LISBONNE (AP) — Les Portugais sont appelés aux urnes demain pour une élection présidentielle sur fond de crise économique. Grand favori du scrutin, le Chef de l'Etat sortant, le conservateur Anibal Cavaco Silva, pourrait l'emporter dès le premier tour. M. Cavaco Silva, un économiste de 71 ans, est crédité de quelque 60% des voix dans les sondages, contre seulement 25% pour le candidat du Parti socialiste, le poète et député Manuel Alegre, 74 ans. Un second tour sera organisé si aucun des six candidats en lice n'obtient la majorité absolue demain. Les pouvoirs du président sont limités au Portugal, mais un large succès de M. Cavaco Silva serait perçu comme un rejet du bilan du Premier ministre socialiste José Socrates, au pouvoir depuis cinq ans. Le gouvernement veut éviter que le Portugal ne devienne le prochain pays fortement endetté de la zone euro à devoir accepter une aide financière européenne, mais sa marge de manœuvre est très réduite. Lisbonne cherche à la fois à regagner la confiance des investisseurs internationaux et à préserver un fragile soutien de l'opinion à sa politique d'austérité, marquée notamment par une réduction des prestations sociales et des hausses d'impôts. Les prochaines élections législatives n'auront pas lieu avant 2013 mais l'opposition de centre-droit, notamment le Parti social-démocrate jadis dirigé par M. Cavaco Silva, menace d'appeler au vote d'une motion de censure au Parlement si le gouvernement sollicite une aide financière extérieure. "Le gouvernement subit une forte pression en ce moment. Il est dans une situation très fragile", souligne Digeo Iscaro, analyste chez IHS Global Insight à Londres. De nombreux analystes estiment qu'au final le Portugal aura besoin d'une aide financière comme celle fournie l'an dernier à la Grèce et à l'Irlande, même si Lisbonne assure que le pays peut s'en sortir seul. La crise économique a été au cœur de la campagne. Premier ministre de 1985 à 1995, M. Cavaco Silva soutient la politique de réduction de la dette menée par les socialistes. Mais il se montre critique sur de grands programmes de travaux publics, comme celui d'une ligne ferroviaire à grande vitesse vers Madrid, qu'il juge trop coûteux. "Je serai exigeant avec le gouvernement et j'examinerai avec attention les propositions venant du Parlement et de l'exécutif", a-t-il déclaré. Le président peut opposer son veto à des lois. Le dernier mot revient toutefois au Parlement qui peut passer outre les vetos présidentiels. Les observateurs s'attendent à une forte abstention demain.