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La révolution tunisienne dans la presse internationale
Kiosque internationale
Publié dans Le Temps le 25 - 01 - 2011


Le Monde
(Ben) Ali Baba et les 40 voleurs
4 Janvier 2011. Défrayant la chronique et déchainant les passions, ce calme et si paisible pays qu'est la Tunisie, peu ou prou connu pour ses revendications ou son agitation sociale, a accompli ce qu'aucun pays maghrébin n'était, jusque-là, parvenu à réaliser. Sonnant le glas d'un régime dictatorial et mafieux, le peuple tunisien, si souvent accusé de laxisme et de désinvolture, a clamé sa soif de liberté et renait aujourd'hui de ses cendres après tant d'années de souffrance tacites.
Le spectateur non averti n'a pu qu'être surpris de la rapidité et de la tournure des évènements : en une semaine, c'est un Ben Ali qui a perdu toute sa superbe et son arrogance qui a fui rejoindre la terre des wahhabites, tendance idéologique qui l'a pourtant horripilé durant ses années de règne durant lesquelles la lutte contre l'islamisme était la clé de voûte de sa politique. Belle ironie du sort. Puis une succession d'évènements politiques des plus déconcertants : un Mohammed Ghannouchi — ex-premier ministre sans charisme ni envergure qui a toujours été une marionnette de l'Ancien Régime — nommé président par intérim, puisant une légitimité plus qu'usurpée dans l'article 56 de la Constitution qui ne s'applique qu'en cas d'«empêchement provisoire» du Président. Manque de chance, les Tunisiens ne considérant pas que le départ précipité et risible de Ben Ali soit provisoire, mais bel et bien définitif, c'est un autre article (57) de la Constitution qui est utilisé, et un nouveau président par intérim, Fouad Mbazaa (ex-Président de l'Assemblée Nationale) qui assurera ces fonctions.
C'est dit, l'odeur enivrante du Jasmin a recouvert les miasmes moribonds de la dictature et les Tunisiens se sont libérés de leurs chaines et ont brisé le tabou qui planait sur les exactions innommables commises par le clan des Trabelsi largement soutenues par Ben Ali, qui ont ensemble, main dans la main, accumulé une fortune s'élevant à plusieurs milliards de dollars selon le magazine Forbes, renfloué par le lourd tribut que les Tunisiens ont dû payer.
Il s'agit néanmoins, malgré l'euphorie de ces moments historiques que nous vivons, d'avoir un minimum de recul. Ben Ali est tombé, mais les «40 voleurs» peinent à suivre. Je ne rentrerai pas dans des détails que toute personne intéressée par les évènements a suivi avec engouement, mais en tant que Tunisienne résidant à l'étranger et regrettant très ardemment de ne pas avoir pu prendre part aux manifestations de protestation ni avoir pu laisser éclater ma joie à l'avenue Bourguiba, je tiens à dire à quel point je suis fière de mon peuple qui a su prouver avec éclat comment la dictature n'est qu'éphémère, que la Liberté a un prix que le peuple a lourdement payé, mais plus encore, que les pays maghrébins ou moyen-orientaux ne sont pas éternellement condamnés à vivre dans un carcan autocratique et ployer l'échine devant les dirigeants avides de pouvoir, quitte à écraser quiconque élèvera la voix.
Toute instrumentalisation de cette révolution sera balayée par le peuple tunisien et le spectre de l'islamisme, loin d'être une chape de plomb inévitable, n'est qu'un mirage sans fondement que nombre d'intellectuels bien-pensants se sentent dans l'obligation d'agiter. Je le dis et le répète : il y a en Tunisie autant d'obstacles à l'islamisme que d'habitants. Le Code du Statut Personnel, qui garantit les Droits inaliénables de la Femme, y est tout autant respecté, voire adulé, que ne l'est la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen en France.
Quand le doux vent de la Liberté souffle dans les rangs de mes compatriotes, il ne s'arrête pas là, générosité et sens du partage obligé. Force est de constater que du Maroc au Yémen en passant par l'Algérie et l'Egypte, la population trépigne et les gouvernements ont tous, sans exception, pris des mesures afin de calmer d'éventuels soulèvements de la population. Mais nous, Tunisiens, avons un destin lié à tous ces peuples frères, et nombre de dirigeants sentent la rancœur et la colère populaire gronder et s'élever inexorablement.
Alors un conseil aux gouvernants de toutes contrées qui se sont assis sur un «trône» et œuvrent par tous les moyens à y demeurer, quitte à bafouer toutes les libertés individuelles au passage : votre trône se transformera en siège éjectable alors ne suivez pas l'exemple de notre si peu regretté Ben Ali et prêtez une oreille attentive aux attentes de votre Peuple, avant qu'il ne soit trop tard. Nos pays regorgent de jeunes talents qui ne demandent qu'à s'exprimer librement et participer avec ardeur à la construction de leur pays. Ni les Etats-Unis ni vos prétendus alliés européens ne vous tendront la main ou ne vous accueilleront à bras ouverts sur leurs terres lorsque vous vous retrouverez dos au mur, ou à bord d'un avion sans destination connue, errant dans les cieux et se heurtant au refus d'un Sarkozy ou d'un Obama, perdu entre la Sardaigne et Jeddah…
Aïcha Hanane Gaaya, Etudiante à Sciences Po Paris
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Le Figaro
Quand un policier demande «pardon» à la foule
Nombreux sont les Tunisiens à avoir rejoint les rangs de la police par obligation financière, plus que par choix.
«Flics opprimés ! Flics sacrifiés !», gronde le nouveau slogan. D'une traite, tous les yeux se tournent en direction du petit groupe qui vient de se greffer au flot habituel des manifestants de l'avenue Bourguiba. Des policiers de l'ancien régime ! Les fameux «chiens» de Ben Ali, si redoutés des Tunisiens pour leur violence à toute épreuve.
Casquette vissée sur la tête, un agent de police en blue-jean ose le «mea culpa» en public. Il s'appelle Nejib. C'est son premier bain de foule sans matraque. «J'ai honte d'avoir malmené mes frères ! Aujourd'hui, je suis là pour vous demander pardon !», lâche-t-il, en s'agrippant au bras de sa femme, Dhekra. Les regards se figent, à la fois curieux et hésitants. L'épouse au visage encadré d'un foulard surenchérit : «Mon mari est une victime de l'ancien régime, comme vous !» Un essaim de badauds se resserre autour du couple. Ils veulent en savoir plus. «J'ai 32 ans et j'ai rejoint la police il y a neuf ans. En Tunisie, si t'as pas le bac et pas de piston, c'est la seule institution qui te donne du boulot», raconte Nejib.
Ils sont nombreux, comme lui, à avoir rejoint les rangs de la police - estimée à 140.000 hommes -, par obligation financière, plus que par choix. Le tout pour un salaire de misère qui tourne autour de 400 dinars (environ 200 euros) par mois. «Ma caserne, dans le quartier de Bardo, c'est comme une grande prison. Tu es l'esclave de tes chefs, 24 heures sur 24. La journée, on t'envoie faire l'agent de circulation pendant douze heures d'affilée. Parfois, on te réveille en pleine nuit pour aller mâter les hooligans à la sortie d'un stade de football Et puis, dans ta vie privée, on contrôle tes moindres faits et gestes. Par exemple, tu ne peux pas sortir de Tunis sans autorisation préalable», poursuit-il en oubliant qu'il peut désormais parler au passé.
Delphine Minoui
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Le Parisien
La société tunisienne fait sa «perestroïka»
Après des années passées sous une chape de plomb, les médias tunisiens découvrent la liberté. Dans la rue, les manifestations continuent contre le gouvernement.
Hier devant les bureaux du Premier ministre, des milliers de manifestants venus de localités rurales demandent le départ du gouvernement de transition.
Le gouvernement transitoire résistera-t-il à la pression de la rue ? Après une semaine de manifestations dans la capitale et plusieurs villes du pays, des milliers de personnes assiégeaient, hier soir à Tunis, le palais de la Kasbah, siège des services du Premier ministre. «On restera jusqu'à ce que Mohamed Ghannouchi et les autres dégagent ! » promettait la foule, alors que la centrale syndicale UGTT appelle à la grève générale dans les établissements scolaires qui devaient rouvrir ce matin.
Parmi les protestataires, nombre de jeunes, partis samedi de localités rurales du centre-ouest (Sidi-Bouzid, Regueb, Kasserine) en une caravane de la libération sur la capitale, assuraient de passer la nuit là. Pour la première fois, ils osaient braver le couvre-feu.
Pascale EGRE
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Le Figaro
Où va la Tunisie ?
Le brutal effondrement du régime Ben Ali laisse un vide béant derrière lui. D'ici aux élections de l'été prochain, les Tunisiens doivent s'inventer un système politique.
Voici encore quelques semaines, si les bookmakers français avaient pris des paris politiques, la cote d'un renversement de Ben Ali aurait été sacrément élevée. En tout cas, beaucoup plus que pour d'autres dirigeants arabes, que diplomates et experts estimaient infiniment plus fragiles que lui. C'est bien parce que le chef de l'Etat tunisien paraissait solide que le gouvernement français, Elysée inclus, a été pris de court par la fuite précipitée de Zine el-Abidine Ben Ali. Et ce qui valait pour Paris valait dans l'ensemble du monde arabe, que le séisme de Tunis a assommé.
Le peuple tunisien a réussi la première révolution arabe. En manifestant dans la rue, en bravant une répression sanglante (au moins 80 morts), en luttant contre des médias qui débitaient leur propagande officielle, les foules ont fait tomber le régime. Ces Tunisiens, des jeunes pour la plupart, ont opposé un démenti à une vieille maxime arabe rabâchée par tant de spécialistes de la région : plutôt soixante ans de tyrannie qu'une seule journée d'anarchie.
Une semaine après la chute de l'autocrate, la Tunisie rappelle à bien des égards les «démocraties populaires» d'Europe centrale quand elles se sont débarrassées du joug communiste voilà plus de vingt ans - il ne s'agit pas ici d'idéologie, mais bien d'une brutale vacance du pouvoir. L'exécutif en pleine débandade, l'appareil d'Etat discrédité, le parti unique effondré, les forces de l'ordre honnies et, surtout, une opposition incapable d'assurer la relève dans l'immédiat. Faute d'élus (mêmes locaux), de structures, de militants, d'hommes d'expérience, il n'existe pas de relève «naturelle» au Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), l'épine dorsale du bénalisme, qui structurait le pouvoir sur le territoire tunisien. «Quand on parle d'opposition organisée, dit Eric Gobe, directeur scientifique à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (Iremam) d'Aix-en-Provence, celle-ci ne compte guère que 300 à 400 universitaires et avocats. Des chiffres beaucoup trop modestes pour parler de base politique.» Cet expert de la Tunisie, qui a suivi la crise de bout en bout, n'a pas non plus vu émerger de figure de proue du mouvement qui a démarré en décembre. La génération Twitter-Facebook n'a pas (encore) fait naître de leader qui incarnerait ses attentes et ses revendications. L'après-Ben Ali surgit donc du chaos. Une avocate tunisienne qui ne verse pas de larmes sur la fin du régime raconte que les discussions entre juristes s'animent autour de la méthode à adopter. «Les uns, dont je fais partie, dit-elle, exigent que l'on fasse table rase, que l'on évince les gens du RCD du nouveau gouvernement. Les autres prônent une transition moins radicale et pensent qu'il est plus prudent de conserver d'anciens cadres pour gouverner le pays jusqu'aux prochaines élections.» Ce débat de fond pourrait bien être tranché dans la rue. On en a eu un avant-goût mardi et mercredi dernier : des manifestants sont descendus dans les rues de Tunis et d'autres villes du pays pour protester contre la présence de fidèles de Ben Ali à des postes clés du nouveau gouvernement. Quatre ministres issus de l'opposition ont d'ailleurs présenté leur démission pour dénoncer cet état de fait.
Cherchant à calmer le jeu, ces ex-bénalistes ont eu beau renoncer à leur carte du RCD, la manœuvre n'a pas convaincu. D'autant moins que les personnalités en question étaient très proches du président déchu et que de lourds soupçons pèsent sur eux. «Ces portefeuilles auraient pu être confiés à des politiques au profil de techniciens, regrette Eric Gobe. Or, on trouve parmi eux des types très marqués, des idéologues du régime. C'est inquiétant.»
- La place future de l'islamisme
On le voit, la période de transition qui vient de s'ouvrir en Tunisie s'annonce tendue et imprévisible. Selon le calendrier retenu, les élections - présidentielle et législatives - devraient se tenir en juillet prochain. D'ici là, la nouvelle scène publique tunisienne va prendre forme. Au gré des retours d'exil, des libérations de prisonniers politiques, des constitutions de partis, d'associations, etc., les citoyens vont se retrouver face à une offre pluraliste.
La grande inconnue reste la place future de l'islamisme. Rached Ghannouchi, figure historique de cette mouvance en Tunisie, en exil à Londres depuis vingt ans, a annoncé qu'il ne briguerait pas la magistrature suprême mais que son parti, Ennahdha, présenterait des candidats aux législatives. Eric Gobe pense que ce scrutin pourrait faire des islamistes le premier parti du pays, sans pour autant leur attribuer une majorité absolue. «Chez les avocats, note-t-il, enclave démocratique dans un régime autoritaire, ils ont régulièrement remporté les élections professionnelles.» D'autres soulignent que la génération qui a fait la «Révolution de jasmin», des étudiants ou de jeunes diplômés nés et éduqués sous Ben Ali, n'a aucune envie d'échanger une dictature contre un régime de «barbus»...


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