Avant tout, il est utile de rappeler que les représentations rupestres sont d'une rareté étonnante en Tunisie. La région de Gafsa est réputée pour l'abondance des sites préhistoriques ayant livré des témoins très importants du paléolithique, comme le plus ancien «monument» cultuel mis au jour jusqu'ici sur terre : le fameux Hermaïon, datant de plus de 45.000 ans, découvert dans les environs de la localité d'El Guettar (gouvernorat de Gafsa) et aujourd'hui exposé au musée national du Bardo. Les autre sites préhistoriques, remontant à l'ère capsienne ou au néolithique, ont livré de nombreuses sculptures, pierres gravées, figurines en argile, coquilles d'œufs d'autruches peintes ou gravées, etc. L'art pariétal, par contre, ne semble s'être exprimé qu'à une époque plus récente. Dans une précédente livraison (voir «Vadrouille» du 25 avril dernier), nous avons pris connaissance de l'existence de cette forme d'expression artistique dans la préhistoire tunisienne. Voici aujourd'hui la présentation des principaux sites recensés par les chercheurs en Tunisie. Les premières peintures rupestres à avoir été repérées dans notre pays sont celles de Jebel Bligui. Elles ont été publiées en 1911 par H. Roux dans la Revue Tunisienne et par la suite étudiées par des chercheurs tunisiens, tels M. Jaafar Bennasr ou Mme Abdeljaouad. Les peintures au Jebel Bou Salem, situés dans les contreforts du massif de Zaghouan au sud de la localité de Saouaf (gouvernorat de Zaghouan), qui ont été découvertes et étudiées par le chercheur français Solignac, sont réparties sur deux sites, distants l'un de l'autre de quelques centaines de mètres, et comportent des représentations animales et humaines en peinture ocre. Certaines représentations montrent des animaux semi-sauvages, comme le fennec, avec un traitement très réaliste de la queue qui arrive à suggérer par contraste le volume de l'animal. D'autres dessins mettent en scène un mouflon dressé sur ses pattes arrière et un homme face à lui. Une autre représentation montre une forme humaine exagérément allongée. Ces gravures ont été exécutées pour le premier groupe sur les parois de grottes et, pour le deuxième groupe, sur une falaise. Elles n'ont subi aucune altération malgré leur maintien en plein air depuis des millénaires. Mais il serait peut-être temps de s'occuper de leur sauvegarde. Les sites de Jloula au jebel Oueslat comportent des peintures rupestres à représentations humaines suggérant le mouvement accompagnant un guerrier en pleine action. Le Sud tunisien a lui aussi livré des sites d'art rupestre néolithique très riche sous forme de gravures rupestres très originales et assez nombreuses (90 au total) découvertes dernièrement par Moussa Tababi sur le site de Doukène Jfara, à 3 km à l'est de Redeyef. Dans ce site, on découvre des gravures sur la paroi de la falaise ; d'autres sur la paroi d'un abri et sur un rocher le surplombant et ornés sur les trois faces de représentation diverses. Les gravures sont réalisées de face et représentent des silhouettes humaines ou animales, quelques-unes d'entre elles sont schématiques et même abstraites. Certaines gravures sont à contours continus avec des traits lisses et profonds. Des personnages debout semblent officier dans des cérémonies et portent des pagnes. Des animaux (bovins, autruches et autres chiens) animent la scène très néolithique. Ces gravures traduisent bien la richesse de la région de Gafsa en sites préhistoriques et surtout en matière d'art rupestre. Le site de Doukène Jfara est devenu la station la plus importante de gravures rupestres en Tunisie. L'art rupestre tunisien est surement de type atlassien relevant du style de Tazina (Aïn Tazina, en Algérie). Il est uniforme et se présente comme une unité artistique de la période néolithique. C'est une certitude. L'autre certitude est l'existence d'autres sites encore non découverts et très probablement au niveau de Jebel Zaghouan, par exemple.