Depuis trois jours, la Faculté des lettres de La Manouba est en agitation continue. Les agents de l'administration ont déclenché une grève, la deuxième, et observent un sit-in continu. Les étudiants de leur côté organisent une série d'assemblées générales. Et les enseignants cherchent des solutions pour sortir de la crise et retrouver les salles de classe. Au sein de la faculté, les groupes sont dispersés mais facilement identifiables. M.Mohamed Hédi Abbes, membre de l'administration et victime d'une agression, témoigne: «Un groupe d'étudiant m'a agressé. Ils m'ont demandé de quitter mon travail. C'est toute l'administration qui a été humiliée par les pratiques irresponsables et les agressions commises contre ces agents. Comparée aux étudiants et au corps professoral, l'administration a toujours été marginalisée. Nous sommes mobilisés depuis trois jours, et aujourd'hui, responsables, techniciens et agents de l'administration entament un sit-in ouvert. Notre demande est de retrouver le respect. A cette occasion, je déplore le comportement de quelques enseignants qui ont refusé de supporter notre action». Respect mutuel Contestant la marginalisation de certains enseignants, M Ali Dhaouadi agent administratif ajoute : «Ce matin, l'une des enseignantes m'a adressé des propos injurieux et elle nous a méprisés en disant «on va tout balayer». A ce titre, les contestataires ont rédigé un message de protestation à l'adresse du ministère de l'Enseignement supérieur». De son côté, Omar Salhi, secrétaire général du syndicat de base, rappelle : «On est reconnu pour la qualité de notre travail et notre persévérance. On veut garder un climat sain à l'université avec toutes les parties prenantes, administrateurs, enseignants et étudiants. On demande une intervention rapide du ministère pour faire régner le respect mutuel». Un peu plus loin, les étudiants organisent une assemblée générale rappelant les droits des étudiants et les acquis de la révolution de la jeunesse. Parmi les protestataires, M.Anis Ben Fraj, étudiant en troisième cycle, nouvellement libéré et qui proteste : «Sous le régime de Ben Ali on a été privé de notre droit à la réussite et avec ce gouvernement de transition on n'a même pas le droit à l'inscription. Notre demande légitime est bloquée par l'administration. Déjà le doyen de la faculté a refusé la réinscription des étudiants nouvellement libérés. Il est à préciser qu'il n'y a aucun lien entre le sit-in des agents de l'administration et l'agression présumée. Cette action a commencé depuis deux jours. Depuis longtemps on reprochait des pratiques frauduleuses et des comportements irresponsables de certains administrateurs. On a signalé tous les abus de pouvoir au doyen de la faculté». Un grand malentendu Représentant le corps professoral, Mme Fayza Derbel, chef de département de littérature anglaise suppose «qu'on assiste à un grand malentendu . Concernant les derniers événements, je souligne que tout le corps enseignant est solidaire avec l'agressé et tout le personnel de l'administration. Suite à cet incident, le conseil scientifique s'est réuni, d'urgence, pour analyser la situation et prouver notre soutien indéfectible à la victime. Lors de la réunion, nous avons discuté, également, des mesures et des actions à mener pour protéger toutes les parties prenantes de la faculté et assurer la continuité des cours». Pour estimer les répercussions de ces mouvements et les solutions possibles à cette situation critique, on s'est adressé à M Faouzi Mahfoudh, vice-doyen de la faculté qui a avancé ceci : «En guise de réaction à l'agression d'un fonctionnaire de l'administration, les agents de l'administration organisent un sit-in. Je comprends parfaitement leur action et je salue la solidarité des enseignants. Mais l'essentiel est de trouver les solutions pour dépasser l'incident et ses répercussions. Ce matin, les enseignants et les agents de l'administration ont tenu deux réunions et tout le monde s'est mis d'accord pour en organiser une troisième pour un arrangement à l'amiable entre toutes les parties, à savoir les étudiants, les enseignants et les administrateurs. Ainsi, le dossier sera clos. Pour ce qui est des étudiants nouvellement libérés, nous étions toujours coopératifs et nous assisterons leur réintégration à la faculté, sans aucune entrave. Mieux encore, tous les dossiers seront acceptés conformément à des critères purement pédagogiques et scientifiques, sans aucune discrimination. A l'heure actuelle, seulement deux dossiers d'inscription ont été déposés à l'administration. Il convient de rappeler que depuis toujours, la faculté des lettres de La Manouba a favorisé l'exercice de tous les droits et nous continuerons de le faire. De la liberté d'expression, au droit au rassemblement en passant par l'affichage, toutes les parties sont libres. Notre mission est de préserver une entente cordiale entre toutes les parties prenantes de la faculté».