Par Moncef Guen La réunion du Groupe des Huit (G8), comprenant l'Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, la Grande Bretagne, l'Italie, le Japon et la Russie, vient d'avoir lieu le 10 septembre à Marseille en France pour préparer la réunion du G 20 le 23 septembre à Washington ainsi que les assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale et examiner le suivi des recommandations de Deauville du 26 mai 2011 sur l'aide aux pays du Printemps arabe. Le G8 a invité les pays du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe et la Turquie ainsi que la Tunisie, l'Egypte, la Jordanie et le Maroc. Déjà, le Conseil de coopération du Golfe a décidé d'intégrer en son sein la Jordanie et le Maroc, même si ces pays ne font pas géographiquement partie du Golfe. Une sorte de solidarité monarchique a pris le dessus sur les impératifs de la géographie. Il faut reconnaître que les Révolutions du 14 et 26 janvier, respectivement en Tunisie et en Egypte, ont bouleversé le monde arabe. La réunion a abouti à des engagements importants : 38 milliards de dollars US en faveur des quatre pays au cours de 2011/2013. Avec les graves problèmes que traverse la Zone euro, suite aux crises des dettes souveraines des pays dits «PIGS» (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne) et la dégradation de la note des Etats-Unis par l'agence de notation Standard and Poor‘s, les contributions des Etats occidentaux seront minimales. Il sera fait appel aux organisations financières internationales, en particulier la Banque mondiale (10,7 milliards de dollars), la Banque africaine de développement (7,6 milliards de dollars), la Banque européenne d'investissement, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (qui a joué un rôle important dans l'expansion économique des pays de l'Europe centrale et de l'Est après la chute du mur de Berlin) et même la Banque islamique (5 milliards de dollars). Il faut espérer que les pays du Golfe feront également des contributions bilatérales. Suite à ces décisions qui semblent a priori prometteuses, on peut se poser un certain nombre de questions. D'abord, pourquoi 38 milliards seulement quand on sait que les besoins de financement de la Tunisie et de l'Egypte, à elles seules dans les deux années à venir, sont énormes pour redynamiser leurs économies en entreprenant de vastes programmes d'investissement en infrastructures, surtout dans les régions laissées pour compte jusqu'à présent par les régimes dictatoriaux ? Ensuite, pourquoi ajouter aux deux pays républicains révolutionnaires des pays qui, certes ont fait des réformes politiques vers des régimes plus démocratiques, mais peuvent compter directement sur l'assistance des pays du Conseil de coopération, étant déjà pratiquement intégrés dans ce Conseil ? Pourquoi ce mélange qui risque de créer une confusion et aboutir à peu de financements pour les pays qui en ont le plus besoin ? En outre, faut-il s'attendre à des déboursements rapides quand on constate qu'en Tunisie, par exemple, il a fallu attendre jusqu'au mois d'août pour voir les premiers tirages sur les prêts des institutions internationales ? Enfin, pourquoi ce G8 ne fait pas le geste que tout le monde attend, à savoir l'annulation des dettes des pays instigateurs du Printemps arabe ? Les Etats-Unis qui ont dépensé 4 mille milliards de dollars sur les guerres d'Irak et d'Afghanistan peuvent se permettre des annulations de dettes conséquentes vis-à-vis de la Tunisie, de l'Egypte, du Maroc et de la Jordanie. Il en est de même de l'Europe qui a également dépensé pas mal d'argent dans ces guerres. Ce qui me rend sceptique quant à ces engagements c'est que nos frères du Golfe, non seulement logent chez eux les fuyards du 14 janvier avec les fortunes qu'ils ont spoliées mais n'ont fait aucun geste pour financer un dollar d'investissement dans la Tunisie d'aujourd'hui.