Elle nous a quittés il y a peu, discrètement, comme elle avait vécu, mais après avoir bouclé le siècle. Trois mois plus tard, c'est de l'autre côté de la Méditerranée que lui est rendu le premier hommage. Il y a quelques jours, en effet, à Montreuil, dans l'est Parisien, était inauguré, à l'initiative de Dominique Voynet, le centre municipal de santé Tawhida Ben Cheikh . Peu après la célébration de la Journée de la femme, et dans ce quartier où l'on parle de désert médical, où l'on réclame aujourd'hui une justice sociale, ce choix n'était pas anodin. Car, qu'on s'en souvienne, pour les plus anciens qui l'ont connue, qu'on le sache, pour les plus jeunes qui savent seulement que Tawhida Ben Cheikh fut la première femme médecin de Tunisie, femme engagée et militante, elle lutta sa vie durant contre les injustices et l'inégalité sociale. Certes, son parcours de médecin fut un exploit unique pour la période, et le contexte : les années 39-49 ,dans un milieu bourgeois et un pays arabe. Elle participa activement au développement de la gynécologie obstétrique, au contrôle des naissances, côtoya les hommes, proposa des mesures innovatrices et pionnières, trouva des solutions humaines pour les femmes. Là était son combat et son honneur. Mais pas seulement, car on lui doit la création de nombreuses associations comme «La layette tunisienne», «La goutte de lait», ou encore «La maison de l'orphelin». Elle milita de longues années au sein du Croissant-Rouge dont elle fut vice-présidente, elle accompagna l'action du club de la jeune fille tunisienne en 1950, et s'active au sein de l'Union des Femmes Musulmanes. Elle est enfin de tous les combats, participe à la création de l'Ecole des sages-femmes, ouvre le premier service hospitalier de planning familial, et crée la première première clinique spécialisée dans le contrôle des naissances à laquelle elle donnera des succursales dans toute la République. Autant d'expériences uniques qui auraient pu remplir plusieurs vies, et qui, toutes, ont été réalisées dans la plus grande discrétion, avec humilité, abnégation et modestie. Aujourd'hui que nous apprenons à redécouvrir notre passé, que nous avons décidé de rendre justice à une histoire occultée, il est bon, il est juste de voir rendre hommage à ceux qui ont fait la vraie Tunisie. Même si cet hommage vient d'ailleurs