orient caché quelque part en Grèce et dévoilé par une fin d'après-midi de décembre en Tunisie. Le concert s'est achevé par d'autres chansons, plus joyeuses, puisées dans le répertoire classique méditerranéen avant de finir avec âla baladi el mahboub wadini (emmène-moi dans mon pays bien-aimé), l'inoubliable joyau d'Oum Kalthoum, de quoi boucler la boucle d'un programme complet et d'un voyage dans le temps et dans l'espace. Cela nous a fait oublier la demi-heure de retard qui a précédé la montée des musiciens sur scène. Les JMC, aujourd'hui 15h00 : spectacle de Nassir Chamma (4e Art) Compétition de chant et de composition 17h00 : Waness Khlijene et Karim Gharbi (Ibn-Rachiq) 18h00 : 10 heures de musique pour les jeunes (Menzah 6) 18h00 : Zohreh Jooya d'Afghanistan (Théâtre municipal) 21h00 : invité d'honneur Saber Rebaï (Théâtre municipal)