«A nous notre propre Woodstock», lance un facebooker sur le mur de l'évènement créé le 1er février sur le réseau social qui mérite sûrement d'être considéré comme une sphère complémentaire à celle de la rue. «Un concert international en Tunisie en cours d'élaboration», voilà ce qu'on annonce aux internautes qui se réjouissent déjà à l'idée — en attendant qu'une date soit fixée et annoncée — et après les échos de «Loin des yeux, près du cœur», un concert de solidarité avec la Tunisie, qui a eu lieu le 31 janvier en France et dont les bénéfices seront versés au Croissant-Rouge tunisien. «Ce projet fait suite à un élan international d'artistes de toutes parts qui ont répondu à cette initiative pour démontrer un élan affectif pour ces nouvelles révoltes. Parmi eux, nous retrouvons Manu Chao, Lo Cor De La Plana, les frères Hakim, Fawzi El Aiedi, Amazigh Kateb, Danyel Waro, Zouhaier Gouja, Sorry Bamba et tant d'autres...». C'est ce qu'on peut lire dans la présentation, signée «Tunisie Musique». Ce label, également auteur d'un blog musical (buzz-tunisie-musique.com), a, à maintes reprises, essayé d'organiser un tel concert et même d'inviter des artistes encore inédits sur la scène tunisienne, mais a dû faire face au blocage de l'ancien ministère de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine et de ceux qui détiennent le monopole dans le milieu, qui leur mettaient constamment des bâtons dans les roues. Maintenant que de telles barrières semblent être levées, le concert international se prépare avec de grandes chances d'avoir lieu très prochainement. Les organisateurs ont, en effet, proposé le 31 mars comme échéance. Tout dépend des disponibilités des artistes entre lesquels il faut coordonner. Pour cet événement, «Tunisie Musique» voit grand, avec l'ambition de rassembler 50.000 personnes au stade d'El Menzah, pour toute une journée de fête, où la musique serait l'instrument et la parole de la «liberté», probablement le thème qui sera choisi pour l'occasion. Le choix des artistes est tout autant réfléchi. Les noms annoncés, et beaucoup d'autres encore en négociation comme Julia Boutros, sont ceux d'artistes connus pour être concernés par les causes humaines et pour avoir un message engagé. Ils seront pour la plupart issus de la scène underground mondiale et de toutes les influences musicales. Certains sont déjà venus en Tunisie, comme les Marseillais Lo Còr de la Plana, qui chantent en occitan provençal, invités de la dernière édition de Mûsîqât (festival des musiques traditionnelles et néo-traditionnelles). D'autres ne l'ont encore jamais été, même s'ils sont très prisés par une catégorie avertie du public tunisien, tels que le Français Manu Chao ou l'Algérien Amazigh Kateb, auteurs de projets musicaux à aspiration universelle. Sans oublier les artistes tunisiens, en particulier ceux qui ont rapidement réagi à ce qui se passe en Tunisie, comme Zouhaier Gouja, auteur de «Talvza» (télévision), une chanson qui dénonce les manipulations médiatiques des chaînes publiques et privées, après le 14 janvier. En tout cas, bon nombre d'entre eux se sont proposés d'eux-mêmes pour ce concert, pour exprimer leur soutien à une Tunisie libre. «C'est un élan», comme le confirment les organisateurs. Ils espèrent qu'on pourra, enfin, célébrer une joie qui a été, tant de fois, muselée et détournée.