Le ministère des Affaires de la femme a organisé hier, et en collaboration avec l'Association tunisienne de droit constitutionnel, une rencontre portant sur le rôle de l'Assemblée nationale constituante dans la transition démocratique et la consécration du principe de l'égalité des chances. La rencontre, qui a eu lieu au siège du Crédif, a permis aux intervenants de porter une vision analytique sur la mission que se doit d'assurer l'Assemblée nationale constituante en tant que garant de deux principes-clés de la révolution populaire, à savoir la substitution du climat dictatorial par un autre, démocratique, fondé sur une liberté responsable et sur le droit à la différence et à l'expression. Un principe qui engendre un autre, utilisé pendant des décennies pour camoufler une discrimination sociale flagrante, à savoir l'égalité des chances entre les genres et entre les régions. La rencontre a été également l'occasion d'examiner les différents modes de scrutin et leurs éventuelles répercussions sur le projet démocratique. La rencontre a également permis d'examiner méticuleusement les différents systèmes de scrutin. Mme Lilya Laâbidi, ministre chargée des Affaires de la femme au sein du gouvernement provisoire, a mis l'accent sur l'importance du thème, en tant que thème d'actualité mais aussi de par son impact sur la situation de la femme et sur les perspectives de sa contribution dans l'édification de la nouvelle Tunisie. Présidant l'ouverture des travaux de cette rencontre, Mme Imène Bel Hadi, directrice du Crédif, a indiqué que la présente rencontre s'inscrit dans le cadre du nouveau programme du ministère des Affaires de la femme dans sa phase de transition. Elle vise, notamment, la diffusion d'une culture démocratique et citoyenne. Eviter les gaffes du passé Mme Saloua Hamrouni, universitaire et membre de l'Association tunisienne du droit constitutionnel, a traité la problématique d'un point de vue juridique, social, politique mais aussi historique. En effet, et pour mieux se focaliser dans le présent ou plus précisément dans le futur proche, fixant l'élection de l'Assemblée nationale constituante, Mme Hamrouni a établi une comparaison entre les actions accomplies par l'Assemblée nationale constituante de 1956-1959 et les lacunes à ne pas répéter dans l'élaboration de la nouvelle Constitution 2011. «En 1949, l'élite a dressé une liste fixant les principes généraux de la Constitution; des principes qui n'ont pas été respectés comme il se doit. C'est pourquoi, plusieurs associations ont recommandé, récemment, l'élaboration d'un pacte citoyen limitant le pouvoir de la prochaine Assemblée constituante et l'obligeant à respecter les principes préconisés par le peuple. Parmi ces principes figurent les droits de la femme qui ne doivent aucunement être réduits aux seuls acquis consignés dans le CSP», a souligné Mme Hamrouni. Elle ajoute, toutefois, que l'Assemblée nationale constituante, une fois élue, bénéficiera du plein droit d'instaurer la nouvelle Constitution. Le pacte citoyen n'aura pas pour autant une légitimité juridique. Il faut dire que l'Assemblée nationale constituante aura pour mission d'élaborer la nouvelle Constitution, d'établir de nouveaux textes de loi et de désigner un nouveau gouvernement provisoire. L'oratrice a insisté, dans son intervention, sur l'importance de réussir l'équilibre entre les pouvoirs, législatif et exécutif; un équilibre qui ne peut être assuré que grâce à un système parlementaire, fondé sur le principe de dualité, sur le contrôle et le suivi des actions accomplies par les pouvoirs. Cependant, le futur parlement est appelé à respecter le contrat de confiance qui l'unit au gouvernement mais aussi au peuple. «Le président de la République doit assurer l'arbitrage entre le gouvernement et le Parlement, empêchant ce dernier de commettre d'éventuels dépassements», insiste Mme Hamrouni. Autre point capital: il convient de mettre en place une Cour constitutionnelle qui se chargera du contrôle de la constitutionnalité des lois. L'oratrice a insisté également sur la nécessité, pour la nouvelle Constitution, d'imposer les droits de la femme. Scrutin et égalité des chances Prenant la parole à son tour, Mme Salsabil Klibi, professeur universitaire, a mis l'accent sur les différents systèmes d'élire l'Assemblée nationale constituante. Elle a jugé bon de rappeler les principes fondamentaux des élections, à savoir l'application du droit au vote pour tous les citoyens sans exception et loin de toute forme de discrimination, y compris pour les personnes analphabètes ou porteuses d'un handicap moteur; un droit basé sur le principe du libre arbitre et donc, loin de toute pression et de toute tentation. Elle a indiqué en outre que les candidats sont appelés à informer les électeurs de leur conception des principes à inclure dans la nouvelle Constitution. «Le candidat ne doit pas être considéré pour sa propre personne mais plutôt pour ses orientations et programmes», fait-elle remarquer. Mme Klibi a expliqué qu'il existe plus de 250 systèmes électoraux de par le monde et que seulement deux d'entre eux sont les plus utilisés, notamment le scrutin majoritaire et celui à la proportionnelle. Dans le premier cas, il s'agit ou bien d'un scrutin des individus (ou uninominal) ou bien d'un scrutin des places (ou plurinominal). Dans le premier, la chance d'être élu n'est accordée qu'à un seul vainqueur; un résultat injuste qui marginalise un grand nombre de voix. C'est pourquoi, il sera procédé à une élection à deux tours, et ce, dans l'optique de regrouper les voix sous forme d'une coalition politique entre les candidats.