Regards puisés dans un passé lointain : le célèbre piétonnier de l'avenue Habib-Bourguiba à Tunis aura accueilli, en janvier dernier, des meutes de manifestants aux couleurs de la «Révolution du Jasmin». De tels moments historiques réveillent en nous bien de vieux souvenirs, ces «morceaux d'hier qui ont oublié de s'en aller», dixit on ne sait plus quel humoriste. Rappeler que ce terre-plein central affichait, autrefois, dans les années 50-60, une animation souriante. Assurée, au mois de juin, par la confrérie des serveurs de café, en tenue professionnelle : veste blanche auréolée d'un nœud-papillon sur pantalon noir, ils se tenaient prêts, le jour J, une fois l'an, face à la ligne de départ, sous un ciel serein, leurs plateaux en main, étincelants, à un jet d'olive de la cathédrale de Tunis. Au programme de cette compétition originale, une marche à pied alerte. Au pas de course, comme on dit. Applaudie par la foule des spectateurs. La foule des grands jours. Ceux et celles qui ont aujourd'hui plusieurs décennies au compteur de leur état civil se rappellent sans doute cette épreuve. Celle-là même qui devait prendre fin au bout de cette voie centrale, là où s'élève, depuis un certain temps déjà, une espèce de cône version 1987, soi-disant décoratif. En fait, plutôt tristounet. De quoi souhaiter voir rebondir, en lieu et place, la belle statue du leader Habib Bourguiba, vaillant sur son cheval, hélas repoussée, vite fait, vers La Goulette, par l'ex-président Ben Ali. Petite précision : cette course originale, assurée autrefois par ces sympathiques serveurs, aura sombré à cause de ces censeurs de joie. Conclure que sans le moindre show, Tunis végète encore, escortée par le rituel banal, du genre «circulez, y a rien à voir». Aussi, nous manque-t-il encore bien des «récréations» festives qui ajouteraient, au profit de nos compatriotes et de nos touristes, un peu de sel à des séjours terre à terre. Pour que les vacances sous le bleu ciel tunisien ne ressemblent pas à de mornes vadrouilles. Au final, souhaiter voir rétablie dans ses droits cette course spectaculaire de cafetiers. Attendre se dit espérer. Ce serait pour leur plaisir, le nôtre aussi. Et place à la séance vraiment unique pour que vivent les vacances… au «boulot».