Pour cause de Révolution, le voyage sur terrain des étudiants de l'Institut supérieur des technologies de l'environnement, de l'urbanisme et du bâtiment (Isteub) a été annulé. Imène Zaâfrane, architecte, urbaniste et paysagiste, Olfa Ben Medien et Thouraya Meftah, urbanistes, toutes enseignantes à l'Isteub, décident alors avec l'adhésion totale des étudiants de mettre la Révolution au cœur de leur projet d'études. L'exercice a consisté à retracer le parcours effectué par les manifestants le 14 Janvier 2011, depuis la place Mohamed Ali jusqu'à l'ex-place 7 Novembre. Ce jour-là, les manifestants se sont appropriés l'espace public. Enfin, la foule "crée son espace public d'expression propre en lieu et place de celui du contrôle policier et de la consommation marchande", écrit Thierry Pacquôt, philosophe de la ville. Le parcours, reconstitué selon un ordre chronologique par Imène Zaâfrane, a été jalonné d'obstacles. D‘abord le barrage constitué par la police à l'entrée de l'avenue, face à l'ambassade de France et qui a été forcé après une lutte au corps à corps. Les manifestants sont ensuite passés devant le Théâtre municipal où ils ont été rejoints par les artistes. La foule s'est alors dirigée vers le ministère de l'Intérieur devant lequel elle a crié à l'infini "Dégage !". La pression des groupes de protestataires à cet endroit a été telle qu'ils ont débordé sur les rues adjacentes. Des manifestants ont escaladé les lampadaires, d'autres la façade du ministère. Trois projets des urbanistes en herbe ont été présentés devant un jury à la mi-juin dernier. Des projets fertiles en idées innovantes. Certains ont choisi de relier les diverses séquences de la mémoire par un calepinage particulier, des modules en béton coloré, des éclairages spéciaux, des parcours évoluant du végétal au minéral…D'autres marqués par l'image des manifestants agrippés aux grillages du ministère ont choisi de prévoir une double peau sur les murs du bâtiment en question sur lequel ils incrusteraient des personnages en fil de fer. Il serait intéressant d'exposer ces travaux dans un endroit aussi stratégique pour la ville de Tunis que la galerie de l'Information. Mieux encore : rêvons qu'un jour le meilleur de ces projets sera réalisé pour nous prémunir contre l'oubli.