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La prise de Tripoli, une victoire d'Al-Qaïda ?
Géopolitique
Publié dans La Presse de Tunisie le 04 - 09 - 2011

La Libye du colonel Kadhafi était le modèle le plus achevé de cet arbitraire absolu des despotes arabes (Ben Ali, Moubarak, Al-Assad, Saleh), puisque le Guide avait abandonné toute responsabilité institutionnelle pour mieux se forger un système à sa mesure. La fiction du "pouvoir des masses", supposée irriguer la Jamahiriya libyenne, valait en fait blanc-seing aux sinistres "comités révolutionnaires" dans l'oppression quotidienne de la population. Le dictateur de Tripoli, qui cachait ses talents de manœuvrier sous ses foucades médiatisées, était ainsi parvenu à surpasser tous ses pairs despotes, avec plus de quarante et un ans de pouvoir sans partage. Cette résilience lui valait force inimitiés et son seul véritable allié arabe était le président tunisien Ben Ali. A la chute de ce dernier, Kadhafi a publiquement menacé la révolution tunisienne dès sa victoire du 14 janvier 2011. Les nostalgiques du benalisme savaient pouvoir compter sur l'appui agressif de la Jamahiriya, et même les militaires égyptiens s'alarmaient des visées contre-révolutionnaires de leur voisin libyen sur leur territoire. La chute du régime de Tripoli lève donc une hypothèque grave à l'encontre des expériences tunisienne et égyptienne. Elle permet surtout au peuple libyen de renouer avec sa propre histoire, suspendue par le putsch du Colonel en 1969. C'est sous le "drapeau de l'indépendance" que la rébellion a combattu, non pas pour restaurer l'ancien régime monarchique, mais pour rétablir la nation libyenne face au tyran qui l'a spoliée.
La fête de la prise de Tripoli n'est pas finie que les premiers effets de la gueule de bois se font sentir, de Tunis à Alger et d'Alger au Caire.
En effet, deux constatations importantes peuvent être relevées. Primo, les principaux commandants militaires de la rébellion sont connus pour leur appartenance à Al-Qaïda. Deuxio, lorsque les rebelles entrent dans une ville, ils ne crient pas «vive la Libye» ou «vive la liberté», encore moins «vive la démocratie» ou «à bas la dictature», mais un seul slogan «Allahou Akbar». De plus, cette révolution a commencé à Tobrouk à 15 kilomètres de la frontière égyptienne, avec des gens qui, d'un seul coup, ont sorti des canons et des mitrailleuses. Ils ne les avaient pas cachés sous leur lit pendant 40 ans. Quelqu'un leur a bien fourni. Suivez mon regard…Quand Kadhafi disait : «C'est Al-Qaïda qui est contre moi», il en rajoutait évidemment, mais sur le fond, il n'avait pas tout à fait tort. C'est quelque chose qu'il va falloir assumer.
Comme le précise S. Ben Farhat en page 8 de La Presse du 28/08/2011, l'un des chefs militaires rebelles, aujourd'hui gouverneur militaire de Tripoli est un ancien djihadiste. Il s'appelle Abdel Hakim Belhadj, connu par la CIA sous le nom d'Abou Abdallah Al-Sadek, «il est l'un des fondateurs et même l'émir du Groupe islamique combattant libyen (GICL), une formation ultra-radicale qui, dans les années précédant le 11 septembre 2001, possédait au moins deux camps d'entraînement secrets en Afghanistan», rapporte le journal français Libération. La plupart des postes de commandement militaire de la nouvelle Libye (Tripoli, Benghazi, Derna…) seraient aussi aux mains d'anciens du GICL.
Abd Al-Hakim Belhadj et ses groupes de combat islamistes, forts de 1.000 hommes, ont pris le contrôle de bastions clés des partisans de Kadhafi à Tripoli et ils refusent maintenant de transférer le pouvoir au Conseil national de transition soutenu par l'Occident, ce qui conforte les accusations selon lesquelles les opérations de l'OTAN pour changer le régime en Libye ont abouti à la création d'une nouvelle base pour le groupe terroriste Al-Qaïda.
Il paraît donc extraordinaire que «la libération» de la Libye fut le résultat d'une alliance de fait entre l'OTAN et les extrémistes islamistes, censés être les ennemis irréductibles de «l'Occident croisé». En nous référant à des précédents historiques proches (voir notre article dans La Presse du 19/08/2011. L'attentat du 11/09/2001, à qui a profité le crime ?), nous pouvons facilement l'expliquer. Il ne faut pas non plus oublier la sourde bataille que se livrent les puissances entre elles pour contrôler l'or noir libyen, le plus important du continent africain. D'une part, l'OTAN contre la Russie et contre la Chine, et d'autre part, au sein de l'OTAN, les E.U. contre l'Europe et contre la Turquie.
Qui est le Groupe islamique combattant libyen (GICL) ?
Dans les années 2000, le GICL était le représentant exclusif d'Al-Qaïda en Libye. «Une grande partie de ses militants tentera de renverser le régime de Kadhafi pour lui substituer un Etat islamique. Des actions terroristes ont ainsi eu lieu à l'intérieur du pays. Les services de sécurité libyens ont, notamment, réussi à déjouer une tentative d'attentat dirigée contre le Colonel, avant que ce dernier n'entame une lutte sans merci contre le GICL et, chose impensable auparavant, des liens ont été noués avec les services de renseignement occidentaux pour lutter contre la nébuleuse Al-Qaïda», écrivait le journal algérien L'Expression en 2007 dans un article sur la progression d'Al-Qaïda dans le Maghreb et notamment son implantation en Libye. Arrêté et interrogé par la CIA à Bangkok en 2003, Abou Abdallah Al-Sadek est livré au régime Libyen et enfermé par le régime de Kadhafi. Ironie de l'histoire, le leader du GICL et deux de ses principaux lieutenants feront partie des 214 militants emprisonnés libérés par la Libye en mars 2010 dans le cadre d'un programme «de dialogue et de réconciliation» mis en place par Saif Al Islam, le fils de Kadhafi. La réconciliation aura été de courte durée. Un an plus tard, il rejoint l'insurrection. Fin juillet, le New York Times rapportait que les «services de renseignement américains, européens et arabes étaient inquiets de l'influence que les anciens du GICL pourraient exercer en Libye après le départ de Kadhafi. Les services tentent d'évaluer leur influence et les liens persistants avec Al-Qaïda». Rappelons enfin que le GICL était très présent sur le terrain en Irak en 2003 au moment de l'invasion américaine. Abdelhakim Belhadj a mené les combats à Djebel Nefoussa avant de rentrer avec les combattants à Tripoli. Ces islamistes du GICL sont accusés d'avoir assassiné le général Abdelfattah Younes, fin juillet 2011. La prise en main de l'armée libyenne par les islamistes a été attendue et n'était pas une surprise. Le président du Conseil national n'a pas pu se rendre pour l'instant dans la capitale libyenne, craignant l'insécurité. Mustapha Abdeljalil n'est pas seulement menacé par les partisans de Kadhafi mais également par ceux qui ont assassiné le général Abdelfattah, selon des sources proches du CNT. Lorsqu'on leur a demandé s'ils prévoyaient de céder le contrôle de Tripoli au CNT, les représentants du GICL ont rejeté la question. Les institutions gouvernementales libyennes à Tripoli ont les mains liées aux brigades de combat islamistes, qui sont armées jusqu'aux dents, et qui disposent en plus du matériel informatique saisi dans les arsenaux de Kadhafi.
Maintenant que le GICL, branche active d'Al-Qaïda, est devenue une composante incontournable, et des plus crédibles sur le sol libyen, quelles vont être les attitudes des chancelleries occidentales et arabes ?
La Tunisie. «La fragile situation sécuritaire que connaît actuellement le pays et l'absence relative de stabilité pourrait faire de la menace terroriste un risque bien réel pour la sécurité de l'Etat tunisien», a déclaré le rapporteur spécial des Nations unies pour les droits de l'Homme et la lutte contre le terrorisme, Martin Scheinin, le 26 mai à l'issue de sa visite de cinq jours en Tunisie. Des sources sécuritaires tunisiennes ont affirmé que des affrontements entre des soldats de l'Armée tunisienne et un groupe de terroristes ont eu lieu dans la nuit du vendredi 19/08/2011 dans les régions de Kébili et Tataouine, au sud-est de la Tunisie, près de la frontière avec l'Algérie. La même source indique que les terroristes seraient venus d'Algérie. Les affrontements ont fait plusieurs morts, notamment parmi les terroristes qui se déplaçaient dans un convoi AQMI composé d'une quinzaine de véhicules chargés d'armes. Les blessés ont été transférés à l'hôpital de Tataouine. Les militaires tunisiens ont, par le passé, arrêté des terroristes et saisi des armes dans cette région. Il faut rappeler qu'au mois de mai dernier, les policiers tunisiens avaient arrêté deux Libyens en possession d'une bombe artisanale dans la région de Tataouine. N'oublions pas non plus les actes terroristes de Rouhia.
Rappelons par ailleurs, et sans commentaire, ce que rapporte le fameux site WikiLeaks. Dans le rapport sur un détenu tunisien à Guantanamo et révélé par WikiLeaks, il est indiqué que cet homme faisait partie de la «branche armée d'Ennahdha». Voici la traduction d'une note sur Ennahdha, en bas de la page 5. "Note d'analyste: Ennahdha a été créée en 1979 par Rached Ghannouchi. À la fin des années 1980, ce mouvement a réussi à s'infiltrer dans certains secteurs du gouvernement tunisien, y compris l'armée, la police et des établissements universitaires. Après leur interdiction par les autorités tunisiennes en 1992, la plupart des membres clés d'Ennahdha a fui en exil. Profitant de l'asile politique, en particulier au Royaume-Uni, ils ont tenté d'établir des liens avec d'autres mouvements radicaux, tels que le Front islamique du salut (FIS), le GIA et GSPC, algériens, ainsi qu'Al-Qaïda. En outre, ils se sont organisés en deux mouvements, le FIT et le GCT (voir l'IIR 6 897 0022 03)". En attendant que WikiLeaks parvienne à publier cet IIR 6 897 0022 03, rappelons ce que sont le FIT et le GCT. FIT : Front islamique tunisien : Al-Jabha Al-Islamiya Al-Tounsiya. Ce groupe maintiendrait des liens étroits avec le GIA. GCT, Groupe combattant tunisien (Al-Jamaa Al-Mouqatila Al-Tounsiya ). FIT et GCT, comme le GICL libyen, seraient affiliés au Front islamique mondial pour la djihad contre les Juifs et les Croisés (Al-Jabhah Al-Islamiya Al-‘Alamiyah li-Qital Al-Yahud wal-Salibiyyin), créé début 1998 par Ben Laden, et qui couvre les mondes arabe et musulman.
L'Algérie. Le voisin le plus inquiet, et à juste titre, est l'Algérie. Elle marche sur des œufs, pour de multiples raisons. Elle avait accusé Kadhafi d'armer les terroristes. Elle a aussi vu d'un très mauvais œil l'arrivée de l'OTAN et de l'armée française à ses frontières. Son gouvernement redoute que le chaos libyen ne puisse être exploité par Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). AQMI a d'ailleurs précisément revendiqué récemment de nombreux attentats en Algérie. L'Algérie qui partage plus de 1.000 kilomètres de frontière, en plein Sahara, avec la Libye, se relève encore d'un long conflit avec les activistes islamistes dans les années 1990. Rappelons quels sont les principaux acteurs islamistes algériens, impliqués dans le terrorisme. FIS, Front islamique du salut, formation politique algérienne militant pour la création d'un Etat islamique, dissoute en mars 1992. Le FIS s'est engagé dans une lutte armée contre l'Etat, ce qui causera la guerre civile de 1991 en Algérie (plusieurs centaines de milliers de morts). Ils sont à l'origine de l'assassinat de plusieurs intellectuels et artistes algériens. L'assassinat du président algérien Mohamed Boudiaf a marqué la fin irréversible du printemps démocratique algérien et le début de la dictature militaire. (Figures emblématiques : Ali Belhadj et Abassi Madani). GIA : Groupe islamique armé: organisation terroriste liée au FIS et proche d'Al-Qaïda. Elle a pour but l'instauration d'une dictature théocratique. Elle est responsable de la mort de 100 journalistes algériens, et d'attentats en France et en Algérie (au total plus de 1.000 victimes). GSPC : Groupe salafiste pour la prédication et le combat : Branche d'Al-Qaïda au Maghreb. Le 25 janvier 2007, le GSPC est devenu AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique). Si les racines de l'AQMI se trouvent en Algérie, la zone d'opération s'est étendue à tout le Maghreb et à tout le Sahara, du Sénégal à la Libye, en passant par la Mauritanie, le Mali et le Niger. Suite aux retombées de la crise libyenne, une militarisation accélérée de l'AQMI a été relevée ces derniers temps. «Une prolifération sans précédent des armes lourdes dans la région est constatée en ce moment», ont prévenu à Paris des participants à un séminaire (juin 2011) ayant pour thème «La crise libyenne : conséquences et répercussions sur les voisins africains». En ce mois d'août 2011, AQMI paraît reprendre son souffle et fait parler d'elle après s'être un temps éclipsée des devants de la scène. Cette réapparition, les experts en terrorisme l'attribuent en partie à l'acquisition par AQMI d'importants lots d'armes lourdes issues des stocks libyens et par le recrutement de nouveaux combattants dans les rangs des jeunes Sahéliens désœuvrés et des mercenaires africains fuyant la Jamahiriya. D'où l'inquiétude générale des pays sahéliens et maghrébins.


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