Le Parti démocratique progressiste (PDP) a organisé hier après-midi à la Coupole d'El Menzah un meeting populaire sur le thème "Fidélité au sang des martyrs", en présence des mères de certains martyrs de la révolution tunisienne, à savoir Mohamed Bouazizi, Houssem Néji et Helmi Mannai. Elles sont intervenues devant le public pour exprimer leur honneur d'être les mères de jeunes qui ont sacrifié leur vie pour la liberté et la dignité de la Tunisie et pour mettre fin à la corruption et à l'injustice. Dans son allocution, Mme Maya Jeribi, secrétaire général du PDP, a salué les jeunes Tunisiens, les martyrs et tous les militants dans les divers domaines pour avoir résisté contre l'oppression de l'ancien régime en vue d'atteindre, grâce à leur volonté indéfectible, leurs objectifs dont le premier consiste à obliger Ben Ali à quitter le pouvoir. Des pratiques de corruption Les jeunes ont utilisé l'Internet pour communiquer et mettre à nu certaines pratiques corrompues du pouvoir et des familles du président et de sa femme. L'oratrice a parlé aussi du Capes, concours obligatoire pour accéder à l'enseignement, qui connaissait des pratiques de corruption dans la mesure où certains candidats étaient obligés de payer une somme pour réussir. Le pouvoir d'achat des citoyens était modeste alors que de nombreuses familles à l'intérieur du pays vivaient dans des conditions lamentables et personne ne se souciait de leur sort. Mme Jeribi estime que tout le peuple tunisien a vécu l'injustice sous l'ancien régime, y compris les chefs d'entreprise et les cadres supérieurs. Parfois, il faut accorder des pots-de-vin pour pouvoir réussir une procédure quelconque. L'agitation a gagné en quelques jours les jeunes, les avocats, les magistrats et les journalistes intègres et les vrais opposants qui ont refusé l'injustice et qui ont milité au dernier moment. Des jeunes du PDP ont pris part à la révolution sur le terrain, indique l'oratrice, et certains en gardent encore des blessures. Aujourd'hui tous les Tunisiens, même ceux qui résident à l'étranger, sont heureux de retrouver la liberté. Ils veulent retourner ou rester en Tunisie et ne pensent plus à quitter illégalement la mère patrie. Cette révolution constitue un modèle pour les autres pays arabes et la contagion est déjà perceptible puisque la population égyptienne a suivi le modèle tunisien pour se soulever contre le régime. Elle a rappelé que le gouvernement de transition a annoncé plusieurs réformes et la constitution de commissions pour mettre au clair les dépassements enregistrés. Mais le travail du gouvernement doit être soumis en permanence au contrôle du peuple, appelé lui aussi à rester mobilisé. Réformes politiques et de développement De sont côté, M. Ahmed Néjib Chebbi, ancien secrétaire général de ce parti et ministre du Développement régional et local dans le gouvernement de transition, a rappelé que plusieurs facteurs ont mené à la révolution dont l'absence d'horizons pour le travail des jeunes, la dégradation des prestations dans les domaines de l'enseignement et de la santé dans plusieurs régions de l'intérieur dont les richesses sont exploitées au profit d'autres régions privilégiées. Le soulèvement a commencé à Sidi Bouzid pour gagner progressivement d'autres régions : Kasserine, Gafsa, Sfax…Les question de la liberté d'expression et de la justice étaient également soulevées par la population et les partis. Malheureusement, il n'était pas possible d'encadrer la révolution spontanée dans la mesure où le pouvoir a fait le vide politique autour de lui en mettant de côté les vrais partis d'opposition qui militent en silence. Le ministre a rappelé les réformes politiques et de développement engagées par le gouvernement de transition qui mènera son travail durant six ou sept mois avant l'organisation d'élections libres et transparentes avec la présence d'observateurs étrangers qui commencent à venir en Tunisie pour vérifier si la liberté d'expression et les différents mécanismes démocratiques sont bien mis en place et opérationnels. Les différentes lois seront amendées car elles servaient le parti au pouvoir et elles ne permettaient pas au parti d'opposition de participer à de vraies élections démocratiques. En plus de la liberté de la presse et d'expression, une amnistie générale sera décrétée pour que toutes les personnes emprisonnées pour leurs opinions soient libérées. Les personnes incarcérées conformément à la loi contre le terrorisme devraient être également libérées après examen de certaines dispositions de ladite loi. Répartition judicieuse des fonds Par ailleurs, les biens immobiliers que détenait le Rassemblement constitutionnel démocratique seront restitués à l'Etat. Les conseils régionaux seront dissous pour être remplacés par des comités qui regrouperont toutes les composantes de la société civile. Les gouverneurs seront tous changés. Le problème ne concerne pas la disponibilité des fonds, estime M. Chebbi, mais se situe au niveau de leur répartition judicieuse. L'Agence tunisienne de communication extérieure sera également dissoute après la suppression du ministère de la Communication pour garantir la liberté de la presse. En outre, des indemnités seront accordées aux familles des martyrs et des blessés de la révolution tunisienne. Les petits commerces et les vendeurs ambulants qui ont subi des dégâts lors de la révolution seront également indemnisés dans le cadre d'un fonds alloué à cet effet. Les chômeurs diplômés auront droit à une subvention de 150 dinars qui ne fait pas partie d'un fonds de chômage mais constitue une aide provisoire en attendant qu'ils trouvent un emploi. Les jeunes non diplômés seront employés dans les chantiers qui ne sont pas une solution radicale, selon le ministre.