"Hymne à la liberté", un slogan bien gros qui évoque le mariage de la musique à une sensation nouvelle et salvatrice en Tunisie qu'est la liberté… Il s'agit du titre d'un show télévisé proposé par des producteurs français, entendant témoigner le soutien de l'Hexagone à la révolution tunisienne. Une initiative touchante qui n'a peut-être pas été fidèle aux intentions… Un acte de solidarité qu'on respecte mais qu'on peut se permettre de critiquer. Un évènement qui n'a pas charmé tout le monde. Un spectacle qui est parti d'une très bonne idée, mais qui aura finalement parfois sonné faux pour certains présents dans ce fabuleux et magnifique monument historique qu'est le théâtre de Carthage. L'homme invisible Une grande question s'est imposée au cours de ce spectacle. Un phénomène anormal que tous les spectateurs ont constaté avec surprise et une pointe de déception. Nous avons nommé l'instant où Laurent Boyer, présentateur de ce spectacle, accompagné tant bien que mal par notre Lotfi Abdelli, a déclaré qu'il remerciait l'inexistant dans l'enceinte M. Frédéric Mitterrand, pour son intervention, etc. Merci Monsieur le ministre français d'avoir porté la cape de l'invisibilité pour nous surprendre…On aurait peut-être pu nous éviter ce moment de déconnexion en assurant le montage de cette partie, après le spectacle… Condescendance Parallèlement au message d'admiration pour le courage des Tunisiens, un ton condescendant et des discours quelque peu paternalistes ont été accueillis avec beaucoup d'amertume au cours de ce spectacle… Certains ont déclaré tout simplement qu'ils étaient "fiers de nous", d'autres qu'ils disaient toujours que "quand on veut on peut"… Merci, mais le peuple tunisien a quitté la cour du jardin d'enfants pour le champ de bataille… Il est aujourd'hui trop mature pour ce genre de discours… Echange N'oublions pas tout de même de remercier tous les artistes qui ont accepté de venir se produire gratuitement et d'avoir eu le plaisir et l'honneur — soit dit en passant — de fouler le sol si prestigieux de notre théâtre de Carthage. Ils sont venus échanger leurs impressions et nous féliciter de notre courage. Un hommage magnifique qui a certainement touché chaque Tunisien, même si tout le monde sait qu'une révolution ne se fête pas avec les chansons dansantes et les tubes d'été auxquels on a eu également droit, samedi dernier… Un échange tout de même un peu spécial, quand on sait que toute l'audience a été sélectionnée à l'avance par la distribution des invitations dans des endroits ciblés, à l'heure où en Tunisie on prône la transparence et l'égalité. Un événement peu médiatisé, peut-être un hommage "secret" à la révolution… Le sentiment qu'évoque ce spectacle rappelle finalement une étincelle qui aurait pu envoyer un feu d'artifice géant d'anastomose entre le public et cet hymne, mais qui a été malheureusement vécu comme un spectacle parmi tant d'autres, dont on ne gardera certainement pas de souvenir poignant…On aurait préféré ce premier hommage occidental à la révolution tunisienne et qui plus est de la France (un pays qui a vécu une révolution et qui en connaît les implications et les cicatrices), un peu moins "jasmin", beaucoup plus "révolutionnaire", un peu plus "hommage à la révolution tunisienne", un peu moins "hommage à la chanson commerciale et aux souvenirs nostalgiques de certains", un peu plus enrichissant en somme. C'est que nous tenons à préciser que la chanson qui a accompagné la révolution tunisienne dans toutes ses étapes était peu présente au cours de ce spectacle et ce qui nous a été offert ne la traduit pas fidèlement... Nous saluons, malgré tout, le geste amical de la France et de tous ces artistes pour leur sincérité et leur générosité, en espérant que, dorénavant, nos échanges seront beaucoup plus enrichissants réciproquement…