Entourée de quelques-uns de ses collaborateurs, Laurence Haguenauer, directrice de l'Institut français de coopération, a présenté vendredi dernier lors d'une conférence de presse plusieurs volets de sa mission en Tunisie ainsi que les grandes lignes du programme culturel de l'année 2010. La coopération française en Tunisie s'inscrit dans le cadre d'un accord de partenariat global entre les deux pays et du dialogue euro-méditerranéen. Le Service de coopération et d'action culturelle (SCAC) de l'ambassade de France et l'Institut français de coopération (IFC) sont les deux instruments complémentaires au service de cette action dont le champ, très étendu, couvre les domaines allant de la coopération universitaire, scientifique et technique, à celle linguistique et éducative, et enfin à la coopération culturelle. Si, par sa vocation-même à s'adresser au grand public, l'action culturelle est bien visible et son impact médiatique certain, d'autres versants de cette coopération, plus pointus et qui mobilisent pourtant des moyens financiers et humains considérables, restent encore peu connus. «De ce fait, il nous a paru nécessaire d'accorder à ces dispositifs un éclairage particulier afin de mieux les faire connaître et d'en souligner la portée», a déclaré Laurence Haguenauer, directrice de l'Institut français de coopération, dans sa conférence de presse vendredi dernier. La rencontre avec les représentants de la presse tunisienne, en présence également des cadres de l'IFC chargés de la culture, de l'université, du centre de langue, de la médiathèque et de la communication, visait aussi l'annonce des grandes lignes du programme de l'institut pour les mois à venir. Un budget réduit de moitié, une stratégie réorientée Différents programmes de bourses s'adressent à divers publics : des enseignants-chercheurs en lettres et sciences humaines, des doctorants, des assistants, des maîtres assistants et des maîtres de conférences. Des rencontres et colloques scientifiques, des projets de recherche ainsi qu'une action de diffusion de la culture scientifique feront l'objet d'évènements importants. Avec Sciences en questions qui regroupe des rencontres sur le thème Passé, Présent et le cycle Penser la science, l'IFC renouvelle son partenariat avec le Collège de France. Ce cycle est organisé avec l'ensemble du réseau universitaire tunisien. Une nouveauté cette année: les conférences seront diffusées par visio-conférence dans certains établissements universitaires hors de Tunis (Kairouan, Sousse et Sfax). Au programme, parmi les prochains rendez-vous, Anne Cheng, historienne spécialiste de la Chine, intervient le 1er mars sur «Le Passé dans le présent de la Chine» et le 3 mars sur les «Figures de la sagesse dans la Chine ancienne». En 2010, l'IFC, en partenariat avec l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle et l'Institut national du patrimoine, poursuivra son action en faveur du patrimoine archéologique, de la recherche archéologique, de la mise en valeur des sites et de leur exploitation touristique et commerciale. Les chantiers de fouilles soutenus seront : Haïdra, Hergla, Utique et Djebel Oust. Un séminaire Malraux sur les produits dérivés du patrimoine sera organisé par l'AMVPPC et le ministère français de la Culture et de la Communication. Certaines manifestations scientifiques dans ce domaine pourront être soutenues par la prise en charge d'experts français et de stages de formation en France pour de jeunes archéologues tunisiens. C'est dans ce cadre-là que Michel Pierre, historien et directeur de la Saline Royale d'Arc et Senans, interviendra ce mercredi 24 au siège de l'INP sur les questions du patrimoine, de sa protection, de ses évolutions, de ses usages, une réflexion qui sera partagée avec des professionnels tunisiens, dont les architectes Saloua Trabelsi et Lotfi Bouzouita. La coopération culturelle veut toucher pratiquement l'ensemble des secteurs de la création et contribuer à la formation artistique du public. Parmi ses objectifs également, développer des actions visant à répondre à la demande croissante de formation et de professionnalisation du secteur culturel. Favoriser l'émergence de jeunes talents dans tous les domaines de la création par le lancement de bourses, de stages, d' ateliers et de missions d'information et de contacts. Soutenir la création tunisienne par des aides à la production ou à la diffusion d'œuvres. Enrichir le débat d'idées et le dialogue interculturel par l'invitation régulière d'intellectuels et d'auteurs français en Tunisie. Et proposer une offre documentaire à travers les médiathèques de Tunis, Sousse et Sfax. «Certes, en cinq ans, le budget de la coopération française a été réduit de moitié. Nous avons réorienté notre stratégie. Ce n'est plus à l'IFC de ramener une star comme Charles Aznavour ou les vedettes de l'humour français. Des professionnels du spectacle tunisien ont su bien investir ces créneaux. La preuve, “Tunis fait sa comédie” fonctionne sans l'IFC. Notre démarche aujourd'hui veut plutôt soutenir de jeunes chanteurs, des artistes au grand talent mais encore inconnus, des chorégraphes à la recherche d'une scène. Notre appui aux Journées de danse contemporaine, initiées en collaboration avec Mad'art et El Teatro, part de ce principe-là. Les barres de budget auront servi à mettre en place une stratégie plus rationnelle et plus efficace», affirme Laurence Haguenauer. Soutien à la future Cité de la Culture La directrice de l'IFC a par ailleurs annoncé que la médiathèque Charles-de-Gaulle ayant beaucoup vieilli, un projet de rénovation complète de ses locaux est actuellement à l'étude. Le nouveau bâtiment rassemblera sur les mêmes lieux tous les services de la coopération. La médiathèque ne fermera pas ses portes, a-t-elle souligné, le long du chantier qui durera deux ans. Elle se déplacera dans un autre local au centre-ville. Irène Bourse, l'attachée culturelle, a de son côté indiqué que dans le cadre de la structuration du paysage culturel par un soutien aux grands équipements tunisiens comme le Centre national des arts du cirque, le Théâtre National, le Centre méditerranéen de la danse contemporaine, le Musée du Bardo, l'IFC a organisé l'été dernier une série de rencontres à Paris entre deux des responsables tunisiens de la future Cité de la Culture et des directeurs de la Cité de la musique, du musée du Quai Branly, du Centre Pompidou, de l'Opéra et de la cinémathèque. Objectifs de l'opération : «Aider au transfert d'une expertise, permettre de déterminer les besoins en formation dans par exemple les techniques de son et de lumière et générer des partenariats bilatéraux». Dominique Bergouignon, chargé du livre et directeur de la médiathèque, a de son côté présenté le programme de soutien à l'édition tunisienne de langue française, qui concerne également les ouvrages traduits de la langue française ou vers la langue française. Nouveau: cette année l'appel à projet s'ouvre aussi au lancement de revues à contenu culturel francophone ou bilingue. D'un autre côté, le stand tunisien au Salon du livre à Paris recevra huit éditeurs tunisiens qui pourront prendre part à la rencontre franco-maghrébine sur la diffusion éditoriale Nord-Sud / Sud-Sud. Le design à l'honneur Laurence Haguenauer a signalé à la fin de la conférence de presse les rendez-vous phare de cette nouvelle saison culturelle. Côté cinéma, citons la manifestation Ciné-Club au CinémAfricArt tous les mercredis du mois de mars. Le cycle «Alain Resnais» sera enrichi d'une leçon de cinéma autour de son œuvre le 4 mars, animée par Jean-Michel Frodon. Du 1er au 5 avril : Mad'art programmera un cycle Eric Rohmer. Les moments forts des arts de la scène vont du spectacle tous publics Lettre d'amour de 0 à 10 (Compagnie L'Artifice 4-5-6 mars au 4e Art) à L'Oral et Hardi, une allocution poétique, textes de Jean-Pierre Verheggen, mise en jeu de Jacques Bonnaffé (Compagnie faisan production 7-8 avril – 4e Art) et à Seul en scène de Jacques Weber ( Théâtre municipal de Tunis et Médiathèque Charles-de-Gaulle 12-14 mars). D'autre part, le design et l'artisanat occuperont cette année dans la programmation une place de choix. Ainsi pendant le salon de l'artisanat (12-21 mars), l'IFC organise avec, entre autres, l'Office national de l'artisanat un colloque sur «Design et artisanat : les enjeux socioéconomiques et culturels». Y prendront part des professionnels tunisiens et français dont la talentueuse designer française Matali Crasset. Toujours en parallèle avec la tenue de ce salon, une première publication rendant compte du programme «Savoir et savoir-faire en partage», mis en place depuis 2008, sera présenté au public. «La Collection – vers une réunion d'objets nouveaux issus de l'artisanat et du design-Ateliers 2009, Tunisie» fera découvrir les travaux réalisés dans les ateliers d'artisans ou d'entreprises. L'ouvrage contient également une fiche guide pratique sur tous les évènements liés au design et à l'artisanat en Tunisie et dans le monde. Un instrument de travail très attendu. Avec le «Forum audiovisuel» organisé par l'ambassade de France à l'occasion des Journées cinématographiques de Carthage (du 24 octobre au 2 novembre 2010), l'année culturelle s'achève sur le signe de l'image.