Il importe, maintenant, d'orienter l'esprit de la révolution, dans un sens mûrement réfléchi, et c'est le gouvernement provisoire qui doit nous le démontrer, au jour le jour, dans ses avancées, avant les élections du 24 juillet prochain. Les citoyennes et citoyens tunisiens vivent de plus en plus dans des désordres qui vont sans cesse s'aggravant et qui augurent peut-être d'un violent terrorisme prochain, dû à certains groupes extrémistes qui se sont mis à l'idée de casser cette révolution. Il nous faut surtout «inventer» l'avenir culturel du pays, parrallèlement à ce qui se reconstruit dans les domaines socioéconomique et politique où règne aussi la gabegie. Les spécialistes les plus autorisés de ce gouvernement, chacun dans son domaine, doivent nous exposer leurs points de vue et les actions qu'ils entreprennent sur le terrain, pour faire évoluer les choses. Or, concrètement, on ne voit rien venir sur le terrain. Monsieur le ministre de la Culture nous avait promis de fêter cette révolution «culturelle, artistique et de civisme». La vie de l'esprit, comme la prospérité matérielle (il faudra beaucoup de temps à celle-là pour être réalisée) exigent une politique de coopération dans tous les domaines et à travers toutes les régions, surtout celles des plus meurtries, depuis le 14 janvier. Il faut, bien sûr, que règne un certain ordre, que la société civile doit prendre à son compte à travers des meetings de solidarité pour cette révolution, sans heurts et sans arrière-pensées. La culture et les arts, notamment, sont les véritables paravents contre tous les ratages possibles, pour cette révolution qui ne sera que bénéfique pour tous, les citoyennes et citoyens de la Tunisie sans exclusion d'aucune sorte. Le théâtre, le cinéma, les arts plastiques, la musique, l'édition et les médias doivent se relayer tous les jours pour ancrer cet esprit de fête jusqu'aux prochaines élections. Cette révolution, ne l'oublions pas, est celle de la jeunesse. Une jeunesse magnifique que des esprits obscurantistes venus d'on ne sait où cherchent à étouffer dans leurs aspirations. La coordination scolaire et les problèmes universitaires, en prévision des examens, exigent une direction unique, capable de remettre de l'ordre pour une meilleure sécurité pour nos enfants. Depuis quelques semaines, des désordres de toutes sortes sont apparus et qui s'en prennent, notamment, aux arts et à la pensée. Une véritable censure pleine d'excès et parfois d'une violence inouïe. Pourquoi un tel mutisme dans ces domaines, alors que le gouvernement provisoire et en l'occurrence le ministère de l'Intérieur possèdent des renseignements précis en ce sens? Pourquoi le Président de la République ou le Premier ministre ne nous font-ils pas un bon discours pour nous annoncer qu'ils veillent au grain, pour une active défense de la liberté d'expression dans la rue, au café, au marché et même à la mosquée? Ce sont ces vérités-là qui ne sont pas démontrables et, qu'à force de taire ou de faire semblant d'ignorer, peuvent nous mener à notre perte dans la plus implacable des négations…