L'acquisition des livres par le ministère chargé de la culture est une procédure "un peu longue, mais c'est garanti", soutient Mme Mika Ben Miled, éditrice. Et parlant de son cas précis, elle déclare : "C'est dès l'obtention de ces aides que je décide de porter un ouvrage à l'imprimerie. Ça limite les parutions, mais c'est ça être un petit éditeur". Mieux, l'IFC (Institut français de coopération) aussi a un programme de soutien aux éditeurs tunisiens. Une commission (annuelle ou bi-annuelle) décide de l'intérêt et du montant de la subvention de l'ouvrage présenté. "Il aide aussi à la réédition locale bon marché d'éditions françaises", souligne-t-elle. Certaines entreprises économiques se sont lancées, par ailleurs, dans la promotion du livre comme le Groupe d'assurance Comar. "Les Prix Comar décernés une fois par an, concernent uniquement les romans et récompensent les auteurs", nuance Mme Ben Miled. Des banques encouragent la culture. Un libraire de la place estime, cependant, que malgré les manifestations et les concours organisés, les livres primés ne sont pas toujours ceux qui sont les mieux vendus! Des organisations muettes Les autres institutions, ministères, instituts, universités, associations, municipalités, ambassades hésitent parfois à soutenir le livre… "Ces organisations restent muettes et n'accusent même pas réception des ouvrages qui leur sont envoyés en service de presse. Sauf dans des cas extrêmement rares" , fait remarquer Mme Ben Miled. Les organisations internationales, les centres culturels étrangers, "ne s'intéressent pas trop à l'édition tunisienne. Ils privilégient les auteurs de leurs pays qui ont le loisir de venir passer quelques jours en Tunisie pour faire leur propre promotion", souligne cette intellectuelle qui est bien placée pour juger la situation actuelle. La Foire du livre qui se tient une fois par an au Parc des expositions du Kram est considérée par de nombreux libraires et éditeurs comme une occasion pour relancer les ventes. "Cette manifestation, estime-t-elle, devrait changer son appellation de foire et devenir véritablement culturelle." Elle considère qu'il y a trop de stands style «marchands du temple» avec accumulation de livres religieux-gadgets ou de grands stands de livres français style «comment faire pousser votre gazon» ou «maigrir avec la cuisson au micro-onde»! La solution consisterait au regroupement des éditeurs tunisiens dans un même espace pour une meilleure communication. Faten, étudiante, déclare ne rater aucune édition de la foire du livre pour acheter les derniers bouquins, à prix abordables, qui ne sont pas toujours disponibles. Cependant, les distributeurs sont-il toujours en lune de miel avec les libraires ? "La diffusion-distribution du livre est une véritable profession qui consiste à prendre les ouvrages en dépôt, les stocker, les gérer, les promotionner et les déposer dans les librairies", constate l'éditrice. Partager avec le libraire En général, la marge est de 50% sur le prix de vente à partager avec le libraire. Mais cette profession n'est pas réglementée, et la plupart de ces distributeurs sont eux-mêmes éditeurs. Cela leur fait gagner le prix de la distribution."L'éditeur n'est pas tenu au courant des états de vente. Les librairies des localités de l'intérieur sont ignorées, malgré la proximité, à part Sfax, Sousse et Bizerte… et encore !" s'exclame-t-elle. Les grandes surfaces se sont mises de la partie en réservant aux livres un assez important espace de vente, "ce qui est estimable, l'acceptation de devenir fournisseur est impossible pour un petit éditeur". On sait que les librairies ne sont pas nombreuses, ont peine à subsister et leur nombre ne cesse de dégringoler, manque de rentabilité oblige. "Les librairies francophones à l'étranger bénéficient d'une aide du Centre National du Livre français. Cette aide est attribuée sous forme de crédits d'achat pour les publications françaises. (un fonds d'urgence pour les libraires tunisiens vient d'être créé récemment). Une des clauses spécifie que le prix de vente doit être équitable et adapté au marché, or on s'aperçoit que dans la plupart des cas, les prix en euros sont proposés en dinars au taux du change officiel". Cette méthode peut être adaptée chez nous.